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Comment les djihadistes français partent s'entraîner en Afghanistan et au Pakistan

Ils n'ont jamais été forcément très nombreux, mais la filière existe. Par où passent-ils? Comment sont-ils recrutés?

Une capture vidéo fournie par des talibans pakistanais, vidéo non datée. REUTERS
Une capture vidéo fournie par des talibans pakistanais, vidéo non datée. REUTERS

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Il apparaît que le principal suspect dans les tueries de Toulouse et Montauban, Mohammed Merah, qui revendique son appartenance à al-Qaida, a séjourné au Pakistan et en Afghanistan, selon Claude Guéant, le ministre de l'Intérieur.

Connu de la DCRI pour «sa radicalisation (...) faite au sein d'un groupe d'idéologie salafiste», Mohammed Merah aurait été condamné en décembre 2007 à une peine de trois ans de prison, pour avoir posé des bombes dans cette région du sud de l'Afghanistan, selon le directeur de la prison afghane de Kandahar, Ghulam Faruq, cité par Reuters. Il se serait ensuite échappé en juin 2008, lors d'une attaque du centre pénitentiaire par les talibans

Un djihadiste français passé par les entraînements en Afghanistan et au Pakistan? Jamais en très grand nombre mais de longue date, les djihadistes français ont été présents en Afghanistan et au Pakistan. Au lendemain des attentats du 11-Septembre, plusieurs jeunes Français qui combattaient aux côtés des talibans en Afghanistan ont été pris dans la fuite éperdue des combattants vers le Pakistan.

Plusieurs modes de recrutement

Le corps sans vie d’Hervé Djamel Loiseau avait ainsi été retrouvé sur un col enneigé à la frontière entre l’Afghanistan et le Pakistan, à la veille de Noël 2001. Il avait rejoint l’Afghanistan par Lahore au Pakistan en mars 2000 avec Brahim Yadel qui sera arrêté au Pakistan et livré aux Etats-Unis. Mourad Benchellali qui a raconté son parcours dans un livre Voyage vers l’enfer subira le même sort que Yadel. 

La plupart des djihadistes français sont d’origine maghrébine, mais des Français convertis à l’islam ont aussi combattu en Afghanistan ou sont venus se former au Pakistan. Sur une cassette vidéo de recrutement diffusée en 2006 par la branche média d’al-Qaida, As Shahab, et tournée dans les zones tribales pakistanaises, un jeune Français le visage aux trois quart masqué appelle les Français musulmans au Djihad et tient des propos incendiaires contre les occidentaux.  

Ces jeunes viennent au djihad de différentes façons. Les sites djihadistes sur Internet jouent un rôle non négligeable de recrutement, montrant en boucle ou décrivant avec force détails morbides les «atrocités» commises contre les musulmans.

Les mosquées sont pour la plupart un lieu de rencontres idéales pour attirer des jeunes peu instruits, émotifs et qui ne trouvent pas dans leur vie quotidienne matière à satisfaction. L’endoctrinement peut venir de l’imam lui-même lors de prêches enflammés ou plus subtilement par des jeunes ayant déjà fait leur apprentissage en Afghanistan ou au Pakistan et qui sont de ce fait auréolé d’un prestige particulier.

Ceux-ci interviennent aussi semble-t-il aujourd’hui au sein d’associations sportives, culturelles ou autres qui «échappent» à l’étroite surveillance des mosquées. L’endoctrinement idéologique se fait beaucoup plus en Europe qu’au Pakistan ou en Afghanistan, ne serait-ce qu’en raison de la langue.

Le trajet inverse des immigrés clandestins

Des jeunes Français sont enrôlés dans des madrassah (écoles coraniques) pakistanaises, mais depuis quelques années la présence d’étrangers y est très surveillée et ce n’est pas de là que viennent le petit nombre de Français aujourd’hui engagés dans le Djihad au Pakistan.

Une fois «la proie» repérée, l’agent recruteur détermine la voie la plus facile pour arriver sans encombre au Pakistan. Il y a plusieurs années, beaucoup de jeunes passaient par Londres avant d’être dirigés sur d’autres pays intermédiaires comme la Turquie ou l’Allemagne. La plupart viennent maintenant  directement au Pakistan en utilisant de vrais ou faux visas pakistanais.

Ils arrivent par l’un des quatre aéroports internationaux que sont Karachi, Islamabad, Lahore ou Peshawar. Normalement, ils sont repérés au moment de leur arrivée et plus ou moins suivis par les services français, au moins quand ils quittent le pays.

Une autre filière beaucoup plus anonyme: celle qui passe par l’Iran, les djihadistes utilisant en sens contraire le trajet des clandestins qui cherchent fortune en Europe. A chaque étape du voyage, un «relais» prend en charge les apprentis djihadistes, soit pour une nuit ou plusieurs jours avant l’étape suivante.

Au Pakistan, les nouveaux arrivants pour le Djihad –dont le nombre a diminué ces deux dernières années– sont pris en charge par des membres des groupes djihadistes locaux qui ont tous une infrastructure dans les principales villes pakistanaises.

Ceux-ci sont en contact avec les responsables des camps d’entraînement qui accueillent avec toujours beaucoup de suspicion les nouveaux arrivants. Ces dernières années, le nombre de djihadistes français présents au Pakistan était estimé par les services de sécurité à environ une dizaine.

Françoise Chipaux

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