France

Ministry of Silly Walks

La disparition du ministère de l'Identité nationale est l'unique bonne nouvelle de ce remaniement. C'est même la seule nouvelle tout court de l'opération.

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Ce qui me frappe le plus, lorsque la composition d'un gouvernement est annoncée, celui-ci ou un autre, c'est la créativité des intitulés et des périmètres. Les Britanniques ou les Américains ont un «department of Transport» dont le job est de s'occuper ― le croirez-vous? ― des transports. Nous avons un énorme bidule aux contours flous dont le dernier avatar est ce «ministère de l'Ecologie, du Développement durable, des Transports et du Logement» et dont même le patron ne sait pas exactement ce qui est de son ressort. 

Oh, nous avions bel et bien un ministère des Transports dans le temps, lui même issu du ministère de l’Equipement, né du ministère de la Construction mais, clairement, ça change tout le temps…

Sous François Mitterrand, le ministère des Affaires étrangères s'est même appelé «ministère des Relations extérieures». Pour l'ancien président socialiste (hé hé, je rigole), c'était sans doute un bon moyen de rappeler aux Claude Cheysson et autres Hubert Védrine que le concept d'hyperprésidence ne serait pas inventé que 25 ans plus tard. Pour autant, ni Clinton, ni Bush, ni Obama n'ont jamais rebaptisé leur Secretary of State «préposé aux appels téléphoniques longue-distance» pour l'empêcher de prendre la grosse tête.

De fait, la composition d'un gouvernement français, c'est essentiellement un casting ultra-subtil permettant de satisfaire les alliés de demain, de punir ceux d'hier et, accessoirement, de réformer les régimes de retraite. On fait rentrer celui-ci, sortir celui-là, on lui donne ceci, on lui retire cela… Et si Villepin n'était pas incapable de voir la poutre qui lui explose le globe oculaire, les parallèles qu'il dresse entre l'exercice du pouvoir sous l'Ancien régime et la période actuelle auraient beaucoup plus d'intérêt. Non pas que, chez les autres, on ne compose pas un gouvernement dans le même esprit de calcul politicien, mais nos équipes pléthoriques et nos ministères à géométrie variable sont tout de même une vraie spécificité...

D'autant plus que ça doit finir par coûter pas mal de sous en réédition de papier à lettre, de cartes de visite et de plaques de cuivre apposées sur les façades, ce petit jeu. Encore que… Si ça se trouve, il y a encore des types qui se présentent comme attachés au ministère des Travaux publics et de l'Urbanisme (ne cherchez pas, c'était le ministère des Transports de 1944 à 1959).

Le gouvernement Fillon 3, dont on vous expliquera sans doute, à gauche, qu'il est le pire jamais composé, qu'il marque l'évolution ultra-droitière d'une présidence Sarkozy à la dérive vers je ne sais quel enfer libéralo-fasciste, est donc un gouvernement français totalement standard, avec le même mix de tous les partis et courants supposés aider à une réélection du boss en 2012. 30 ministres (les Britanniques ont 24 «departments», les Américains 15) dotés d'attributions aussi fantaisistes que «chargé de la cohésion sociale», de «la ville» ou de «de la vie associative» ― préoccupations sans doute légitimes mais dont on comprend mal qu'elles dépendent de ce niveau de la gestion d'un pays.

Tellement standard, même, qu'il se débarrasse enfin de l'intitulé le plus grotesque jamais inventé par quiconque est chargé d'inventer les intitulés des ministères (un fonctionnaire du «ministère de la Communication», autre perle bien de chez nous?), ce fameux ministère de l'Identité nationale dont on aurait aimé qu'il ne figure jamais sur aucun papier à lettre.

Mais pour le reste, business as usual.

Hugues Serraf

PS: Est-il possible que quelqu'un ne connaisse toujours pas le sketch des Monty Python qui prête son titre à cette chronique? Sans doute pas. Mais au cas où, c'est sur YouTube...

Photo: ministry of energy, resources and silly walks / switchoffhazelwood via Flickr CC License by

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