Économie

L'affaire DSK, un séisme pour l'euro et la Grèce? Voyons!

Que l’inculpation de DSK soit un séisme pour la gauche est l’évidence. Que ce soit aussi un séisme pour l’euro et pour le FMI est faire du journalisme sensationnaliste sans rapport avec la réalité.

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L’euro n’a bougé que quelques heures après l’arrestation du patron du FMI. La monnaie européenne dépend aujourd’hui beaucoup plus lourdement d’autres facteurs: la solidité de la reprise sur les différents continents, les endettements comparés des deux côtés de l’Atlantique,  l’état des banques, etc.

La chute de DSK a pu jouer un court moment mais la «réalité» macro-économique a vite repris le dessus.

Quant au «séisme au FMI»: la belle affaire! Dominique Strauss-Kahn devait démissionner et partir dans une, deux, trois semaines, dans quelques jours, c’était annoncé. Il avait demandé à son premier adjoint, John Lipsky, de rester au moins jusqu’à la fin du G20 cet automne pour assurer la direction générale en intérim du futur nouveau patron. Voilà un départ anticipé de 10 ou 20 jours, point! Cela ne change rien.

Cette inculpation change néanmoins le contexte dans lequel va se décider sa succession.

DSK, de l’avis général, aura été un très bon directeur général. Il partait comme un Européen laissant une bonne image. Celle-ci est brutalement ruinée, ce qui va renforcer les pays émergents dans leur demande de changer la donne et de nommer cette fois-ci, une première depuis 1945, un non-Européen à la tête du Fonds. Angela Merkel a anticipé sur ce terrain en réaffirmant, dès lundi, que l’Europe «a[vait] de bons candidats».

La chancelière a évidemment la crise des dettes souveraines européennes en tête. Un non-Européen aurait eu beaucoup de mal à comprendre les bizarreries de l’Union et de l’Eurozone –il est vrai pas piquées des vers– et aurait probablement eu tendance à être moins patient et peut être moins généreux qu’un Français, ancien ministre, très europhile, comme DSK.

Cette crise n’est pas finie, les négociations continuent. Mais là encore, de toutes façons, le patron du FMI devait déserter la scène dans quelques jours pour se consacrer à la primaire socialiste. Cela ne change guère.

En outre, les dites-négociations sont assez avancées et les scénarios sont désormais connus.

Les scénarios de sortie de crise

Tout commence par la Grèce, comme l’antique. La situation est difficile. L’austérité va-t-elle tuer la croissance et enfermer la Grèce dans une spirale infernale où la récession coupe les recettes donc les facultés de remboursement?

L’Union insiste lourdement pour qu’Athènes allège sa dette en privatisant beaucoup (pour au moins 50 milliards d’euros sur les 350 milliards de valeurs potentielles que posséderait l’Etat grec).

Mais ces solutions, austérité et privatisation, sont politiquement explosives.

Pour l’heure le gouvernement tient bon, mais qu’en sera-t-il dans un an? Dans deux ans? Ne vaut-il pas mieux abandonner une partie de la dette et repartir sur un schéma neuf et assaini?

La BCE et les autres capitales préfèrent éviter une telle restructuration de la dette grecque qui mettrait les banques à mal et aurait un effet de contagion au Portugal et en Irlande.

On a compris que les gouvernements vont conclure que «ça tiendra» à condition de refinancer à nouveau la Grèce par un deuxième plan d’aide (le premier à été de 110 milliards d’euros). Le hic est que les marchés ne croient guère à ce scénario optimiste. Ils estiment, eux, que «ça ne tiendra pas» et que la Grèce devra faire défaut. Ils seront difficiles à convaincre.

C’est ici que se dessinent les deux scénarios possibles. Soit les gouvernements et la BCE ont raison et ils réussissent à convaincre les marchés. Alors disons que le problème de la restructuration est repoussé à l’année 2013.

Soit, ils savent que la Grèce devra restructurer, mais ils jurent le contraire pour gagner un peu de temps et préparer une ligne de défense «globale» qui concerne la Grèce mais aussi l’Irlande, le Portugal ainsi que les banques.

Ils construisent un pare-feu pour un jour, sans doute vers le début d’été, après les élections du 5 juin au Portugal, annoncer qu’Athènes fait défaut sur un tiers de sa dette, que le Portugal fait ceci ou cela et l’Irlande itou et que, parallèlement, les banques grecques sont rachetées le jour même par telles ou telles, ou tout simplement nationalisées.

Tout cela est à l’heure actuelle encore incertain. Mais, pour revenir à DSK, sa chute n’y change rien. Candidat aux primaires socialistes, il aurait été hors de ces scénarios à venir de toutes façons.

Eric Le Boucher

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