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AfD-Leaks: les fuites qui embarrassent l'extrême droite allemande

Appels à prendre les armes contre l'opposition, injures homophobes et dissensions internes... Des conversations internes de l'AfD ont été rendues publiques et achèvent d'écorner l'image du parti d'extrême droite.

Alice Weidel (de face), co-leadeuse du parti d'extrême droite allemand Alternative pour l'Allemagne (AfD), et les membres du groupe parlementaire de son parti, Beatrix von Storch (2e à gauche), ainsi que le co-leader du parti, Tino Chrupalla (à droite), le 7 avril 2022. | John MacDougall / AFP
Alice Weidel (de face), co-leadeuse du parti d'extrême droite allemand Alternative pour l'Allemagne (AfD), et les membres du groupe parlementaire de son parti, Beatrix von Storch (2e à gauche), ainsi que le co-leader du parti, Tino Chrupalla (à droite), le 7 avril 2022. | John MacDougall / AFP

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur Die Zeit

C'est un historique de conversations sur WhatsApp qui n'aurait jamais dû sortir du cercle de l'extrême droite allemande. Près de 40.000 messages, envoyés de 2017 à 2021 sur un groupe de discussion du parti de l'AfD (Alternative pour l'Allemagne), ont été transmis par l'un de ses membres, resté anonyme, à des journalistes de NDR et WDR qui réalisaient un documentaire sur le parti de droite radicale.

Sans filtre, les messages donnent un aperçu de la nature des discussions qui animent les responsables politiques du groupe populiste, et oscillent entre des appels à la résistance armée, à l'emprisonnement de l'ancienne chancelière Angela Merkel, des insultes homophobes, et des querelles intestines.

Ambitions insurrectionnelles

Intitulée «Quasselgruppe», soit «groupe de bavardage», cette discussion WhatsApp rassemble soixante-seize des quatre-vingt douze députés de l'AfD qui siègent au Parlement depuis 2017, date de l'entrée de l'extrême droite allemande au Bundestag.

Les sujets de débats abordés sont multiples, et concernent tant la politique internationale que nationale: élection présidentielle américaine de 2020, gestion de la pandémie de Covid-19 et positionnement par rapport aux antivax et aux Corona-sceptiques du mouvement Querdenker, prise d'assaut du Reichstag par des manifestants hostiles aux mesures sanitaires liées à la pandémie –ils avaient été aidés par des membres de l'AfD en septembre 2020–, crise constitutionnelle allemande...

Plusieurs appels, parfois violents, à un changement de régime sont lancés: on prédit ainsi qu'«il faudra attendre que l'ancien régime s'effondre économiquement et que l'étincelle venue d'Autriche, d'Italie, de France, etc. se propage. Cela viendra, et nous devrons alors nous préparer pour les combats impitoyables qui viendront.» De l'ancienne chancelière, traitée de «rat», on écrit que «cette traîtresse du peuple mérite d'être envoyée en prison jusqu'à la fin de sa vie».

Ailleurs, ce sont des insultes homophobes qui rythment les discussions, notamment contre des adversaires politiques, comme l'ancien ministre de la Santé Jens Spahn (CDU), ou le député Johannes Kahrs (SPD).

Des désaccords internes

Mais nombreux sont aussi les désaccords internes qui opposent les représentants de l'AfD, notamment en ce qui concerne la complaisance du parti avec son aile la plus radicale, représentée par der Flügel, une faction d'inspiration nazie qui n'a été officiellement dissolue qu'en avril 2020. À un député qui demande: «Voulons-nous être un parti national-socialiste ou un parti libéral-conservateur?», une collègue agacée répond: «Est-ce si difficile de ne pas parler du Troisième Reich?»

Les difficultés que connaît l'AfD pour s'imposer au Bundestag font l'objet de vives critiques de la part de ses propres député·es («L'AfD est dans la merde», hasarde encore l'une), qui incriminent volontiers les leaders du parti, Alice Weidel, présidente du groupe parlementaire de l'AfD, Alexander Gauland, dirigeant du parti, et Tino Chrupalla, son porte-parole –vraisemblablement absents du groupe de discussion.

Depuis la fuite des messages, le parti a tenu une réunion, et a décidé de supprimer le groupe de discussion, tout en migrant sur la plateforme de messagerie Telegram.

Le 23 mai sera diffusé un documentaire de quarante-cinq minutes intitulé AfD-Leaks: Les conversations secrètes du groupe parlementaire (AfD-Leaks: Die geheimen Chats der Bundestagsfraktion), qui revient sur l'affaire. Il a été précédé d'une série de trois sketchs réalisés par la comédienne Carolin Kebekus, présentatrice sur WDR, et d'un podcast intitulé Die Jagd.

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