Économie / Culture

Les produits dérivés de «Star Wars», vers l'infini et au-delà

À l'occasion de la sortie du film «Star Wars: L'Ascension de Skywalker», décryptage du succès de la saga la plus iconique et la plus rentable de tous les temps.

Conférence de presse avec l'équipe de l'épisode IX, le 4 décembre 2019 à Pasadena (Californie). | Alberto E. Rodriguez / Getty Images North America / AFP
Conférence de presse avec l'équipe de l'épisode IX, le 4 décembre 2019 à Pasadena (Californie). | Alberto E. Rodriguez / Getty Images North America / AFP

Temps de lecture: 7 minutes

Star Wars, dont l'épisode IX, L'Ascension de Skywalker, sort dans les salles ce mercredi 18 décembre, est la saga cinématographique la plus iconique et la plus rentable de tous les temps avec un cumul de plus de 9 milliards de dollars (8 milliards d'euros) de revenus, devant Harry Potter et James Bond. Seul le MCU (Marvel Cinematic Universe), dont on peut considérer qu'il regroupe plusieurs sagas, dépasse Star Wars avec ses vingt-trois films qui ont rapporté près de 23 milliards de dollars (plus de 20 milliards d'euros) de recettes.

Au-delà de l'aspect commercial et de la rentabilité des productions cinématographiques, la dimension mythologique de Star Wars avait déjà été démontrée dès le premier film. Quarante ans plus tard, Star Wars est devenue la saga la plus culte et la plus fascinante, faisant de Disney la marque la plus puissante du monde à la suite du rachat de Lucasfilm pour 4 milliards de dollars (environ 3,5 milliards d'euros) en 2012.

Rien qu'avec les quatre films sortis entre 2015 et 2018, Disney a déjà largement rentabilisé son investissement. La nouvelle série Star Wars, The Mandalorian, lancée le 12 novembre en même temps que Disney+, est devenue la plus regardée de tous les temps lors de sa semaine de lancement et contribue au succès de la plateforme de streaming. Celle-ci devrait atteindre 20 millions d'abonné·es avant la fin de l'année.

Alors que l'épisode IX de Star Wars a déjà battu tous les records de préventes, de nouveaux projets seront probablement annoncés dès janvier 2020.

Bande-annonce du film Star Wars: L'Ascension de Skywalker (The Rise of Skywalker).

La transmission d'un patrimoine sacré

Si Star Wars est avant tout un spectacle, son succès vient entre autres de ses multiples références à des classiques de la littérature et du cinéma, de sa dimension politique et sociale et de son scénario qui évoque les récits de textes sacrés comme la Bible. En effet, il s'agit de l'affrontement entre le bien (l'utilisation bienveillante de la Force) et le mal (le Côté obscur de la Force), sur fond de menace apocalyptique (l'Étoile de la Mort, puis la base Starkiller), avec une figure messianique (Luke Skywalker souvent comparé au Christ, puis Rey) qui se bat pour faire triompher la justice.

Les fans de Star Wars sont particulièrement actifs, loyales et attaché·es à la saga –ce qui les rend susceptibles et critiques– et sont organisé·es en communautés qui participent à de multiples événements à travers le monde comme des concerts symphoniques, des spectacles son et lumière, des expositions et des conventions.

Le «jediisme» est la religion la plus populaire en ligne avec plusieurs mouvements dont l'«Église du Jediisme» et le «Temple de l'Ordre Jedi». Au-delà des fans, le langage courant a largement intégré le vocabulaire de Star Wars avec des termes comme «jedi», «sabre laser», «droïde» et «wookie», ainsi que des expressions comme «que la force soit avec toi».

Quand Disney rachète Lucasfilm et prend le contrôle d'une saga idolâtrée, la réaction des fans est très mitigée, certain·es allant même jusqu'à parler de désastre. Très vite, la saga Star Wars s'avère être un héritage lourd à porter pour Disney. Kathleen Kennedy, présidente de Lucasfilm désignée par George Lucas lui-même, rencontre des difficultés à assurer la continuité de Star Wars.

Comme productrice des films, des séries et des dessins animés, elle est la gardienne du temple. George Lucas reste consultant créatif de l'entreprise qui porte d'ailleurs toujours son nom, et bien qu'il affirme avoir tourné la page, les réalisateurs et scénaristes lui demandent systématiquement son avis, comme si obtenir les conseils ou la caution artistique du maître était indispensable avant de pouvoir étendre son univers.

