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Française enlevée au Mali: pourquoi certains expatriés préfèrent braver le danger qui les entoure

La ressortissante française Sophie Pétronin a été enlevée samedi 24 décembre à Gao au Mali. Elle travaillait depuis douze ans au Mali.

La ville de Gao au Mali où a été enlevée la Française Sophie Pétronin, le 24 décembre 2016. PASCAL GUYOT / POOL / AFP
La ville de Gao au Mali où a été enlevée la Française Sophie Pétronin, le 24 décembre 2016. PASCAL GUYOT / POOL / AFP

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L'image de l'otage occidental, qui a bravé de trop près le danger au cours d'un voyage dans un pays qu'il ne connaissait pas, est parfois très éloignée de la vérité. La ressortissante française Sophie Pétronin, enlevée le 24 décembre 2016 à Gao, habitait au Mali depuis une vingtaine d'années. Elle œuvrait dans l'humanitaire et est la fondatrice de l'ONG Aide, créée en 2004. 

«Ce que j’ai reconnu chez Sophie, c’est son amour pour la ville de Gao. Lorsqu’en 2012, la France a demandé à tous ses concitoyens de ne pas dépasser la région de Mopti, une ligne rouge a été tracée à ce niveau-là. Mais Sophie a refusé de quitter Gao malgré toutes les menaces qui pesaient sur les Européens de façon générale. Elle, elle est restée jusqu’au jour de l’occupation. Donc c’est pour dire que c’est une dame très attachée à la ville de Gao. Après l’occupation, elle est revenue à Gao pour reprendre ses activités», a confié Kader Touré, le directeur de la Radio Hania de Gao, à RFI

Le Quai d'Orsay publie des recommandations concernant la sécurité de ses ressortissants à travers le monde, mais les autorités françaises n'ont pas le pouvoir d'interdire l'accès à une région à leurs citoyens. 

«Les Français voyagent librement et ne sont pas tenus de déclarer au ministère leurs destinations à l’étranger. Néanmoins, pour leur sécurité, nous les encourageons à le faire via le système Ariane ou en s’inscrivant sur les registres consulaires et à consulter nos conseils aux voyageurs, qui contiennent des informations précises et à jour sur les risques encourus», nous confie un diplomate du ministère des Affaires étrangères. 

Zone rouge

Des ressortissants vivent donc dans les fameuses zones «rouges» dont le Quai d'Orsay déconseille formellement l'accès sur son site d'information aux voyageurs France-diplomatie. La page sur la situation sécuritaire au Mali place par exemple Gao dans la zone rouge située au nord de Mopti

Parmi ces citoyens français ou occidentaux –cibles privilégiées des preneurs d'otages– qui vivent dans ces «zones rouges», certains y étaient installés bien avant que la situation sécuritaire locale ne se détériore gravement et n'oblige leur ministère des Affaires étrangères a encouragé vivement un départ de la région concernée. C'était le cas de Sophie Pétronin, qui a vu les groupes djihadistes occuper progressivement le nord du Mali et à Gao en 2012. Avant que l'armée française, à la demande du gouvernement malien, ne lance l'opération Serval en 2013 pour chasser les groupes terroristes du pays. Depuis, la sécurité restait précaire dans le nord du Mali. 

Dans un tout autre contexte, c'est aussi la tragédie qui a frappé Marie Dedieu. Cette sexagénaire française a été enlevée par des pirates somaliens à Lamu au nord du littoral du Kenya, à une centaine de kilomètres de la frontière somalienne, le 30 septembre 2011. Autrefois très touristique, cetté région est devenue de moins en moins sûr à mesure que les Shebab, un groupe djihadiste, ne s'empare de pans de territoires de la Somalie entre 2008 et 2011. Malade, Marie Dedieu n'a pas survécu à sa captivité. Elle s'était installée à Lamu dans les années 1990

«J’avais l’impression que si on lui avait dit “Lamu c’est fini”, ce que nous avons craint à cause de ses problèmes de santé, sa vie s’arrêterait», avait confié un proche de Marie Dedieu au magazine Paris Match

«Elle connaissait la région et ses dangers»

Quand on lui demande si les ressortissants installées depuis de longues années dans un pays dont la situation se détériore refusent de voir la présence du danger, un diplomate du Quai d'Orsay en charge du suivi des expatriés nous répond: «On ne peut pas généraliser, mais oui certains n'acceptent pas de devoir partir.»   

Selon le Journal du Mali, Sophie Pétronin «connaissait bien la région et ses dangers». La fondatrice de l'ONG Aide avait déjà échappé de justesse à un enlèvement en 2012, précise le site d’information. Mais elle n'a jamais voulu abandonner sa mission humanitaire sur place. 

L’enlèvement de Sophie Pétronin n’a pour l’heure pas été revendiqué. La dernière otage française en date, la Franco-Tunisienne Nourane Houas, enlevée au Yémen en décembre 2015, a été libérée en octobre 2016.

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