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Les règles tuent-elles la planète?

Petite étude de l'impact environnemental des protections périodiques.

Temps de lecture: 3 minutes

Chaque mois, j'ai l'impression d'utiliser un nombre infini de serviettes et de tampons. Quel est l'impact de mes cycles menstruels sur la planète?

Selon le nouveau livre Flow: The Cultural History of Menstruation, (Flux: l'histoire culturelle de la menstruation), une femme jette en moyenne à la poubelle, et dans sa vie, entre 100 et 150kg de «serviettes, tampons et applicateurs». Ça semble énorme. Mais qu'est-ce que 150kg par rapport au reste?  Si l'Américaine moyenne se voit réglée pendant 38 ans, les calculs disent qu'elle produirait pendant cette période une quantité globale de 28.370kg de déchets (PDF). Ainsi, pendant vos années fertiles, les détritus liés aux règles représentent environ 0,5% du poids de votre décharge personnelle.

Cela mérite-t-il de se mettre la rate au court-bouillon? Difficile à dire. Les assiettes et les verres en plastiques représentent de même 0,5% de nos déchets annuels (PDF), et ces produits sont eux aussi responsables de beaucoup de remue-ménage environnemental. De plus, on n'arrête pas de dire aux femmes américaines que leurs règles sont un peu honteuses - a-t-on vraiment besoin de leur faire sentir qu'elles tuent aussi la planète?

Voici mon avis sur la question. Si vous êtes vraiment soucieuse de votre production de déchets, canalisez-vous sur les changements les plus simples à faire - comme acheter plus de choses en vrac, ou planifier vos courses à l'épicerie afin de réduire vos déchets alimentaires. (En 2008, les contenants et les emballages représentaient près de 26% des déchets que les Américains envoyaient à la benne; les restes de table, environ 19%.) En ce qui concerne l'hygiène féminine, vous pouvez choisir des versions plus écologiques des produits que vous utilisez déjà - comme des serviettes qui ne sont pas emballées individuellement. (Les produits d'hygiène féminine ne sont pas stériles, et n'ont donc pas besoin de pochettes supplémentaires.) Ou essayez les tampons sans applicateur: le leader sur le marché, o.b., estime que ses tampons créent 58% de déchets en moins.

De l'importance de la matière

Vous pouvez aussi trouver des produits jetables qui prétendent être meilleurs pour l'environnement et pour votre santé. Les serviettes et les tampons conventionnels sont en général fabriqués à partir de rayonne (un dérivé de pulpe de bois) ou de mélanges rayonne et coton, mais quelques entreprises utilisent du coton bio. Selon Huantian Cao, spécialiste en textiles durables à l'Université du Delaware, le coton biologique est plus écologique que la rayonne conventionnelle, vu que des substances chimiques agressives sont utilisées dans la fabrication de la seconde. (Je vous promets de faire une comparaison détaillée entre le coton biologique et le conventionnel dans une prochaine chronique). Il y a peut-être des bénéfices pour votre santé à passer au coton, aussi, mais c'est plus difficile à dire. Un des principaux spécialistes en syndrome du choc toxique déclare qu'il est moins risqué d'utiliser des tampons 100% coton. Mais l'Administration Fédérale de contrôle des Médicaments (FDA) et Santé Canada ne sont pas du même avis.

Les produits d'hygiène féminine «green» fanfaronnent aussi sur le fait qu'ils sont «sans chlore», ce qui n'est peut-être pas une si bonne désignation que cela. Par le passé, les serviettes et les tampons étaient généralement blanchis avec du chlore élémentaire gazeux, un processus qui pouvait générer des dioxines - une classe de substances toxiques, des composés chlorés polluants pour l'environnement. Cette méthode a été abandonnée voici environ 10 ans : aujourd'hui, les fabricants de tampons - qu'ils soient «green» ou autre - utilisent des moyens de blanchissement plus bénins, soit sans chlore gazeux élémentaire, soit sans chlore tout court. Le premier peut «théoriquement produire des taux extrêmement bas de dioxines», comme le fait remarquer la FDA, alors que le second n'en produit absolument pas. Personne ne régule le terme de «sans chlore», cette formule générique peut donc correspondre aux deux procédés. (Certaines femmes s'inquiètent de leur exposition aux toxines, à travers leurs tampons. Mais cela vaut la peine de préciser que les tampons conventionnels ne contribuent qu'à une infime fraction de votre exposition globale. La FDA comme Santé Canada déclarent que ces taux, en l'état de traces, ne représentent qu'un risque négligeable pour la santé).

Si vous désirez faire un changement radical, il existe de nombreuses options réutilisables, internes comme externes. Il y a des serviettes hygiéniques en tissu, lavables en machine, par exemple, vendues sous les marques Lunapads et GladRags. Le lavage d'un serviette réutilisable demande certes de l'énergie, mais je pense que cela en économise sur le long terme, à condition que vous vous engagiez à un régime de lavage efficient. (Même chose pour les couches lavables.) Si le choix est à faire entre une Lunapad et un tampon sans applicateur, avec peu d'emballage, la différence pourrait néanmoins être mince.

La coupe menstruelle, championne écologique des protections

Le véritable vainqueur écologique s'avère être la coupe menstruelle, que vous insérez comme un tampon, retirez quand vous en avez besoin, rincez avec de l'eau savonneuse, et réutilisez pendant des années. Elles existent depuis les années 1930, même si elles n'ont jamais été très populaires. Aux États-Unis, vous pouvez en acheter en caoutchouc naturel (la Keeper), ou en silicone (la Diva Cup, ou la Moon Cup).

J'ai rencontré suffisamment de femmes qui ne jurent que par ces produits alternatifs pour savoir qu'ils ne sont pas seulement faits pour des hippies illuminés. Mais il est certain qu'ils ne s'adapteront pas à tous les modes de vie. Ce que je n'ai jamais vraiment apprécié, c'est la façon dont les modes de vie d'autrui ont une grande influence sur le nôtre. Par exemple, que faire si votre petit copain ne saute pas de joie à l'idée de vous voir essorer votre serviette hygiénique en tissu - comme il est en général recommandé de le faire - dans un récipient de la salle de bains commune? Au final, vous devrez simplement faire un choix personnel pour savoir ce qui compte le plus pour vous: l'écologie ou les normes sociales.

Nina Shen Rastogi

Traduit par Peggy Sastre

Photo: REUTERS/Chris Helgren

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