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Le Tour de France, Armstrong et les autres: refaisons les classements sans dopés

Si Armstrong est dépossédé de ses maillots jaunes, il y a de fortes chances qu'ils reviennent à d'autres coureurs au moins aussi suspects que lui...

Dernier réglages pour l'équipe BMC, le 28 juin à Liège. La 99e édition du Tour de France débute samedi en Belgique. REUTERS/Bogdan Cristel
Dernier réglages pour l'équipe BMC, le 28 juin à Liège. La 99e édition du Tour de France débute samedi en Belgique. REUTERS/Bogdan Cristel

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L'Union cycliste internationale (UCI) a retiré à Lance Armstrong ses sept victoires dans le Tour de France, lundi 22 octobre. Nous republions un article initialement diffusé le 29 juin 2012 sur les effets des déclassement sur les résultats du Tour de France si l'Américain, mais aussi tous ceux qui ont été accusés, ou fortement suspectés, de s'être dopés étaient déchus de leurs palmarès.

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Avec des si, on mettrait le Tour dans une éprouvette. Si Lance Armstrong, soupçonné de dopage par l'USADA, l'agence antidopage américaine, est sanctionné et ses victoires annulées, ce sont ses résultats dans les plus grandes courses qui seraient rayés des palmarès. L'intégralité des classements en serait bouleversée. Il perdrait sur tapis vert et a posteriori tout ou partie de ses maillots jaunes, au profit de ceux qui sont arrivés derrière lui. Idem pour le classement des étapes…

Ce ne serait pas une première. L'Américain Floyd Landis a été déclassé au profit de l'Espagnol Oscar Pereiro pour l'édition 2006 et idem pour Alberto Contador au bénéfice d'Andy Schleck en 2010.  

Ces décisions ne sont pas absurdes. Mais si elles devaient s'appliquer à tous, c'est-à-dire pas uniquement au vainqueur mais à tous les usual suspects, elles pourraient entraîner un bouleversement au-delà de la première place. En 2000, 2001 et 2003, par exemple, le dauphin d’Armstrong s’appelle Jan Ullrich.

Vainqueur du tour 1997 (l’année précédant le scandale Festina et la victoire de Marco Pantani), troisième de l’édition 2005, le coureur allemand n’a, comme beaucoup, jamais subi de contrôle antidopage positif. Mais il a été sanctionné entre autres dans le cadre du grand scandale Puerto.

Faut-il, dans ces conditions, lui laisser ses titres et lui permettre d'empocher ceux du coureur texan? Que faire aussi d’Ivan Basso, deuxième en 2005, pris lui aussi dans l'affaire Puerto et suspendu, sans qu'il n'ait pour autant perdu le bénéfice de ses résultats passés?

La blague ne s’arrête pas là, puisque les trois autres dauphins d'Armstrong sur la période, rappelle Wort, sont le Suisse Zülle (1999), qui sortait tout juste à l'époque de sa suspension pour l'affaire Festina, l'Espagnol Beloki (2002) et l'Allemand Klöden (2004).

Alors oui, nettoyons les palmarès et supprimons des classements ceux qui sont mouillés dans des affaires pas très nettes. Mais il faut du coup redescendre très bas dans les tableaux pour savoir à qui attribuer le Maillot jaune et, comme le montre le tableau ci-dessous, pour obtenir un top 10 que l’on appellera «propre» faute de mieux, il faudrait chercher au-delà du 20e coureur (28e en 2005, avec 19 cas plus ou moins limites sur 29 coureurs).

Deux palmarès «reclassés», au hasard:

  • 2011: Evans, A. Schleck, Voeckler, Sanchez, Danielson, Péraud, Rolland, Taaramae, De Weert et Coppel
  • 2006: Pereiro, Sastre, Evans, Dessel, Zubeldia, Rogers, Boogerd, Fothen, Azevedo et Vande Velde
  • 2002, une des années Armstrong: Azevedo, Mancebo, Sastre, Boogerd, Moncoutié, Lelli, Goubert

Que retenir de ces nouveaux classements? Qu’il n’y a pas de coureur qui domine outrageusement le peloton. Il y a bien Evans, Sastre, Andy Schleck qui sortent du lot, en grattant un Tour et quelques podiums. Des «porteurs d’eau» enfilent un jaune inattendu comme Mancebo, Kivilev, Zubeldia… Mais aucun Français ne succède à Hinault, le dernier Français vainqueur de la Grande boucle, lors de ces dix derniers tours remodelés.

Comment avons-nous établi ce tableau de coureurs dont le nom n’est (pour l’instant) pas associé de près ou de trop loin à une affaire en cours ou passée? Très simple: du classement du Tour sur les dix dernières éditions, nous avons retranché les coureurs contrôlés positifs, ceux qui sont ou ont été suspectés de dopage, et ceux qui font l’objet d’une enquête ou sont dans l’attente d’un procès (1), jusqu’à atteindre cette nouvelle liste de dix coureurs.

A dessein, nous n’avons pas respecté le passage à «vierge» de certains coureurs au casier judiciaire chargé. C’est vrai, la rédemption existe. Disons que par principe, finir à un meilleur classement l’année où l’on est devenu «propre» que l’année où l’on a été convaincu de dopage est suspect… Que ceux qui n’ont jamais triché me jettent la première pierre.

Formulons donc une proposition. Etablissons des classements provisoires —PROVISOIRES, en lettres capitales—, n’embêtons pas les coureurs avec des contrôles antidopages quotidiens. Prélevons leurs échantillons sanguins et leur ADN une fois la ligne d’arrivée sur les Champs-Elysées franchie, attendons les progrès de la science, et après dix ans, attribuons définitivement les maillots.

Johan Hufnagel

(1) Nous nous sommes servis des deux excellents sites spécialisés, le français cyclisme-dopage et l’anglo-saxon Dope.ology. Retourner à l'article

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