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Qu’est-ce qu’un technocrate?

Et ont-ils jamais eu le pouvoir?

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Lucas Papademos, nouveau Premier ministre de la Grèce, a prêté serment le 11 novembre. En Italie, Silvio Berlusconi est remplacé par l’ancien commissaire européen Mario Monti. Ces deux hommes ont été présentés comme des «technocrates» dans des grands journaux. Mais c’est quoi, un technocrate?

C’est un expert et pas un homme politique. Les technocrates fondent leurs décisions sur des informations précises plutôt qu’en fonction de l’opinion publique. C’est pourquoi on fait souvent appel à eux durant les périodes difficiles (comme, par exemple, avec la crise de la dette en Europe).

Le terme de technocrate vient du mot grec tekhne, ce qui veut dire habileté ou art, et un expert dans des domaines comme l’économie pourrait donc être tout autant qualifié de «technocrate» qu’un expert en robotique. Tant Papademos que Monti sont titulaires de diplômes en économie et ont tenu des postes dans des institutions gouvernementales

Un mode de gouvernement

Le mot technocrate peut également faire référence à quelqu'un qui soutient un mode de gouvernement présidé par des experts. L’idée d’une technocratie demeure pourtant hypothétique, même si des nations ont, par le passé, été considérées comme soumises à une forme de gouvernement des experts.

L’historien Walter A. McDougall décrit ainsi l’Union soviétique comme la première technocratie du monde et il faut en effet reconnaître que son Politburo accueillait, en son sein, une proportion très inhabituelle d’ingénieurs. D’autres nations, comme l’Italie ou la Grèce, ont également connu des courtes périodes de gouvernement technocratique.

Carlo Azaglio Ciampi, ancien économiste et gouverneur de la banque centrale italienne, a été Président du conseil en Italie, de 1993 à 1994. L’économiste et ancien directeur de la Banque de Grèce Xénophon Zolotas a été premier ministre de 1989 à 1990.

La technocratie de la Grande dépression

Aux Etats-Unis, la technocratie fut des plus populaires durant les premières années de la Grande dépression. Mû pour une partie par les idées de l’économiste Thorstein Veblen, le mouvement fut mené par Howard Scott, ingénieur de formation, qui avança des solutions aussi radicales qu’utopiques à ce désastre économique, exprimées dans un langage scientifique.

Son mouvement, fondé en 1932, attira rapidement une grande attention sur lui –le New York Times fut un des premiers journaux à évoquer ce phénomène et le Liberty Digest déclara, quant à lui:

«La technocratie fait fureur. Partout dans le pays, elle est débattue, expliquée, portée au pinacle, vouée aux gémonies et suscite toutes les interrogations. Le phénomène semble aussi facile à expliquer que… la théorie de la relativité d’Einstein.»

(De nombreux mouvements, parfois farfelus, parfois moins, firent leur apparition aux Etats-Unis durant cette période, en jouant souvent sur le populisme, comme celui de Huey Long, du Père Cloughin  ou du National Ham&Eggs: un fait au centre du film Meet John Doe – l’Homme de la rue de Frank Capra, NdT).

Un an plus tard, la technocratie avait pratiquement disparu de la circulation. Il n’existe donc aucun «Parti technocrate» aux Etats-Unis, mais l’organisation de Scott, baptisée Technocracy Inc., continue de remuer.

Forrest Wickman

Traduit par Antoine Bourguilleau

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