Monde

Le malaise de la jeunesse allemande

Économiquement, le pays va bien, mais ce n'est pas suffisant.

Une supportrice de l'équipe de football nationale allemande, juin 2018, pendant la Coupe du monde en Russie |Tobias Schwarz / AFP
Une supportrice de l'équipe de football nationale allemande, juin 2018, pendant la Coupe du monde en Russie |Tobias Schwarz / AFP

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur BBC Capital

L'économie allemande se porte bien, le chômage est bas et le pays est souvent pris en exemple, en Europe et dans le monde. Pourtant, certains jeunes Allemandes et Allemands sont moroses.

Outre-Rhin, la jeunesse est globalement satisfaite à titre individuel, mais pas forcément de la direction que prend le pays, estime Peter Matuschek, analyste politique à l'institut de sondage allemand Forsa. Dans un récent sondage pour la radio allemande RTL, 81% des personnes interrogées, toutes classes d'âges confondues, se disent très heureuses de leur propre situation financière, mais le taux chute de 10% lorsqu'on les interroge sur la situation générale du pays. Près des trois quarts des personnes sondées sont en accord avec la manière dont le système politique devrait fonctionner, mais seulement 14% avec la manière dont le système fonctionne dans les faits.

Selon Matuschek, interrogé par la BBC, le changement s'est notamment opéré au court de l'année 2018. En janvier, seulement la moitié des Allemandes et Allemands se disaient pessimistes quant au sort de l'économie à venir. Pendant l'été, ce chiffre a augmenté de 20%.

Climat politique

 

Comme les jeunes Britanniques avec le Brexit, la jeunesse allemande a l'impression que son sort a été scellé par les précédentes générations, qui déterminent aujourd'hui son avenir politique.

L'été a été plutôt difficile; la chancelière allemande a été forcée de céder du terrain sur les questions migratoires qui ont bien failli briser son gouvernement. Mesut Özil, célèbre footballeur d'origine turque, a quitté l'équipe nationale, ne supportant plus le racisme dont il était victime. Fin août, une vidéo d'un rassemblement de nationalistes extrémistes partis à la «chasse aux immigrés» dans les rue de Chemnitz dans l'est du pays a semé une vive inquiétude. Le sentiment d'une crise imminente se propage dans les médias.

Rien ne s'est arrangé avec la défaite de la Mannschaft dès la phase de poules de la Coupe du monde masculine de football, le 27 juin. Le lendemain, le magazine Der Spiegel affiche en couverture un titre douloureux: «Il était une fois, un pays fort» [«Es war einmal ein starkes Land»]. Juste en dessous, le constat est sévère: «Les crises politiques, économiques et sportives sont le résultat de la complaisance.»

Génération oubliée?

 

Chez les jeunes, le pessimiste va de pair avec la montée de l'extrême droite, représentée par l'AfD, Alternative pour l'Allemagne. Pour Till Baaken, travailleur social berlinois de 28 ans interrogé par la BBC, elle s'est accompagnée d'une transformation de la couverture médiatique: «J'ai l'impression que l'intégralité du discours politique est centré sur l'immigration, la haine et le crime, et plus sur les vrais problèmes qui nous attendent ou que nous avons en ce moment.» Comme beaucoup d'autres, le jeune homme aimerait que le débat se tourne vers le système de santé, de retraite ou l'éducation.

Une envie partagée par Jule Löw, étudiante berlinoise, qui a l'impression que son pays est incapable de tirer les leçons de son passé: «Pendant presque toute ma vie, j'ai pensé qu'avec les choses que l'on apprend à l'école, sur le nationalisme allemand et l'histoire du XXe siècle, on aurait laissé ça derrière nous: le nationalisme et le racisme.» Pour la jeune femme, Chemnitz ne doit pas être simplement vu comme un événement isolé: elle estime que cela pourrait très bien se reproduire ailleurs en Allemagne.

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