Culture

20 églises magnifiques à Paris, dont certaines (trop) peu connues

Au-delà du Paris de Saint-Louis et de Victor Hugo, les églises préférées des visiteurs de la capitale réservent quelques très belles surprises. À l'heure du Covid, c'est le moment ou jamais de partir à leur découverte.

Église Saint-Gervais-Saint-Protais, située dans le IVe arrondissement de Paris. | John Gillespie <a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Facade_of_the_%C3%89glise_Saint-Gervais-Saint-Protais,_Paris_26_September_2016.jpg">via WIkimedia Commons</a>
Église Saint-Gervais-Saint-Protais, située dans le IVe arrondissement de Paris. | John Gillespie via WIkimedia Commons

Temps de lecture: 5 minutes

Que serait Paris sans Notre-Dame? Peut-être la ville de la Sainte-Chapelle, ce reliquaire de pierre et de verre réalisé en seulement sept ans pour accueillir la couronne d'épine acquises par Louis IX. C'est en tout cas l'avis des internautes sur le site Tripadvisor dont la notation permet d'effectuer un classement des meilleures attractions de la capitale.

Tout l'esprit de Paris dans Notre-Dame et le Sacré-Cœur

Si le chef-d'œuvre du gothique rayonnant suscite l'admiration, la cathédrale de Notre-Dame et la basilique du Sacré-Cœur relèvent d'un amour quasi inconditionnel. Prise depuis la rive gauche ou du parvis, la photo du grand vaisseau meurtri par l'incendie continue de susciter des témoignages émus. Depuis l'étranger, des internautes partagent le souvenir de leur dernière visite et leur impatience de voir la reconstruction se terminer.

Autre grande star du Paris des clochers, le Sacré-Cœur suscite un attachement qui mêle en un seul ensemble la vue sur la ville, le quartier et l'église, Montmartre incarnant plus que jamais Paris pour de nombreux touristes. Rien de bien neuf, ni de très étonnant en soi. Servies par les figures conjuguées d'Amélie Poulain et du Bossu, qu'il soit de Hugo ou de Disney, les églises de la ville lumière émerveillent d'autant plus que la réalité est à la hauteur de leur réputation. C'est en fait la suite du classement qui réserve quelques surprises.

Le Sacré-Cœur. | Henrique Ferreira via Unsplash

Saint-Étienne et Saint-Eustache plus appréciées que les Invalides et le Panthéon

D'abord, Saint-Étienne-du-Mont et Saint-Eustache arrivent devant ces anciens lieux de culte que sont le Dôme des Invalides et le Panthéon (ex-église Sainte-Geneviève). L'entrée payante serait-elle dissuasive? Ni la présence du tombeau de Napoléon aux Invalides, ni la sépulture des grands hommes au Panthéon ne semblent en mesure de rivaliser avec l'incroyable jubé de Saint-Étienne et les imposantes dimensions de Saint-Eustache, église située à quelques mètres des Halles dont François 1er voulait faire l'équivalent de Notre-Dame sur la rive droite.

Exemple unique que cet édifice à la forme gothique et aux ornements Renaissance où la plupart des visiteurs passent sans la voir une des plus belles peintures Renaissance qu'il soit donné d'admirer dans une église parisienne –au point qu'elle fut attribuée pendant longtemps à Raphaël (Tobie et l'ange de Santi di Tito).

Saint-Sulpice, star internationale par la grâce de «Da Vinci Code»

Sans surprise, les églises de Saint-Sulpice, de La Madeleine et de Saint-Germain-des-Prés font un carton. La première est devenue une star planétaire depuis Da Vinci Code, la seconde impressionne par ses allures anachroniques de grand temple grec posé en plein Paris haussmannien tandis que la troisième doit autant sa réputation au caractère antédiluvien de sa construction qu'aux fantômes de Jean-Paul (Sartre) et de Simone (de Beauvoir) qui hantent le quartier le plus célèbre de la rive gauche.

Jusqu'à une date récente, il fallait avoir de très bons yeux et une bonne dose d'imagination pour comprendre ce qui valait à Saint-Germain-des-Prés d'avoir été une des abbayes les plus puissantes de France tant l'intérieur de l'église était sombre et paraissait vide. Cette ambiance austère et obscure était en phase avec l'image que l'on se fait d'un Moyen Âge à peine sorti des limbes de la barbarie. Mais c'était oublier que l'histoire des églises procède souvent par couches successives.

Dans le cas de Saint-Germain, la dernière datait du XIXe siècle et, même si elle semble plus proche de nous, elle est de loin la plus étonnante. Dans les années 1850, deux artistes académiques ont réinventé la peinture médiévale en couvrant les murs et les voûtes de scènes bibliques dans un style néogothique. Le temps passant, la crasse avait recouvert les fresques. La restauration qui vient juste de s'achever restitue à cette œuvre unique ses couleurs éclatantes, tapageuses, radicales. Comme quoi une bonne restauration permet de voir ce que l'on ne regardait même plus.

