Politique / France

Quelles qualités pour un président?

La campagne pour la primaire socialiste arrive à grands pas: il va falloir dépasser les petites phrases pour mettre en valeur les traits de caractère des candidats pour savoir s'ils correspondent à ce que la Nation attend d'un chef de l'Etat.

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La saison des candidatures à l’élection présidentielle est ouverte. A droite, comme à gauche. Pour l’instant, on n’a pas réussi à voir surgir les vraies raisons d’être de ces candidatures, sinon des ambitions personnelles, ou un soi-disant dévouement à la cause nationale. Et pour l’instant, on en est à des querelles d’écolier.

Choisir un candidat, à l’intérieur d’un camp, c’est choisir un programme et un profil psychologique. Parlons ici d’abord du profil psychologique. Il sera temps, plus tard, de parler en long et en large des programmes.

Pour avoir été pendant dix ans le plus proche collaborateur d’un président de la République, associé à toutes les réunions et à toutes les procédures de la présidence, mêlé à toutes ses décisions, je crois pouvoir dire quelles qualités sont nécessaires pour exercer cette fonction si particulière.

D’abord, un président n’est ni un ministre, ni un Premier ministre. Il incarne la nation. Il doit d’abord penser à cette incarnation, à chaque instant, qui détermine tout. Il doit la vivre profondément. Il doit sans cesse penser à la trace de son action dans l’histoire de France, passée et future.

Il doit avoir un caractère solide, une grande capacité de travail. Il doit s’habiller de façon élégante, s’exprimer dans un français sans faute; parler au moins parfaitement l’anglais; et si possible au moins une autre langue étrangère. Il doit lire tous les jours la presse étrangère et connaître parfaitement les nouvelles technologies: un président qui ne saurait répondre lui-même à ses emails, envoyer un tweet ou naviguer sur Google serait aujourd’hui incapable de comprendre le monde.

Il doit aussi avoir une capacité à ne pas mentir à lui-même, à garder un secret, à travailler en équipe mais à décider seul, sans le faire en fonction de ses intérêts propres ou de rancunes personnelles. Il doit être capable de ne pas se mêler des détails, s’en tenir à de grandes directives, et seulement corriger les ministres quand ils s’écartent de la ligne qu’il a tracée pour le pays.

Il doit avoir aussi une grande connaissance des sujets les plus essentiels pour l’incarnation de la nation: les problèmes militaires, financiers, éducatifs, et sociaux. Il doit avoir une grille de lecture des événements qui nous attendent. Et en particulier des conséquences de la crise financière, qui ne peut manquer de revenir, et qui exigera des décisions nécessairement impopulaires.

Il devra être capable de créer un consensus avec l’opposition sur les grands sujets de défense et de finances publiques.

Pour avoir ses qualités, un candidat à la présidence de la République ne doit donc pas nécessairement avoir été ministre. Au contraire même, cela pourrait fausser ses réactions, en le ramenant à des considérations de détail. Il doit sûrement avoir été élu local, même si, dans son nouveau rôle, il ne devra pas représenter les intérêts des communes, des départements ou des régions, mais ceux du pays tout entier.

Une campagne de primaire n’est pas, par nature, faite pour révéler ces traits de caractères. Pour y parvenir, il ne faudra pas se contenter de petites phrases, de postures, de ralliements et de trahison. Il faudra oser poser ces questions à ces candidats.

Jacques Attali

Chronique également parue dans L’Express

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