Santé / Sciences

Pollution atmosphérique: 48.000 morts? De qui se moque-t-on?

La pollution atmosphérique ne cesse de diminuer dans les grandes villes d’Europe et les décès qui lui sont attribués ne cessent d’augmenter. Cherchez l’erreur! Des mensonges qui servent à justifier l’idéologie de la décroissance.

Paris, le 9 décembre 2016 I BERTRAND GUAY / AFP
Paris, le 9 décembre 2016 I BERTRAND GUAY / AFP

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La pollution atmosphérique est à l’origine de maladies respiratoires et la qualité de l’air un enjeu de santé publique légitime. Toutefois, alors que depuis des décennies la pollution atmosphérique recule dans toutes les grandes villes d’Europe (à Paris, selon le Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique, les émissions toutes particules confondues sont passées de 1.254 kT en 1990 à 851 kT en 2015), les décès qui lui sont attribués ne cessent officiellement et médiatiquement de croitre.

Selon un rapport de Santé Publique France, elle serait à l’origine en France de quarante-huit mille décès prématurés. Un décès sur douze serait ainsi attribuable à la seule mauvaise qualité de l’air (594.000 personnes sont mortes en France en 2015). Où sont-ils? Qui sont-ils, ces infortunés? Y-aurait-il une hécatombe chez les vélocipédistes et les motards des grandes villes, comme chez tous ceux qui respirent depuis des décennies les émanations des pots d’échappement autrefois plus nocifs encore?

Il y a d’autres causes aux maladies respiratoires, à commencer par le tabac

Les tumeurs du larynx, de la trachée, des bronches et du poumon sont en 2015, en France, la cause de 31.000 décès, les pneumonies de 10.500, les cardiopathies ischémiques de 34.300, on dépasse les 48.000, mais la pollution serait-elle la cause principale de ces décès? Le tabac n’aurait-il aucun effet sur les cancers du poumon et autres maladies respiratoires? S’il y a 2.000 microgrammes de particules fines par mètre cube dans la fumée des cigarettes dites «légères», il n’y en a que 85 microgrammes par mètre cube dans l’air polluée des jours de circulation alternée.

Les pneumopathies infectieuses auraient-elles subitement disparues? Toute crise d’asthme ne serait-elle attribuable qu’à la mauvaise qualité de l’air? Les complications de la grippe se seraient-elles envolées? Le surpoids et l’hérédité n’auraient-ils pas un impact sur les maladies cardiaques. Le calcul ne dit rien des causes précises de ces décès prématurés, les 48.000 décès ne sont pas des individus, mais le résultat d’un calcul aussi discutable que peu discuté.

Pour être fondée, pour être sérieuse, une estimation des effets pathogènes de la pollution atmosphérique devrait –maladie par maladie– distinguer un par un les effets de chaque polluant: hydrocarbures, particules de différentes tailles (et pas seulement celles inférieures à 2,5 microns), oxyde d’azote, oxyde de soufre, monoxyde de carbone, ozone … Puis il faudrait en mesurer les conséquences à différentes doses sur chacune de ces maladies; ensuite –et ce n’est pas le plus facile– il conviendrait d’estimer l’exposition des différents habitants à chacun de ces polluants afin de calculer le risque relatif d’une exposition donnée.

Santé Publique France fait de la propagande

Faute d’avoir procédé ainsi, Santé Publique France d’où émane le chiffre de 48.000 décès prématurés part d’une estimation de l’exposition globale de la population à la pollution atmosphérique (sans notamment contrôler pour la consommation de tabac), puis applique à partir de la littérature scientifique des modèles de corrélation et des hypothèses discutables sur les risques relatifs associant exposition et cause de mortalité; puis les calculs reprennent en supposant cette fois que la qualité de l’air en France sur tout le territoire serait celui du niveau très bas des 5% des communes rurales les moins polluées (essentiellement montagnardes), communes où la part de l’activité humaine est très faible. C’est la différence entre ces deux estimations qui donne le chiffre de 48.000 «décès prématurés», sans préciser d’ailleurs en quoi ils sont «prématurés»?

