Société / Sports

Le vélo électrique à la conquête du grand public

Attrayant mais plus cher, le grand frère de la bicyclette traditionnelle cherche à s'imposer.

Il faut dépenser entre 1.500, 2.000 et 2.500 euros pour en posséder un. | Lionel Bonaventure / AFP
Il faut dépenser entre 1.500, 2.000 et 2.500 euros pour en posséder un. | Lionel Bonaventure / AFP

Temps de lecture: 4 minutes

Objet tendance du déconfinement, le vélo a le vent en poupe, et l'électrique en a pleinement profité. Symbole de son temps, de la culture des années 2020 et des enjeux environnementaux et de mobilités présents en cette période de Covid-19, le deux-roues électrique bénéficie du soutien de nouveaux maires PS-EELV des grandes villes, axés sur le combat contre la pollution et la pratique cycliste.

«L'électrique s'adresse à des publics très divers, entre ceux qui ont déjà fait du vélo, ceux qui veulent l'utiliser en “vélotafeurs” (pour aller au travail), ou encore à des ados pour les éloigner de leurs écrans», estime Claude Droussent, journaliste sportif et auteur du Guide du vélo électrique . «Tout naturellement, il va conquérir davantage de personnes. C'est un objet tellement séduisant qui présente également des avantages pratiques et environnementaux. Mais son inconvénient est budgétaire: il faut dépenser entre 1.500, 2.000 et 2.500 euros pour en posséder un. Les gens se posent alors la question quant à son achat.»

Il y aurait toutefois un moyen d'intégrer l'objet dans la vie d'un foyer sans en impacter le budget: la baisse des prix actuels élevés grâce à l'essor d'un marché de masse. À l'image de Décathlon qui, pour le rendre encore plus attractif, a lancé un abonnement mensuel entre cinquante-cint et soixante-quinze euros. Le but est de conquérir un plus large public en s'adressant à de nouvelles catégories socio-professionnelles.

Merci qui? Merci le Covid-19

Le vélo introduit naturellement de la distance physique, ce qui aide à réduire les risques de contamination. Après le confinement, le véhicule à pédales a pu profiter d'un coup de pouce de l'État: cinquante euros offerts pour réparer et reprendre en main un vieux vélo.

C'est indéniable, qu'il soit traditionnel ou électrique, il est dans l'air du temps et en phase totale avec les nouveaux modes de vie à venir. Surtout pour ces Français·es qui réfléchissent de plus en plus à l'opportunité que le télétravail peut leur offrir: partir vivre en dehors des grandes métropoles. Et sans doute aussi pour celles et ceux qui ont épargné pendant le confinement, et qui peuvent désormais se permettre d'acheter un cycle nouvelle génération.

«La rentrée va être un grand moment pour l'électrique. Niveau marketing, ça bouge beaucoup. En ce moment, les médias ne parlent que de vacances franco-françaises, et les budgets familiaux peuvent y être consacrés, en rando avec ses enfants», appuie Claude Droussent. Lors de son dernier passage à Paris, en juillet, il raconte avoir vu dans le métro «trois affiches sur quatre montrant des territoires, régions et départements français; toutes communiquaient sur le vélo». Et d'ajouter que les acteurs du tourisme «ont inclus dans leurs offres le vélo électrique».

Vers la verdure des campagnes

Ce moyen de déplacement séduit. Mais le vélo électrique est-il à 100% vert? Des réserves ont été émises à ce sujet, notamment en ce qui concerne la production des batteries (au lithium) qui, tout comme pour les voitures de ce genre, serait polluante. Mais dans la logique de certain·es maires PS-EELV souhaitant introduire des péages à l'entrée de leurs villes ou à l'image d'Anne Hidalgo qui veut interdire les véhicules diesel en 2024 dans Paris, la pollution liée au vélo à assistance électrique est incomparable à celle engendrée par les véhicules motorisés. On ne peut le nier: les inconvénients sont bien moindres, et toutefois ils existent, ils peinent à entacher son image écolo.

Il est facile de comprendre l'intérêt que les citadin·es et les personnes vivant en banlieue lui porte. Il en est autrement pour celles et ceux vivant dans la campagne. La crise des «gilets jaunes» a démontré à quel point la voiture était indispensable au sein de ces territoires mis à l'écart. Le remplacement du véhicule par le vélo électrique ne se fera pas du jour au lendemain. Les réflexes semblent bien ancrés et les habitudes dures à déloger.

Les familles de trois enfants avec plusieurs voitures à la maison peuvent-elles réussir à changer de mode de fonctionnement? L'actuelle mouvance verte chamboulera-t-elle les esprits? Dans ces zones éloignées, il paraît, pour le moment, difficile d'envisager l'utilisation de l'engin pour aller faire du sport ou faire des courses au supermarché. À moins de dépenser 3.000 euros pour l'achat d'un vélo cargo qui dispose d'une grande plateforme à l'avant permettant d'y mettre de lourds objets. On le comprend, le prix reste encore un brin rédhibitoire.

Encore de la route...

Pour agrandir le marché, des fabricants ont pris de l'avance. Comme la marque vosgienne Moustache. L'entreprise a été créée par deux Français en 2012, une centaine d'employé·es y travaillent aujourd'hui. Une réussite qui a donné des idées à d'autres: de jeunes entrepreneurs se lancent dans la création de start-ups innovantes, qui proposent des vélos équipés de GPS, de système de traçage et d'antivol, comme les Hollandais de Van Moof ou les Belges de Cowboy.

L'engouement porté à l'électrique a donc propulsé des acteurs plus imaginatifs, plus créatifs dans l'industrie du cycle, pariant sur la tech ou, au contraire, faisant le choix assumé de l'efficacité low-tech, comme les Français de Cycles Cavale, qui ont créé un vélo électrique qui ne ressemble pas à un vélo électrique, en partenariat avec le fabricant haut de gamme Alex Singer. Les marques traditionnelles, elles, s'y sont mises un peu tard. Le Taïwanais Giant a anticipé, mais les autres, moins performantes, courent après le retard pris.

La pandémie de coronavirus a accéléré la transition vers des mobilités plus douces, comme le tramway, le vélo ou la trottinette électrique. Certes, tout le monde ne roulera pas à vélo électrique dans dix ans, mais l'investissement des mairies PS-EELV peut certainement participer à l'évolution de son succès.

Avec des pistes cyclables qui poussent partout en France, l'heure du vélo et de l'assistance électrique est venue. Reste au secteur de trouver des moyens pour produire plus de batteries en France, de se transformer économiquement et de baisser les coûts de production, afin de ne plus laisser une partie de la population sur le bord de la route.

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