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La bombe à herpès n'est pas dangereuse

Amy Bishop, la professeure de biologie qui a tiré sur six de ses collègues de l'Université d'Alabama pourrait avoir aussi placé une bombe à herpès. Pour quoi faire?

Temps de lecture: 2 minutes

Amy Bishop, la professeure de biologie qui a tiré sur six de ses collègues à l'Université d'Alabama à Huntsville le 12 février dernier, pourrait aussi avoir placé une «bombe à herpès» destinée à propager le virus de l'herpès dans le bâtiment où elle travaillait. La scientifique étudiait ce virus dans le cadre de ses recherches postdoctorales. Une telle bombe présente-elle un vrai danger?

Vraisemblablement pas. Le virus de l'herpès est fragile, difficilement transmissible et rarement mortel. C'est pourquoi aucun gouvernement ou groupe terroriste n'a, a priori, jamais fabriqué d'engin contenant ce virus. Les virions (particules virales) de l'herpès ne résisteraient pas à la chaleur produite par une explosion. Par ailleurs, ils ne se propagent pas facilement dans l'air. (La varicelle est la seule maladie de la famille des herpès dont le virus est transmissible par l'air. Mais la plupart des adultes sont immunisés contre ce virus : elle n'est donc pas une arme efficace.)

une plaie, et au pire, un œdème

Pour contaminer quelqu'un, il faudrait d'abord que les particules virales survivent à l'explosion et soient propulsées directement sur sa muqueuse buccale ou génitale, ou dans ses yeux. Elles peuvent aussi rendre quelqu'un malade en entrant en contact avec une blessure ou plaie ouverte, puisqu'elles pénétreraient ainsi dans son système sanguin. En outre, si la bombe qu'Amy Bishop a mise au point n'a pas encore explosé, elle est probablement devenue non opérationnelle il y a plusieurs jours. Car l'herpès ne peut se conserver plus de deux ou trois jours en dehors du corps humain à température ambiante, même dans une solution saline au pH équilibré.

En tout cas, un attentat à l'herpès ne risque pas de causer beaucoup de dégâts. 90% des adultes de plus de 50 ans ont déjà attrapé le virus de l'herpès sous sa forme orale, et 22% ont été exposés à sa forme génitale. Nombreux sont ceux qui ne présentent aucun symptôme. En outre, pour la majorité de ceux qui ont des symptômes, cela se résume à quelques plaies légères résultant de l'infection. Dans des cas extrêmes, un œdème cérébral peut se former. Mais en général, cela ne concerne que des patients dont le système immunitaire est affaibli, par exemple les femmes enceintes, des personnes atteintes du HIV/Sida ou subissant un traitement contre le cancer. Il existe d'autres formes d'herpès qui sont mortelles, comme l'herpès B, dont les macaques sont porteurs, et qui tuent plus de la moitié des personnes qui le contractent. Avec une souche de ce type, un attentat à l'herpès bien mené pourrait en effet être meurtrier. Mais rien n'indique qu'Amy Bishop ait pu y avoir accès.

Armes biologiques : après les enveloppes, les bars à salades

Les armes biologiques ne sont pas simples à fabriquer, même quand on dispose d'un nombre suffisant de particules virales. Des experts soviétiques et américains ont développé pendant de longues années une forme du virus de l'encéphalite équine vénézuélienne que l'on pourrait propager dans un contexte militaire. Ils ont d'abord dû dériver une souche particulièrement virulente. Ensuite, ils ont mis au point une enveloppe chimique pour protéger cette souche de la chaleur et de la sécheresse produite lors de l'explosion requise pour disperser le virus, sans oublier d'augmenter sa masse afin que la respiration de la victime ne la rejette directement après qu'elle a atterri dans sa bouche, sa gorge ou ses poumons. (Le diamètre idéal doit être compris entre un et trois microns. Or le diamètre de l'herpès, comme celui de nombreux virus, fait environ un dixième de cette taille.) Il est peu probable qu'une professeure non titulaire, n'ayant pas d'expérience dans la fabrication d'armes biologiques, sache réaliser ces étapes.

Les courriers piégés à l'anthrax envoyés après le 11-Septembre - qui semblent être l'œuvre d'un scientifique très calé- font partie des quelques attentats isolés dans lesquels des pathogènes mis sous aérosol ont été utilisés pour infecter les cibles. Pour ceux qui n'ont pas cette expertise, il est bien plus facile d'introduire des pathogènes dans de la nourriture ou de l'eau. En 1984, les Rajneeshees, une secte basée dans l'Oregon, ont réussi à infecter 751 personnes avec de la salmonelle en contaminant des bars à salades.

Amy Bishop avait sans doute l'expérience suffisante pour savoir qu'une bombe biologique n'est pas un moyen adapté pour infecter ses collègues. C'eut été plus efficace de contaminer leur matériel de laboratoire ou de verser une solution saline contenant le virus dans leurs bouteilles d'eau.

Brian Palmer.

Traduit par Micha Cziffra.

Image de une : le virus de l'herpès au microscope, Flickr/ AJC1.

 

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