La semaine dernière, l'histoire d'une fille de 10 ans originaire de l'Ohio, tombée enceinte après un viol, avait fait les gros titres de la presse internationale. En raison de la décision de la Cour suprême de ne plus protéger le droit à l'avortement dans son État, l'enfant avait dû rejoindre l'Indiana pour avoir accès à une IVG. Des groupes d'activistes «pro-vie» avaient alors estimé que la jeune fille aurait dû mener sa grossesse à terme.
C'est dans ce contexte que le New York Times a souhaité rappeler les dangers de la grossesse et de l'accouchement sur le corps d'une enfant en donnant la parole à des professionnels de santé malheureusement habitués à cette problématique.
Comme l'explique le docteur Ashok Dyalchand, qui a travaillé pendant plus de quarante ans avec des adolescentes enceintes dans des communautés pauvres d'Inde, le bassin d'une jeune fille est encore bien trop étroit pour le passage d'un fœtus, aussi petit soit-il. «[Ces filles] ont un accouchement long, [...] le fœtus appuie sur la vessie et sur l'urètre, ce qui provoque parfois des maladies inflammatoires pelviennes et la rupture des tissus entre le vagin, la vessie et le rectum.»
«Les complications, la morbidité et la mortalité sont beaucoup plus élevées chez les filles de moins de 15 ans que chez celles de 16 à 19 ans, bien que ces dernières aient une mortalité deux fois plus élevée que les femmes de 20 ans et plus», ajoute le spécialiste.
Les statistiques de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) viennent par ailleurs confirmer ce taux de mortalité particulièrement élevé. Selon un rapport publié en 2020, les complications liées à la grossesse et à l'accouchement «sont la principale cause de décès chez les filles âgées de 15 à 19 ans à travers le monde».
Une «torture mentale»
Selon une étude publiée en 2015 dans le Journal of Neonatal-Perinatal Medicine, les grossesses à l'adolescence sont également associées à un grande nombre de pathologies: anémie maternelle, infections, éclampsie, dépression post-partum... Les bébés nés de jeunes filles sont par ailleurs plus souvent prématurés.
«Dans la physiologie normale, une enfant de 10 ans n'est pas censée être enceinte. Le fait est que c'est une enfant et [qu'elle] ne peut pas mettre au monde un enfant, elle n'est pas prête», défend le docteur Shershah Syed, gynécologue et spécialiste de la mortalité maternelle au Pakistan. «Et la torture mentale qu'elle va subir, ceci n'est pas mesurable.»
Pour Marie Bass Gomez, sage-femme et infirmière au Bundung Maternal and Child Health Hospital en Gambie, le constat est similaire. «Lorsqu'une enfant arrive enceinte dans notre centre, c'est vraiment traumatisant pour elle», confie-t-elle. «Cet environnement n'est pas fait pour elle.»