Église de Saint-Germain-des-Prés. | Pierre Poschadel via Wikimedia Commons

L'incroyable forêt de colonnes-palmiers de Saint-Séverin

Il n'y aurait finalement pas grand-chose à dire sur ce peloton de tête s'il ne comprenait également deux églises inattendues. Saint-Séverin est bien moins connue que Saint-Sulpice, La Madeleine ou Saint-Germain. Et pourtant, sa popularité dépasse celle de ces trois églises. Située entre la Seine et le boulevard Saint-Germain, le boulevard Saint-Michel et le boulevard Saint-Jacques, Saint-Séverin est de l'avis de ceux qui l'ont visitée une découverte à ne pas manquer.

Première étape vers Saint-Jacques de Compostelle après Notre-Dame et voisine d'un ancien ossuaire, ce petit chef-d'œuvre du gothique flamboyant offre un contraste saisissant entre l'entrée, relativement modeste, accessible par une petite rue pleine de charme et la forêt de colonnes-palmiers entourant le pilier central torsadé situé juste derrière l'autel.

À quelques centaines de mètres de Saint-Séverin, une petite église également plébiscitée par les visiteurs. Affectée à la communauté libano-syrienne catholique, Saint-Julien-le-Pauvre est aussi réputée pour le voisinage du plus vieil arbre de Paris qu'elle l'était, jusqu'au début de la pandémie, pour la qualité de ses concerts.

Les riches heures de Saint-Germain-l'Auxerrois

Autre pépite distinguée par les visiteurs, Saint-Germain-l'Auxerrois. Face à l'imposante colonnade du Louvre, cette église est située juste à côté de la mairie du Ier arrondissement que son architecte conçut au XIXe siècle comme le pendant républicain de l'édifice religieux. Même style, même rosace, même porche, au point que le visiteur non averti peut facilement confondre la mairie et l'église! C'est là que se déroulent les offices de la cathédrale Notre-Dame depuis l'incendie du 15 avril 2019.

Restée dans l'histoire pour avoir sonné le début du massacre de la Saint-Barthélémy, Saint-Germain-l'Auxerrois séduit par la richesse de ses vitraux, de ses boiseries, de ses ferronneries et de ses œuvres. L'église mérite notamment le détour pour deux retables flamands dont le plus ancien, classé monument historique depuis 1905 (année de la loi de séparation de l'Église et de l'État), relate la vie et la passion du Christ avec une incroyable finesse d'exécution.

Église Saint-Germain-l'Auxerrois. | Mbzt via Wikimedia Commons

Un patrimoine médiéval, mais pas seulement

Dominée par les figures tutélaires de Notre-Dame et de la Sainte-Chapelle, Paris compte également quelques très belles églises baroques que les visiteurs situeraient plutôt en seconde division mais qui sont loin de les laisser indifférents.

Saint-Paul-Saint-Louis se situe dans le Marais, le quartier préféré des touristes (toujours selon le classement Tripadvisor). Elle se distingue par sa façade digne des plus belles églises romaines ornée d'une superbe horloge bleue et dorée. Comme Saint-Sulpice, elle héberge une œuvre de Delacroix. Le thème retenu est peu connu. Il montre un Christ épuisé, rampant sur le sol dans le jardin des Oliviers, juste avant son arrestation.

Autre grande église baroque, Saint-Roch ne ménage aucun effet théâtral: façade inspirée du Gésu à Rome, chapelle en forme d'ellipse, autel dominé par une Gloire divine dont les rayons et nuages, parsemés de têtes d'angelots, descendent sur la Sainte Famille, Assomption triomphale de la coupole, chaire surmontée d'une draperie tournoyante, décors en trompe-l'œil, sculptures mouvementées... Saint-Roch ne fait pas dans la demi-mesure.

Saint-Gervais-Saint-Protais, quant à elle, mérite avant tout le détour pour sa liturgie. Assurés par les Fraternités monastiques de Jérusalem, les offices religieux sont retransmis sur la chaîne YouTube de la communauté suivie par près de 5.000 abonnés.

La réputation béton de Saint-Jean-de-Montmartre

Si le classement des églises les plus appréciées confirme la préférence des visiteurs pour les édifices anciens à défaut de réalisations modernes ou contemporaines de premier ordre, deux églises font exception: Saint-Augustin et Saint-Jean-de-Montmartre. Œuvre de Gustave Baltard, le concepteur des halles, l'église de Saint-Augustin, construite entre 1860 et 1871, est la première à adopter une structure métallique –quelques années avant la construction de la tour Eiffel– quand Saint-Jean-de-Montmartre, édifiée entre 1894 et 1904, innove en recourant massivement au ciment armé.

À Saint-Augustin, le clou du spectacle réside dans l'éclat retrouvé de sa façade monumentale et de sa rosace dorée grâce à une restauration récente tandis qu'il faut entrer dans Saint-Jean-de-Montmartre pour constater à quel point le recours au béton peut révolutionner la conception d'une église en allégeant sa structure générale et en valorisant par contraste l'éclat de ses vitraux. L'intérêt dont ces deux églises sont aujourd'hui l'objet constitue un belle revanche pour des réalisations qui, à l'époque de leur construction, furent l'objet de sarcasmes. Une sortie du purgatoire de l'oubli bien mérité.

cover
-
/
cover

Liste de lecture