Les calculs de Santé Publique France montrent d’ailleurs eux-mêmes le côté très relatif de ce chiffre. Selon cette agence, avec le même mode de calcul, si la France respectait les valeurs guides de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en matière de pollution atmosphérique, il n’y aurait alors que 17.712 morts prématurés, ce chiffre descendrait à 3.094 si l’on atteignait le niveau de pollution souhaité lors du Grenelle de l’environnement et 11 si l’on appliquait la directive 2020 de l’Union européenne. Quant à l’OMS, par d’autres méthodes, elle ne trouve «que» 28.000 décès prématurés si toute la France respirait l’air pur des 5% des communes rurales les moins polluées… Morts en grande partie hypothétiques donc. En outre, qu’il s’agisse de 48.000 ou de 28.000 morts prématurées, ces «vies sauvées» supposent qu’il n’y ait pratiquement plus d’usine, d’agriculture, de chauffage et de transport, autrement dit on respirerait bien, mais on mourrait de faim ou de froid.

Des mensonges pour justifier l’idéologie de la décroissance

Certes la pollution atmosphérique nuit à la santé et il est nécessaire de la combattre. Certes de nombreux enfants meurent dans le monde pour avoir été élevés dans des habitations insalubres où la cuisine se fait au bois et où la fumée stagne, faute d’aération. Malgré tout, l’espérance de vie progresse dans le monde de quatre mois par an; en Chine, malgré la pollution qui inquiète ses dirigeants et ressemble au «fog» londonien des années 1950 (le grand «smog» de Londres de 1952 a fait plus de 4.000 morts en quelques jours), l’espérance de vie à la naissance s’est accrue de 37 ans en un demi-siècle parce que les Chinois ont pu manger, se chauffer, boire de l’eau propre et se soigner toute activité aussi souhaitable que, parfois, polluante.

Quant au lien statistique trouvé en 2015 par l’Institut de veille sanitaire (INVS) entre les particules fines et la mortalité dans dix-sept villes françaises, il n’existerait curieusement qu’en été, période où le taux de ces particules est plus bas qu’en hiver tant en valeur moyenne que lors des pics de pollution. Il y aurait donc une autre cause, les particules fines sont alors le mauvais coupable ou tout au moins pas le seul, ce qui compte d’abord serait des températures minimales élevées, autrement dit le fait qu’il fasse chaud les nuits de canicule. Enfin, la circulation alternée ne réduirait l’exposition annuelle aux polluants d’un Lyonnais ou d’un Parisien que d’un trois millième par an, pas grand-chose donc. Autrement dit le bénéfice sanitaire est quasi nul pour un coût économique et social élevé.

On ment par action, par omission et par statistique, cette dernière forme de mensonge se développe quand elle rencontre l’idéologie de la décroissance et l’ignorance généralisée en santé publique. Il est certain que si vous ne mangez pas, ne vous chauffez pas, ne vous déplacez pas, vous ne polluez pas beaucoup! Quant à la qualité de l’air des fermes d’autrefois, il ne faut jamais avoir fait les foins ou transporté une botte de paille pour croire que l’air respiré dans les fermes n’était pas sans particules allergisantes et pas à l’origine de «rhumes des foins».

Tout ceci pour dire que même quand il s’agit de santé toute décision réglementaire à un coût, même quand ce coût est diffus. Il n’est pas inutile alors de le calculer, surtout quand les avantages de la mesure envisagée sont ténus. L’économie française croule sous le poids des normes, cela entraine du chômage qui, plus encore que la pollution atmosphérique, nuit gravement à la santé.

Enfin, si toute voiture électrique ne pollue pas là où elle circule, cela n’implique pas qu’elle ne soit pas polluante: tout dépend d’où provient cette électricité. Elle ne l’est effectivement pas quand la source est hydroélectrique ou nucléaire, en revanche elle l’est beaucoup quand elle provient de centrales thermiques au charbon, voire d’énergies «alternatives» qui ont toujours besoin de centrales thermiques quand il y a ni vent, ni soleil, mais ceci est une autre histoire.

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