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Entre précarité et pouvoir: petite histoire des maîtresses

Pourquoi tant de femmes ont-elles accepté d’être la maîtresse d'un homme de pouvoir, voire ont recherché ce statut?

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Avant Monica Lewinsky, Camilla Parker Bowles ou Marilyn Monroe, il y eut Hagar, la première maîtresse connue de l’Histoire.

Selon l’Ancien Testament, Hagar est une esclave égyptienne que Sarah, l’épouse d’Abraham, mit dans le lit de son mari car elle ne pouvait lui donner d’enfant. Lorsque Hagar tomba enceinte d’Ismaël (l’héritier d’Abraham donc), la servante jusqu’alors soumise devint hautaine et traita l’épouse d’Abraham avec mépris.

En représailles, Sarah chassa Hagar de chez eux. (Un ange divin persuadera Hagar, contrite, de retourner chez le couple.) Plusieurs années plus tard, Dieu l’ayant rendue fertile, Sarah donna naissance à Isaac et s’en prit de nouveau à la concubine de son mari.

«Renvoie cette esclave et son fils!» exigea-t-elle d’Abraham qui, sur-le-champ, bannit Hagar pour la deuxième fois. La leçon durement apprise par Hagar: son pouvoir n’était qu’éphémère et ne dépendait pas que de sa capacité à plaire à son amant ou à lui donner un fils en bonne santé. L’orgueil de la maîtresse ne fait pas le poids face à la colère de l’épouse.

Précaire maîtresse

Plusieurs milliers d’années plus tard, la position de la maîtresse reste précaire, comme le montre l’historienne Elizabeth Abbott dans son dernier livre Mistresses: A History of the Other Woman («Maîtresses: une histoire de l’autre femme»), qui sort cette semaine aux États-Unis. Pourtant, depuis Hagar, une poignée de femmes se sont servi de leurs relations scandaleuses pour accéder au pouvoir et changer le cours de l’Histoire.

Avant les biographies, Elizabeth Abbott fait un rappel important: la maîtresse n’a pas toujours été stigmatisée. En effet, l’idée du mariage d’amour est relativement récente. Autrefois, le mariage n’était rien d’autre qu’un arrangement politique ou économique entre deux familles.

Maris et femmes, écrit Elizabeth Abbott, «n’étaient pas tenus de trembler de désir, de s’adorer ou de combler leurs besoins affectifs». Pour illicites que soient les relations entre un homme et sa maîtresse, elles étaient attendues et tolérées: après tout, il fallait bien que monsieur satisfasse ses besoins sexuels.

Pourtant, si les hommes avaient droit aux aventures extraconjugales, les femmes qui tentèrent de les imiter furent presque toujours ostracisées et dénigrées.

Conseillères politiques ou impératrices

Alors, pourquoi tant de femmes ont-elles accepté d’être la maîtresse, voire ont recherché ce statut? Dans certains cas, elles n’eurent pas le choix. Mais dans d’autres, si elles se sont livrées volontairement à l’immoralité, c’est qu’elles étaient prêtes à troquer leur respectabilité contre un peu de pouvoir.

La majorité des femmes présentées dans le livre d’Elizabeth Abbott ont usé de leur habileté et de leurs avantages fraîchement acquis pour se faire une place. Expertes dans l’art de faire fructifier leur capital érotique, ces femmes sont devenues conseillères politiques, romancières célèbres ou impératrices. Dans la plupart des cas, leur ascension n’aurait pu être possible sans ce partenariat abject mais hautement stratégique.

«Pour la plupart de ces maîtresses, la relation n’avait rien de romantique, m’a confié Elizabeth Abbott au téléphone. Elles savaient ce qu’elles en retiraient.»

Elles savaient aussi autre chose: que leur pouvoir était éphémère, un bien périssable. Bien souvent, il durait le temps de leurs joues roses et de leur taille de guêpe.

La galerie de portraits qui illustre cet article présente la vie de dix femmes qui ont su mettre leurs charmes à profit. Toutes ont gagné leur place dans les livres d’Histoire grâce à leur amant, mais sans leur habileté et leur intelligence, leur renommée ne serait jamais sortie de l’alcôve. La beauté, pour ces séductrices, n’était qu’un début.

Elizabeth Weingarten

Traduit par Florence Curet

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