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Le niveau de la Premier League va-t-il baisser à cause du Brexit?

La sortie des Britanniques de l'UE continue de cafouiller et pourrait bien avoir des conséquences sur le championnat d'Angleterre. Problème de visas, baisse de la livre sterling, contrats... les enjeux sont considérables.

Un match au Tottenham Hotspur Stadium, à Londres. | Tim Bechervaise via <a href="https://unsplash.com/photos/_hjsopbklZ0">Flickr</a>
Un match au Tottenham Hotspur Stadium, à Londres. | Tim Bechervaise via Flickr

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Le championnat le plus puissant financièrement au monde peut-il perdre de sa majesté? Jusqu'à aujourd'hui, tous les joueurs de l'Union européenne étaient libres d'entrer et de sortir du territoire anglais, mais à partir du moment où le Royaume-Uni sortira définitivement de l'UE, les règles seront bien différentes.

Comment les clubs de foot anglais acheteurs feront-ils? Il leur faudra obtenir systématiquement des visas. C'est déjà le cas pour les joueurs venant de certains pays africains et sud-américains, et cela complique énormément le process de vente, voire le fait parfois capoter. Désormais, les Européens seront en plus considérés comme des joueurs extra-communautaires. Or, une équipe n'a le droit d'aligner que cinq extra-communautaires par match, de quoi affaiblir le niveau de la Premier League.

Déplacements, rémunérations, fiscalité... Les sujets sont nombreux, mais les Anglais pourraient contourner les problèmes. «Pour la Premier League, le Brexit ne devrait pas changer grand-chose... L'intérêt de l'Angleterre n'est pas de détruire son championnat, qui est un peu la NBA du foot, “The place to be” pour les joueurs, quel que soit leur nationalité, estime Vincent Chaudel, fondateur de l'Observatoire du sport business. L'Angleterre aurait tort de mettre des contraintes à ce niveau-là, et comme les Anglais sont de bons businessmen, je ne pense pas que la sortie de l'Union aura un impact majeur sur la 1ère division, peut-être plus sur les divisions en-dessous.»

Il est quand même difficile d'imaginer une réglementation à double-sens: une libre circulation des footballeurs et des contraintes plus importantes pour Monsieur et Madame tout le monde.

Quelles conséquences pour le football français?

Comment les clubs français vont-ils donc faire pour vendre leurs pépites? Les clubs de l'Hexagone sont connus pour être de très bons formateurs, et les clubs anglais, leurs meilleurs clients –même si l'Allemagne fait de plus en plus son marché en France, notamment concernant les plus jeunes espoirs de Ligue 1. Or, le mercato est l'un des piliers du foot tricolore, nous le constatons encore plus en cette période de crise sanitaire, lourde de conséquences pour les finances des clubs de Ligue 1.

Dans L'Équipe du 11 septembre 2020, Wesley Fofana, jeune joueur de Saint-Étienne, explique vouloir signer à Leicester et partir en Premier League sans attendre: «Dans un an, ce sera quasiment impossible pour un joueur comme moi d'aller en Angleterre à cause du Brexit.» En cause, les nombreuses contraintes administratives et salariales, selon le défenseur stéphanois.

Mais pour les top joueurs, la question d'une baisse de salaire ne se posera certainement pas. Petit exemple avec le «Messigate» et la volonté de l'Argentin de quitter le FC Barcelone (après la défaite et l'humiliation catalane en quart de finale de Ligue des Champions contre le Bayern Munich 8-2); avant qu'il ne décide finalement de rester au Barça, l'attaquant était notamment annoncé à Manchester City, et son salaire ne semblait pas poser de problèmes aux richissimes investisseurs émiratis de la City.

La fin de la toute-puissance anglaise?

L'Angleterre a régné sans partage sur le foot business ces dernières années. Premier marqueur et financeur à tout-va des vingt clubs de l'élite, les droits TV: 1,9 milliard d'euros par saison jusqu'en 2022.

La puissance du foot anglais, en termes de droits TV domestiques et internationaux (3,4 milliards d'euros), dépasse tous les autres championnats: 2,9 en Espagne, l'Allemagne à 1,7, l'Italie 1,6, et notre Ligue 1 à 1,3 milliard d'euros... Mais à la différence de l'Espagne où les droits vont en grande partie aux deux mastodontes Real et Barça, l'argent est réparti de manière plus égalitaire outre-Manche, et permet donc aux petits de créer parfois l'exploit face aux équipes du BIG 6 (Manchester City, Liverpool, Chelsea, Manchester United, Arsenal et Tottenham), et offrir toujours plus de suspense et d'attractivité à chaque week-end de matchs.

Mettre fin à la domination de la Premier League sur le foot business et voir d'autres championnats en profiter à cause du Brexit? Peut-être, mais certainement pas la France et sa fiscalité destructrice. L'Espagne ou l'Italie? Oui assurément. En 2019, la finale de Ligue des Champions avait opposé deux clubs anglais, Tottenham et Liverpool.

Avec la sortie de l'UE et ses conséquences, les équipes de Premier League seront-elles à moyen terme moins compétitives en Coupe d'Europe? «Le Brexit fait partie de l'équation, le Covid aussi, mais il y également le problème avec la Chine [le gros contrat de droits TV avec Pékin a été cassé à cause des relations diplomatiques exécrables entre les deux pays, ndlr]. Ce sera cet ensemble qui poussera les clubs anglais à plus de prudence... Et puis la crise sanitaire les prive de leurs recettes billetterie, un élément majeur de leur écosystème», répond Vincent Chaudel.

Autant de questions et d'incertitudes sur lesquelles il sera possible d'y voir plus clair dans quelques semaines, au moment de la sortie administrative du Royaume-Uni et des mesures annoncées par Londres secteur par secteur.

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