George Lucas et Kathleen Kennedy discutent de l'avenir de Star Wars après l'achat de Lucasfilm par Disney.

Plusieurs réalisateurs ont fait les frais des contraintes imposées par Disney et n'ont pas pu aller jusqu'au bout de leur projet en raison de désaccords avec la firme aux grandes oreilles. Josh Trank devait réaliser un spin-off sur Boba Fett qui deviendra quatre ans plus tard la série The Mandalorian de Jon Favreau.

Phil Lord et Chris Miller ont été écartés du film Solo finalement réalisé par Ron Howard. Colin Trevorrow a été remplacé au dernier moment par J.J. Abrams pour écrire et réaliser L'Ascension de Skywalker. David Benioff et D.B. Weiss ne seront pas les artisans de la future trilogie prévue entre 2022 et 2026.

Si certain·es fans inconditionnel·les ont été très critiques des nouveaux films, en particulier de l'épisode VIII, Le Dernier Jedi, Disney a globalement réussi son pari. L'épisode VII, L'Éveil de la Force, a rapporté à lui seul plus de 2 milliards de dollars (1,8 milliard d'euros). Les fans de la trilogie originelle sont allé·es voir les aventures de l'héroïne Rey avec leurs enfants ou leurs petits-enfants, ce qui a permis un rajeunissement, une féminisation et une diversification du public de Star Wars.

Une marque extraordinairement rentable

Star Wars est une franchise transmédia qui a conquis le monde dès sa création à la fin des années 1970. Elle a rapporté 30 milliards de dollars (27 milliards d'euros) en produits dérivés, soit trois fois plus que les films. Beaucoup de gens qui n'ont jamais vu Star Wars en connaissent certains personnages et dialogues. Impossible d'y échapper car ils apparaissent sur pléthore de t-shirts, mugs ou coques de smartphones.

Le business Star Wars est unique en son genre, basé sur des centaines de licences par an. D'innombrables produits envahissent les supermarchés, les boutiques spécialisées et les sites d'e-commerce, pour être collectionnés par les fans ou offerts en cadeaux aux enfants comme aux adultes.

Des marques ou chaînes de magasins comme Adidas, Zara, H&M, Uniqlo, C&A, Gap, Primark, Celio, Columbia ou Levi's ont toutes eu des collections Star Wars. Celles-ci sont limitées en quantité et dans le temps, avec des prix souvent très élevés. Depuis le 21 novembre, les chaussures de cross-training AlphaEdge 4D Star Wars d'Adidas sont vendues 300 euros.

La nouvelle collection Uniqlo Star Wars sortie en novembre 2019.

D'autres marques ont également souhaité bénéficier de la popularité de Star Wars pour améliorer leur image. Ainsi la fameuse publicité de Volkswagen prévue en 2011 pour le Superbowl, la finale du championnat de football américain, est la première à être partagée sur YouTube avant l'événement, les marques ayant pour habitude de garder ces publicités secrètes jusqu'au jour J.

Le spot intitulé «The Force» a été vu plus de 17 millions de fois avant même le début du match. Cette publicité du Superbowl est encore aujourd'hui la plus vue (plus de 60 millions de fois) et la plus partagée (plus de 5 millions de fois). Cette démarche audacieuse pour l'époque a révolutionné ce type de campagnes publicitaires.

Publicité pour la Volkswagen Passat diffusée lors du Superbowl de 2011, avant le rachat par Disney.

Depuis quelques semaines, Samsung a aussi réussi à rendre virale sa nouvelle campagne de communication inspirée de Star Wars, très partagée et commentée sur les réseaux sociaux. Samsung joue avec le terme Galaxy qui évoque à la fois sa gamme de smartphones, tablettes et montres connectées, et Star Wars qui se déroule dans «une galaxie lointaine, très lointaine».

À l'occasion de la sortie du dernier film, la firme coréenne lance une édition spéciale du Samsung Galaxy Note 10+ aux couleurs du côté obscur de la force. Le communiqué de presse indique que ce n'est que le début d'une collaboration durable entre les deux marques et que d'autres événements sont à venir.

