Parents & enfants

Les enfants ne comprennent pas l'ironie

Surtout avant 5 ou 6 ans. Mais on peut les aider.

Comprendre l'ironie implique d'autres types de capacités que les compétences strictement linguistiques. | Sebastián León Prado <a href="https://unsplash.com/photos/dBiIcdxMWfE">via Unsplash</a>
Comprendre l'ironie implique d'autres types de capacités que les compétences strictement linguistiques. | Sebastián León Prado via Unsplash

Temps de lecture: 3 minutes

«Regarde si tu ne pourrais pas éclabousser encore un peu plus!», lance un père à sa fille en réalisant que l'heure du bain a transformé la pièce en étang. La petite Olivia, avec un sourire d'incrédulité, commence à balancer ses bras dans l'eau joyeusement, plus intensément, profitant du spectacle, face au visage déconfit de son père.

L'ironie permet de glisser dans un discours un certain nombre de nuances et d'appréciations qui vont au-delà de ce qui est dit littéralement. Nous y avons tous recours régulièrement. Le sarcasme est une utilisation particulière de l'ironie, visant à la moquerie, et qui peut être mordante et cruelle.

La communication est un processus psycholinguistique dans lequel nous décodons le message de notre interlocuteur afin d'en comprendre le sens. Elle fait appel à différentes compétences linguistiques, mais aussi à des compétences sociocognitives.

Les enfants peuvent avoir des difficultés à comprendre l'ironie et le sarcasme lorsqu'ils ne sont pas en mesure de déchiffrer l'intention communicative de l'autre personne. Cela arrive aussi à certains adultes. C'est également un trait du spectre autistique, qui se caractérise par une tendance à prendre les choses au sens littéral, ce qui est incompatible avec l'ironie.

Des études suggèrent que la compréhension de l'ironie fait appel à des compétences qui se développent seulement vers l'âge de 5 ou 6 ans. Elle peut être plus tardive et dépend de la complexité du message ironique ou sarcastique, et des indices sur lesquels la personne peut s'appuyer pour l'interpréter correctement.

Une question d'âge et de contexte

Il existe des contextes dans lesquels un enfant, selon son âge, peut plus facilement déchiffrer un commentaire sarcastique. Par exemple, lorsqu'un enfant à l'école dit à un autre enfant qui rate un tir au but: «Tu es un phénomène au foot», l'enfant qui fait l'objet de cette fausse louange peut comprendre qu'on lui reproche en fait son manque d'habileté.

Mais d'autres situations sont plus ambiguës. L'intention réelle de l'expéditeur peut passer inaperçue, par exemple lorsqu'un enfant qui crie se voit dire par le professeur: «Si tu peux parler plus fort, ils ne t'entendent pas bien en Chine!» Dans ce genre de situation, l'enfant doit percevoir différents types d'informations pour comprendre que l'enseignant demande en fait le contraire de ce qu'il dit littéralement.

Il existe des éléments du comportement non verbal qui aident à comprendre le message sarcastique, et qu'un enfant ne perçoit pas encore: le ton de l'expéditeur, son langage gestuel et d'autres éléments du contexte lui-même.

Comprendre l'ironie implique également d'autres types de capacités qui relèvent de ce que l'on appelle la théorie de l'esprit, c'est-à-dire la capacité de comprendre le comportement, l'intention et l'état émotionnel de l'autre personne. Il s'agit d'interpréter avec précision ce que l'autre personne a dans la tête et, par conséquent, quelle est son intention de communication.

De nombreux enfants, alors qu'ils développent cette capacité, ont tendance à confondre leurs propres connaissances avec celles des autres, par exemple, dans les histoires où on leur demande d'anticiper la réponse d'un enfant qui va chercher sa poupée rangée à l'endroit où il l'avait précédemment mise, sans savoir qu'un autre enfant l'a déplacée. La plupart échouent dans leurs prévisions.

Peut-on les former à le comprendre?

Le sarcasme est une forme courante de langage social, mais il peut être difficile à saisir pour les enfants. Lee, Sidhu et Pexman (2021) ont cherché à savoir si un entraînement pouvait améliorer la capacité des enfants à comprendre le sarcasme. Des enfants âgés de 5 ans et 6 ans y ont participé. Certains ont reçu une formation et d'autres ont joué le rôle de groupe témoin.

Les enfants ont regardé des spectacles de marionnettes. Après chaque histoire, ils ont été interrogés sur les idées, les intentions et le sens de l'humour du conteur. Les résultats de cette étude ont montré que différents aspects de la compréhension du sarcasme pouvaient être améliorés par la formation.

Pour reconnaître le sarcasme ironique, les adultes ont tendance à se fier principalement à deux indicateurs: le contexte dans lequel l'énoncé est produit et l'intonation du locuteur. Plusieurs experts ont constaté que les enfants étaient capables de reconnaître le sarcasme lorsque l'expéditeur utilisait une intonation sarcastique, mais échouaient sans cet indice d'intonation –même lorsque le contexte suggérait une interprétation non littérale.

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l'article original.

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