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Pourquoi l'uranium a-t-il besoin d'un bain de mer?

La centrale de Fukushima est habituelle refroidie à l'eau de mer. Mais là, les Japonais ont décidé d'injecter directement l'eau dans le réacteur.

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Alors que la menace d'un grave accident nucléaire se fait de plus en plus précise au Japon, les ingénieurs ont décidé d'injecter de l'eau de mer dans les réacteurs 1, 2 et 3 de la centrale de Fukushima-Daiichi. Une solution rapide au problème de surchauffe du combustible, mais qui ne sera pas sans conséquences sur le futur des réacteurs en question. Voici pourquoi.

Examinons sommairement le principe d'un réacteur nucléaire. Sur le plan technologique, une usine comme celle de Fukushima est infiniment plus sophistiquée qu'une centrale à charbon. Mais l'idée de base reste la même: chauffer de l'eau pour créer de la vapeur et utiliser celle-ci pour faire tourner une turbine, elle-même reliée à un générateur qui produit de l'électricité.

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C'est la fission d'atomes instables d'uranium qui produit la chaleur –généralement entre 300 et 500°C. C'est pour maintenir la température dans les bornes de sécurité qu'intervient la «source froide». Ce réseau d'eau secondaire refroidit le système via une multitude de tuyaux, sans être toutefois en contact direct avec le combustible. A Fukushima, il est alimenté par de l'eau de la mer toute proche.

«La seule solution»

Mais le séisme a endommagé le système de circulation de cette «source froide». La température montant dangereusement dans le réacteur, les ingénieurs japonais ont décidé d'injecter directement l'eau de mer dans le réacteur –et non plus simplement autour– pour noyer le combustible et le refroidir.

L'eau a été préalablement chargée en bore, élément chimique capable de freiner la réaction nucléaire. Selon un ingénieur nucléaire d'EDF, qui souhaite rester anonyme, «cette injection massive est la seule solution, et la mer est la seule réserve d'eau proche de la centrale». Mais même si l'opération réussit, pas sûr que le malade s'en remette. 

Car l'opération rendra inutilisables les réacteurs concernés. En plus d'être corrosif, le sel de l'eau de mer pourrait former des dépôts à l'intérieur de ceux-ci, de même que les diverses autres impuretés de cette eau non filtrée. Ajouté aux graves dommages provoqués par les explosions ou la fusion partielle du combustible, ce procédé devrait conduire, la crise passée, au démantèlement pur et simple de ces réacteurs. Voire, en cas de dégâts sur l'enceinte de confinement, à la construction d'une structure ad hoc autour du réacteur, pour une durée variable. A l'image du sarcophage de béton construit autour de la centrale de Tchernobyl. 

Dominique Albertini

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