Publicité Samsung Galaxy inspirée de l'univers Star Wars.

Les sites d'Amazon et de Barnes & Noble référencent plusieurs milliers d'ouvrages consacrés à Star Wars: romans, bandes dessinées, guides, encyclopédies et livres d'activités. Depuis les années 1980, près de 200 jeux vidéo Star Wars sont sortis sur ordinateur, console, smartphone et arcade. Le 15 novembre 2019, Electronic Arts a lancé Star Wars Jedi: Fallen Order, un jeu acclamé pour ses qualités qui bat des records de vente.

J.J. Abrams avait annoncé lui-même lors des Game Awards 2019 (cérémonie de récompense de jeux vidéo) qu'une scène du film L'Ascension de Skywalker serait diffusée en exclusivité le samedi 14 décembre dans Fortnite, le jeu vidéo le plus populaire et le plus rentable de tous les temps. Le partenariat de cross-marketing avec Epic Games implique également des tenues, armes et accessoires issus de Star Wars, comme les skins de Rey, Finn et d'un Stormtrooper impérial.

J.J. Abrams annonce un événement Star Wars exclusif dans Fortnite.

En plus des jeux vidéo et des salles de réalité virtuelle comme The Void, il est maintenant possible de s'immerger réellement dans l'univers de la saga. En effet, deux villages Star Wars Galaxy Edge de 60.000 mètres carrés ont ouvert en mai à Disneyland en Californie et en août à Disney World en Floride, en attendant un troisième à Walt Disney Studios au plus tard en 2025 en France.

Ces nouvelles zones des parcs d'attractions dédiées à Star Wars sont tellement populaires qu'il est nécessaire de réserver en ligne pour avoir une chance de boire un verre de lait bleu à 8 dollars (7 euros) dans le restaurant Oga's Cantina, de créer son sabre laser personnalisé à 200 dollars (180 euros) dans l'atelier Savi's Workshop, ou son droïde à 100 dollars (90 euros) au Mubo's Droid Depot. Le clou du spectacle est la visite du vaisseau Millenium Falcon grandeur nature que les visiteurs et visiteuses peuvent même piloter.

Visite du nouveau parc d'attractions Star Wars Galaxy's Edge.

Un univers toujours en expansion

L'attente est grande en ce qui concerne l'épisode IX, J.J. Abrams avouant lui-même qu'il n'est pas doué pour terminer les histoires. Cependant, les fans sont déjà préoccupé·es par la direction que Disney va prendre avec Star Wars dans les prochaines années. Après avoir rendu hommage aux anciens personnages de la saga centrée sur la dynastie Skywalker, Lucasfilm va pouvoir s'en libérer et en exploiter de nouveaux. Un meilleur planning, une production moins précipitée et une direction créative mieux maîtrisée pourraient permettre d'intensifier le rythme des sorties sur le modèle des films Marvel.

Si une pause est prévue, on sait qu'un prochain film sortira dans les salles en décembre 2022. Celui-ci aurait déjà un réalisateur potentiel et pourrait être le premier volet d'une nouvelle trilogie qui se poursuivrait en 2024 et 2026. Bien que des rumeurs aient annoncé son départ, Rian Johnson a confirmé qu'il travaille toujours sur une autre trilogie Star Wars. Un film Stand Alone piloté par Kevin Feige, le directeur créatif de Marvel et grand artisan du MCU, serait également en développement.

Du côté des séries, la saison 2 de The Mandalorian était signée et en écriture avant le lancement de la première. Une autre série prévue sur Disney+ sera le préquel du film Rogue One et racontera les aventures de l'espion Cassian Andor. L'annonce faite par Ewan McGregor lui-même de son retour dans le rôle du personnage d'Obi-Wan Kenobi a enthousiasmé les fans, bien qu'aucune date ne soit encore confirmée pour le début du tournage des huit épisodes de cet autre show prévu pour Disney+.

Le dessin animé The Clone Wars, dont les six saisons ont été diffusées entre 2008 et 2014, en aura bientôt une septième. D'autres surprises sont possibles: une rumeur persistante évoque une série top secrète consacrée au personnage de comic Doctor Alpha qui serait déjà en tournage. Disney n'est donc encore qu'au début de son aventure avec Star Wars.

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l'article original.

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