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Les bactéries de l'obésité

Et si l'obésité, c'était la faute des bactéries stockeuses de graisse de la flore intestinale?

<a href="http://www.flickr.com/photos/kaibara/2234750993/lightbox/">Bactéries</a> / Kaibara via FlickrCC <a href="http://creativecommons.org/licenses/by/2.0/deed.fr">Licence by</a>
Bactéries / Kaibara via FlickrCC Licence by

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Trop de calories ingérées, pas assez d’énergie dépensée: ces deux facteurs ont longtemps été considérés comme les principales causes de l’obésité. Mais en fait, le tableau n’était pas complet et un autre élément vient compliquer la donne: la flore intestinale. Composée d’une dizaine de milliers de milliards de bactéries, virus et autres micro-organismes, elle contribue, elle aussi, à la prise de poids.

Le microbiote, comme on nomme maintenant cette flore, participe à la digestion des aliments et il dégrade les fibres végétales qui, sans lui, seraient indigestes. En outre, il modifie l’absorption des calories et il est même capable de les extraire de certains nutriments dans lesquels nous ne pouvons habituellement pas les puiser. Si l’on ajoute qu’il influe aussi sur nos dépenses énergétiques, on comprendra qu’il joue un rôle clé dans l’accumulation des kilos.

Des souris sans flore

L’influence du microbiote dans le développement de l’obésité a été pour la première fois clairement mise en évidence par Jeffrey Gordon et ses collègues de l’université de Washington. Après avoir créé génétiquement des souris dépourvues de flore, les chercheurs américains ont constaté que ces rongeurs «axéniques» avaient une masse grasse bien inférieure à celle de souris normales, alors qu’elles absorbaient un tiers de calories en plus. En 2006, ils ont franchi un pas de plus en parvenant à faire grossir ces rongeurs minces, simplement en leur transplantant le microbiote de leurs congénères obèses. L’effet a été rapide: 24 heures seulement après cette manipulation, la flore des souris avait déjà été modifiée, même s’il a fallu attendre un peu plus longtemps pour que les animaux deviennent obèses. Jeffrey Gordon en a conclu que les bactéries intestinales ont un impact sur la régulation du stockage des graisses dans le tissu adipeux.

Depuis, l’analyse des matières fécales –de souris, mais aussi d’êtres humains– a révélé que la composition du microbiote des personnes obèses était différente de celle du reste de la population. On sait en effet que les bactéries intestinales appartiennent principalement à deux grands groupes: les Firmicutes et les Bacteroidetes. Or, chez les personnes souffrant d’un important excès de poids, on a observé une diminution des premières et une augmentation des secondes.

Alimention personnalisée

Toutes ces conclusions viennent confirmer les bienfaits tant vantés du régime méditerranéen, riches en fibres végétales et confortent les nutritionnistes qui nous recommandent de manger régulièrement des fruits et des légumes.

Elles pourraient aussi conduire au développement d’une alimentation personnalisée. Chacun, en fonction de la nature et de la composition de son microbiote, se verrait alors conseiller un régime adéquat pour garder la ligne et se maintenir en bonne santé.

Ces recherches pourraient en outre avoir des implications dans la lutte contre l’obésité. Il devrait par exemple être possible de modifier la flore intestinale d’un patient en apportant à son alimentation des prébiotiques (nutriments permettant le développement de certains groupes de bactéries) ou des probiotiques (bactéries vivantes ou levures, comme celles contenues dans certains yaourts, ayant des effets bénéfiques sur la flore). Mais nul ne sait encore si cela permettra de moduler l’absorption des calories.

A long terme, on pourrait aussi imaginer transférer aux patients obèses un nouveau microbiote. Mais cela reste de la musique d’avenir.

Elisabeth Gordon

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