France / Culture

Écriture inclusive: Slate.fr choisit l'accord de proximité

Dans le sillage des 314 signataires de l'appel à ne plus enseigner que «le masculin l'emporte sur le féminin», la rédaction va revenir à une règle plus juste issue du latin et appliquée en leurs temps par Corneille et Ronsard.

Écriture 46 | Patricia M via Flickr CC License by
Écriture 46 | Patricia M via Flickr CC License by

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Longtemps cantonné à des violents échanges sur Twitter, le débat sur l’écriture inclusive a quitté les réseaux sociaux et réveillé l’Académie Française, où l'on dénonce avec un brin d’emphase ce «péril mortel, dont notre nation est dès aujourd'hui comptable devant les générations futures»

Les médias, qui semblent pour la plupart avoir découvert son existence avec la publication fin septembre par les éditions Hatier du premier manuel scolaire entièrement rédigé en écriture inclusive, se sont eux aussi penchés sur l’épineuse question. Au Figaro, on hyperventile face à ce qu’on qualifie de «délire» féministe pendant qu’au Monde et chez Libé, on s’interroge sans toutefois s’engager. Chez Slate, certains sont farouchement pour, d’autres sont résolument contre.

Si pro et anti écriture pour tous et toutes n’en finissent pas de s’affronter, c’est principalement à cause du point médian, ce · qui permet d’inclure le féminin dans certains mots ( «Les manifestant·e·s») et enflamme les discussions. Dommage. Si on comprend les réticences face à un tel changement des habitudes grammaticales, l’écriture inclusive, c’est bien plus que ce point médian de crispation.

L’écriture inclusive, c’est aussi la féminisation des noms des fonctions et professions. Deux ans après la publication du Guide pour une communication publique sans stéréotype de sexe par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, dire et écrire Madame la Ministre, l’autrice, la cheffe semble passé dans les mœurs d’une grande partie de la population.

L’écriture inclusive, c’est surtout arrêter d’enseigner aux plus jeunes d’entre nous que «le masculin l’emporte sur le féminin», comme le racontait récemment Titiou Lecoq ici-même. En français, le masculin vaut neutre? Descendez dans la rue, arrêtez dix personnes. Demandez-leur d’énoncer la règle d’accord en genre. Personne ne vous parlera du masculin considéré comme neutre. En revanche, vous risquez d’entendre plus d’une fois que «le masculin l’emporte sur le féminin», quel que soit le genre de celles et ceux qui vous répondent.

Voilà pourquoi nous avons décidé de publier le manifeste de ces 314 professeurs et professeures bien décidées à braver les indications de leur ministre en cessant d’enseigner à leurs élèves cette formule du masculin tout puissant. Pas de point médian dans leurs leçons, mais une règle, celle de l’accord de proximité, «venu du latin, qui consiste à accorder le ou les mots se rapportant à plusieurs substantifs avec celui qui leur est le plus proche». «Les pays et les villes étrangères» plutôt que «les pays et les villes étrangers».

Cette règle de proximité, nous nous engageons à l’appliquer par défaut dans les papiers de Slate.fr. Tout comme nous préférerons désormais l’emploi de mots épicènes, c’est-à-dire «les mots dont la forme ne varie pas entre le masculin et le féminin» ( un ou une élève, membre, fonctionnaire), de mots désignant indifféremment une femme ou un homme ou des mots «englobants» (le corps professoral, le peuple, le public), suivant les recommandations du Haut Comité à l’égalité entre les femmes et les hommes. Pas de point médian, donc, mais une langue plus inclusive, sans impact pour les plus conservateurs de nos internautes et bien plus équitable.

 

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