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Black Lives Matter pourrait bien être le plus grand mouvement de l'histoire des États-Unis

On estime entre 15 à 26 millions le nombre d'Américain·es ayant participé à des manifestations contre les violences policières et le racisme systémique à travers tout le pays.

Des manifestants avec des pancartes «Black Lives Matter», sur le pont de Brooklyn, à New York, le 19 juin 2020. | Angela Weiss / AFP
Des manifestants avec des pancartes «Black Lives Matter», sur le pont de Brooklyn, à New York, le 19 juin 2020. | Angela Weiss / AFP

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur New York Times

Depuis le meurtre de George Floyd par un policier, les États-Unis ont connu un vaste mouvement de protestations contre les violences policières et le profilage racial. Au cours des dernières semaines, on estime que 15 à 26 millions d'Américain·es auraient participé à des manifestations à travers tout le pays.

Le 6 juin dernier, c'est un demi-million de personnes qui descendaient dans la rue en un seul jour, à 550 endroits différents du territoire, pour réclamer la justice pour George Floyd, et toutes les victimes des violences policières.

Cette mobilisation colossale fait de Black Lives Matter («les vies noires comptent») le mouvement le plus important de l'histoire des États-Unis.

Des rassemblements inédits contre le racisme systémique

Même le mouvement afro-américain des droits civiques, qui devait mener à l'abolition de la ségrégation raciale à la fin des années 1960, ne trouva pas un si large écho dans la population américaine. «Si l'on additionne toutes les manifestations qui ont eu lieu pendant cette période, on parle de centaines de milliers de personnes, mais pas de millions», rappelle Deva Woodly, professeure associée de politique à la New School.

Avec une population totale de 328 millions à ce jour, les rassemblements concerneraient entre 4,5% et 8% des habitant·es des États-Unis. Selon une étude d'Erica Chenoweth portant sur les mouvements de contestations à travers le monde, les protestations visant à renverser le gouvernement ou à obtenir l'indépendance sont généralement couronnées de succès dès lors qu'elles impliquent 3,5% de la population totale d'un pays.

Bien que toutes les manifestations qui ont essaimé au cours des derniers mois pour protester contre le racisme institutionnel aux États-Unis n'aient pas nécessairement été organisées par Black Lives Matter, le mouvement a fourni un cadre, du matériel et des conseils pour les nouveaux et les nouvelles militantes, notamment par le biais des réseaux sociaux, ce qui a permis d'atteindre plus vite et plus efficacement un large public.

«L'étendue géographique de la protestation est une caractéristique vraiment importante, et contribue à signaler la profondeur et l'étendue du soutien d'un mouvement», affirme Kenneth Andrews, professeur de sociologie à l'université de Caroline du Nord, à Chapel Hill.

Depuis le 26 mai, date des premières manifestations à Minneapolis, le Times a recensé plus de 4.700 manifestations, dans 2.500 villes différentes. Le 6 juin, on comptait au moins 50.000 personnes à Philadelphie, 20.000 dans le Union Park de Chicago, et 10.000 sur le pont du Golden Gate, à San Francisco.

Un mouvement fédérateur

Contrairement aux précédentes manifestations impulsées par le mouvement Black Lives Matter, près de 95% des comtés où ont eu lieu les récents rassemblements étaient majoritairement blancs, et près des trois quarts de ces comtés étaient blancs à plus de 75%. Cela montre que l'opinion publique a considérablement changé à l'égard du mouvement, fondé en 2013 pour défendre la communauté noire contre le racisme systémique, et qui fut longtemps controversé.

La moitié des personnes mobilisées a déclaré que c'était la première fois qu'elle s'engageait dans une forme d'activisme ou participait à une manifestation, et la tranche d'âge la plus représentée est celle des moins de 35 ans.

D'après le New York Times, la présidence Trump a suscité plus de protestations que toute autre depuis la guerre froide. Entre la gestion désastreuse du Covid-19 et les controverses successives sur les discriminations raciales, l'immigration, le dérèglement climatique et les armes à feu, le contexte actuel est propice à la manifestation.

Ces dernières semaines ont d'ailleurs amené une réflexion poussée sur la nature des institutions policières, et les modèles alternatifs que l'on pourrait imaginer. À Minneapolis, le conseil municipal s'est engagé à démanteler son service de police, quand à New York, une loi qui maintenait secrets les dossiers disciplinaires de la police a été abrogée. Plusieurs villes ont interdit aux forces de police la technique d'étranglement dans le cadre d'une interpellation –sans nécessairement la remplacer, comme en France, par le pistolet à impulsion électrique.

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