Sciences / Culture

Que nous racontent les plantes quand on les écoute parler?

L'expression «faire la plante verte» n'a jamais été aussi peu appropriée.

<em>«Être vivant parmi les vivants.»</em> | Tim Mossholder via <a href="https://unsplash.com/photos/78CGaGIFkzE">Unsplash</a>
«Être vivant parmi les vivants.» | Tim Mossholder via Unsplash

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur New York Times

Notre oreille est l'organe de la peur, raconte Rodolphe Alexis, artiste sonore dans son podcast Écouter le monde sur Arte Radio. L'oreille nous avertit du danger qu'on ne peut pas voir, qui n'est pas face à nous, insaisissable. Parce qu'il est à la fois vivant mais invisible, le son acquiert par là une dimension mystérieuse, sensible, «dyonisiaque». C'est dans cette perspective qu'Adrienne Adar nous fait écouter les plantes dans une exposition au jardin botanique de Brooklyn. Mais qu'ont-elles à nous dire?

Les plantes se parlent

 

Tous les êtres vivants communiquent. Dans le cas d'un être vivant qui ne peut pas se mouvoir, le son est un des principaux vecteurs de communication. C'est ce dialogue que l'artiste californienne Adrienne Adar nous fait entendre, en plaçant des haut-parleurs et des casques reliés à des capteurs posés sur les plantes. Nous pouvons dès lors écouter du blé pousser ou les vibrations que font les épines d'un cactus.

La science a déjà montré que le son était partie intégrante de la vie des plantes. Certaines ondes permettent à des plantes de mieux supporter la sécheresse, quand d'autres retardent leur maturation ou encore guident leurs racines vers l'eau. Elles écoutent aussi: seule une certaine tonalité de bourdonnement d'abeille libère leur pollen.

Une découverte sensible

Mais plutôt que de nous faire comprendre leur langage par d'abscons dessins d'onde, l'artiste nous le fait écouter. Nous rentrons alors dans un rapport intime avec la plante. C'est une expérience sensible, qui appelle à ressentir et à se questionner. «Comment [cette expérience] nous fait-elle envisager les plantes autrement? Comment cela change-t-il notre relation à elles? Parce qu'elles mènent une vraie vie à elles, comment nous sentirions-nous si elles n'étaient plus là?» C'est en écoutant les plantes qu'on prend conscience qu'elles ne sont pas des objets à notre disposition, mais des êtres vivants qui coexistent dans le même monde que nous. Dans l'étymologie de co-, on trouve d'ailleurs l'identité et l'altérité: et ce sont bien cette identité et cette altérité entre les espèces du monde que nous fait sentir Adrienne Adar.

Dans son podcast, Rodolphe Alexis explique qu'écouter la forêt, c'est se sentir «vivant parmi les vivants». Dans ce «paysage sonore» qu'il explore, il fait état d'un rapport entre son corps et le monde quasiment «sensuel». En écoutant les plantes, mais aussi les oiseaux, les insectes, le vent, on s'engage pleinement dans l'environnement et on s'y sent prendre part, et presque comme dans la volupté, on s'y abandonne.

Alors plutôt qu'un discours militant sur la nature, faisons appel à nos sens, à l'image de Jean Giono dans Regain, quand il décrivait l'arrière-pays de Provence: «Il y a un beau pré et des saules; il y a un verger; il y a un énorme bouleau qui devient comme de l’écume dès que le vent le touche.»

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