Petit pays de moins de 3 millions d'habitants, la Lituanie a essuyé des revers historiques douloureux au cours du siècle dernier: occupation soviétique, nazie puis soviétique encore, elle s'est retrouvée tiraillée entre les grandes puissances de la région. «Nous étions le plus grand pays d'Europe et nous avons simplement disparu de la carte», estime Marijus Gudynas, le ministre des Affaires étrangères lituanien et directeur du département de la Diaspora. Une des conséquences a été une forte immigration: près de 1,3 millions de Lituaniens vivent désormais à l'étranger.
Chicago, seconde capitale
Si Vilnius compte un peu plus de 550.000 habitants, Chicago se pose comme deuxième capitale pour les expatriés, avec environ 100.000 Lituaniens, aujourd'hui issus de la troisième voire quatrième génération.
Valdas Adamkus, ancien président de la République de Lituanie ayant cumulé deux mandats, de 1998 à 2003 puis de 2004 à 2009, avait lui-même passé 49 ans aux États-Unis, principalement à Chicago.
C'est au tournant du XXème siècle que les Lituaniens ont commencé à émigrer massivement vers les États-Unis. Les premiers à fuir le pays étaient les juifs lituaniens, qui tâchaient d'échapper aux pogroms, et les ouvriers venus chercher un travail en terre d'Amérique. En 1906, la publication du célèbre livre d'Upton Sinclair, La Jungle, dénonçant les conditions de vie des travailleurs immigrés dans les abattoirs de Chicago défrayait la chronique: le personnage principal, Jurgis Rudkus, était Lituanien, comme la majorité de ceux travaillant dans cette industrie de la viande à l'époque.
Les deuxièmes et troisièmes vagues d'immigrés ont accompagné les remous des guerres: ceux qui fuyaient l'occupation soviétique après 1945, puis ceux qui sont venus à la suite de l'effondrement de l'URSS. Depuis 1990, près d'un millioin de Lituaniens ont ainsi quitté le pays.
Une diaspora soudée
Linas Gylys, immigré de deuxième génération et président du Centre mondial lituanien, implanté à Chicago, se souvient que la ville accueillait fut un temps 300.000 Lituaniens, 11 paroisses catholiques lituaniennes, plusieurs écoles et des douzaines de magasins et restaurants proposant des spécialités du pays. The Economist ajoute que «Draugas (“Ami”), le plus ancien journal lituanien au monde publié de façon continue, est basé à Chicago, de même que le musée Balzekas de la Culture Lituanienne, le plus grand musée de ce type en dehors de la Lituanie.»
Le volume de la diaspora aidant, la communauté a évolué à travers le temps en tâchant de préserver ses traditions culturelles et surtout sa langue.
Pourtant, alors que le revenu national brut augmente peu à peu, le vent dominant de migration semble s'inverser, relève The Economist: en 2017, plus de Lituaniens sont revenus au pays que ceux qui en sont partis. D'une rive à l'autre, la diaspora continue de s'agiter: cette année, les Lituaniens de Vilnius et de Chicago se sont retrouvés pour fêter le centenaire de l'indépendance.