Culture

«Les objets sont les vestiges de l'histoire dans nos vies»

Dans «Faire l'histoire», le nouveau magazine d'Arte, le spécialiste du Moyen Âge Patrick Boucheron nous apprend que les objets comptent autant que l'histoire.

Dans <em>Faire l'histoire</em>, on découvre des objets anciens comme la hache polie et le buste de Néfertiti, ou on redécouvre des objets du quotidien tels que le miroir, le passeport et le parasol. | Rachel Claire <a href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/assiette-mer-vacances-creatif-4992863/">via Pexels</a>
Dans Faire l'histoire, on découvre des objets anciens comme la hache polie et le buste de Néfertiti, ou on redécouvre des objets du quotidien tels que le miroir, le passeport et le parasol. | Rachel Claire via Pexels

Temps de lecture: 2 minutes

«L'histoire ce n'est pas seulement dans les musées, dans les palais ou dans les châteaux, c'est aussi quelque chose que l'on peut avoir chez soi.» C'est de cette façon que Patrick Boucheron nous résume Faire l'histoire, le nouveau magazine qu'il présente sur Arte, dont Slate.fr est partenaire. Après une première collaboration entre la chaîne et l'historien français pour la série Quand l'histoire fait date, le spécialiste du Moyen Âge aborde désormais l'histoire par le prisme des objets.

Chaque semaine, dans Faire l'histoire, un intervenant différent présente un objet, raconte l'histoire de sa création ou de sa découverte à aujourd'hui. On y découvre des objets très anciens comme la hache polie, d'autres qui suscitent l'admiration, tels le manteau de Roger II et le buste de Néfertiti, ou encore on redécouvre des objets banals du quotidien comme le miroir, le passeport et le parasol. Pour le premier épisode, la chaîne a d'ailleurs choisi de faire l'histoire à la fois intime, politique et sociale de la libération du corps des femmes et de leur émancipation à partir du stérilet.
 

Certes, il n'y a pas de points communs entre les sujets, mais «la diversité est une valeur, justifie Patrick Boucheron. Tous les objets peuvent faire l'histoire, c'est à la fois sa force et sa faiblesse. On essaye de répartir les objets dans l'espace, dans le temps et de multiplier les approches. C'est une collection hétéroclite.»

Une proposition «anti-télégénique»

L'approche peut paraître audacieuse, mais c'était une évidence pour l'historien, qui estime que «les objets sont les vestiges de l'histoire dans nos vies». C'est également un moyen «d'élargir notre conception de l'histoire» et de la rendre plus accessible. Avec ce nouveau magazine hebdomadaire, Arte installe justement une autre manière de faire l'histoire à la télévision.

Mêlant récits et analyses découpés par chapitre, dates, frises chronologiques, images d'archives et travail graphique, Faire l'histoire se veut très pédagogique, même si Patrick Boucheron n'apprécie pas ce terme.

«On doit rééduquer l'œil du téléspectateur à une forme de complexité, tout en étant distrayant et attractif.»
Patrick Boucheron, historien

«Il ne faut pas prendre les gens pour des enfants», lance le professeur au Collège de France. «Il faut parler à tout le monde, mais on doit surtout éduquer ou plutôt rééduquer l'œil du téléspectateur à une forme de complexité, tout en étant distrayant et attractif.»

Autre originalité du programme: les intervenants. Il n'y a pas de narrateur récurrent. En effet, si le captivant et passionné Patrick Boucheron fait entrer les téléspectateurs dans le sujet, ce sont bien des historiennes et historiens différents qui incarnent et portent chaque épisode. «C'est un parti-pris assez courageux et surtout anti-télégénique, explique le présentateur. Cette proposition est partie du constat qu'il y a une tendance à la monopolisation de la parole à la télévision, alors que c'est encore mieux avec plusieurs personnes.» Et puis ce sont ces spécialistes qui «font l'histoire, dans le sens de la pratique».

Installer une discussion de canapé

On retrouve d'ailleurs cette idée dans la mise en scène, puisque chaque intervenant est installé derrière une table, fouille dans des documents, présente des objets et s'adresse directement aux téléspectateurs face caméra. Par moment, on se croirait presque de retour en classe. «Il y a quelques maladresses, quelques hésitations, mais ça nous plaît. On voulait qu'il y ait une adresse un peu frontale», commente Patrick Boucheron.

Finalement, le fil conducteur du magazine Faire l'histoire repose sur la notion de relais. Le présentateur passe la parole à l'historien ou l'historienne présent, qui la donne ensuite à la chroniqueuse Manon Bril. Entre histoire et culture populaire, l'historienne créatrice d'une chaîne YouTube replace l'objet dans une culture plus numérique et contemporaine. Selfies, défilés de mode, jeux vidéo ou encore stars de la pop, Manon Bril actualise le sujet et conclut l'émission en installant une discussion de canapé.

«C'est de cette façon qu'on rend l'histoire familière, affirme Patrick Boucheron. En fait, saisir l'histoire par les objets, c'est une manière de la rapprocher de nous et d'expliquer que nous aussi, nous faisons l'histoire.»

Faire l'histoire est un magazine d'ARTE proposé et présenté par Patrick Boucheron, en collaboration avec Yann Potin. Slate.fr en est partenaire.

Un épisode est diffusé chaque samedi à 18h15, du 10 avril au 26 juin 2021. Ils sont également disponibles sur arte.tv.

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