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Iran: attentats simultanés contre Ahmadinejad et une usine pétrochimique

L'opposition armée à la République islamique démontre sa capacité à frapper. Elle bénéficie depuis quelques mois du soutien d'Israël et des Etats-Unis.

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La coïncidence n'en est pas une. Au moment même où un attentat à l’explosif était perpétré contre le convoi du président iranien Mahmoud Ahmadinejad durant la traversée de la ville de Hamadān, ancienne capitale de la Perse située au nord du pays, une puissante explosion retentissait le 4 août vers midi faisant cinq morts parmi les ouvriers du complexe pétrochimique Pardis, au sud de l’Iran. Ahmadinejad est sorti indemne du convoi alors que plusieurs de ses gardes du corps ont été blessés. Il a pu normalement rejoindre le stade où il a délivré un discours en direct à la télévision. 

Il est à noter que l’explosion dans une usine a eu lieu à Assalouyeh, au sud de l’Iran sur la côte du Golfe Persique, dans la région du réacteur nucléaire de Bushehr. Les autorités iraniennes prétendent que l’explosion est due à une rupture de canalisation de gaz mais des sources de renseignements précisent que l’usine a été touchée par cinq engins explosifs. Ce complexe à haute technologie venait de faire l’objet d’une inauguration le 28 juillet par le président lui-même.

Après avoir nié l’attentat et parlé de «pétard», les autorités iraniennes ont modifié leur version des faits en attribuant la tentative contre le président à un kamikaze qui visait particulièrement le convoi de journalistes et non Ahmadinejad. Les services de sécurité ont vite fait le lien entre cet attentat et l’explosion dans l’usine pétrochimique, attribués à des opposants extrémistes qui ont surtout voulu prouver qu’ils pouvaient frapper des cibles importantes aux deux extrémités du pays. L’opposition fait de plus en plus preuve d’audace tandis que ses actions commencent à être relayées par les médias malgré la chape de plomb qui verrouille l’information en Iran.

Assalouyeh est une ville sensible car elle représente la plaque tournante de la distribution du gaz en provenance de South Pars, le site d’exploitation offshore de gaz naturel situé à la frontière de l’Iran et du Qatar. En portant atteinte aux structures économiques du régime, déjà mal en point, les activistes tentent d’affaiblir le pays pour laisser se développer la contestation. Cette explosion n’est pas isolée car une autre a déjà eu lieu le 24 juillet dans une usine chimique sur l’île de Kharg faisant quatre morts.

D’autres incidents mystérieux n’ont pas été relayés par la presse occidentale. Le quotidien panarabe Asharq el-Awsat a fait état, le 1er août, du crash d’un drone iranien à proximité de la centrale nucléaire de Bushehr. La panique s’était emparée de la population qui avait alors cru à une attaque des israéliens. L’origine de cet incident reste mystérieuse.   

Il devient difficile pour les autorités iraniennes de nier ces troubles qui confirment l’existence de groupes actifs d’opposition radicaux, installés sur la côte face au détroit d’Ormuz et qui s’en prennent aux installations stratégiques qui y sont implantées. La preuve est ainsi faite que la résistance extérieure se fait plus incisive parce qu’elle bénéficie d’une aide importante de la part des Etats-Unis et d'Israël en particulier. Les liens entre le Mossad et la résistance iranienne ne sont plus un secret.

Sur les 35 partis d’opposition développant leur action à l’étranger, l'Organisation des Moudjahidines du peuple iranien est la plus structurée. Elle a développé des réseaux dormants, capables de se réactiver à la moindre alerte et exploités par le Mossad qui a beaucoup de mal à s’implanter directement en Iran. Les Moudjahidines du peuple ont réuni le 26 juin à Taverny plusieurs dizaines de milliers d'opposants au régime iranien, revendiquant un succès diplomatique avec la présence de personnalités comme l'ex-ambassadeur américain à l'ONU John Bolton.

Ils ont été retirés de la liste des organisations terroristes dressée par l'Union européenne. Les Etats-Unis avaient hésité à soutenir ces opposants qui se rangent aussi derrière la bannière islamique mais dont l’objectif avoué consiste à détruire, par la force et non par les urnes, le régime iranien actuel.

Les Etats-Unis et Israël ont en fait changé de stratégie contre la République Islamique et Mahmoud Ahmadinejad au cours des derniers mois. Ils ont notamment été surpris par la capacité de résistance de l'opposition et de la société civile après l'élection présidentielle truquée de juin 2009 et les manifestations et affrontements qui ont suivi. Ils comptent sur l'opposition interne, y compris armée, pour mettre à mal le régime des mollahs et pouvoir éviter une ainsi une action militaire incertaine contre les installations nucléaires iraniennes.

Jacques Benillouche

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