Life

Jamin, Thoumieux, Rostang: retour à la simplicité

Trois tables à (re)découvrir à Paris.

Temps de lecture: 3 minutes

C'est au Jamin, tout près du Trocadéro, que Joël Robuchon, ancien arpète au petit séminaire du Poitou, s'est mis à son compte en 1981 et a fait exploser ses talents de génial cuisinier créateur, respectueux du produit de saison et d'une extrême précision dans les goûts et les saveurs. En quatre ans, le maestro a obtenu trois étoiles grâce à des plats d'anthologie: le merlan Colbert, la salade de moules en boléro, le bar au verjus, le lièvre à la royale du sénateur Couteaux et la tarte aux pommes et raisins, probablement la meilleure du monde.

C'est au Jamin, dans cette cuisine de taille réduite et dans une salle à manger de couleur verte, pas plus de quarante couverts, qu'il a formé ses plus fameux seconds: Frédéric Anton passé au Pré Catelan, Eric Briffard chef du Cinq au George V, Éric Lecerf et Philippe Braun, chefs de La Table et de l'Atelier, et Antoine Guichard son alter ego d'une rigueur d'acier, lequel a pris sa succession au Jamin, avec deux étoiles en 1991. Antoine Guichard parti en province, Babette de Rozières s'est mise au piano pour les recettes des îles, d'un exotisme bien tempéré.

Depuis l'automne, Alain Pras, ancien associé de Guy Savoy à la Butte Chaillot, a entrepris de relancer l'enseigne historique, décor dépouillé à la new-yorkaise, parquet, banquettes marron et tables séparées.

En cuisine, David Legrand, 27 ans, formé chez Guérard, ex-chef de la Butte, a composé une carte très classique d'un excellent rapport prix plaisir. Dans les entrées, la salade multicolore de gambas croustillantes au sésame (18 euros), le foie gras maison, le chutney mangue/ananas et le toast au pain de campagne (18 euros), les tagliatelles aux écrevisses (18 euros).

Côté poissons, le fameux merlan Colbert et sa pomme purée (25 euros), les noix de Saint-Jacques poêlées aux épinards et le beurre blanc (28 euros), et dans les viandes, le suprême de pintade et son risotto crémeux aux champignons (21 euros), le carré d'agneau « rôti-croustillant » et sa poêlée de pleurotes à l'ail (26 euros).

Parmi les fromages, le Saint Marcellin et le mesclun de salades (9 euros). Dans l'éventail des gâteries, le Paris-Brest géant à la crème anglaise (10 euros) et le sablé aux figues rôties, glace au miel (10 euros). On boit du Petit Chablis non filtré (17 euros) et du Marquis de Mons, un margaux 2005 (22 euros la demi).

Ce Jamin façon XXIe siècle ne prétend pas se hisser au niveau exceptionnel de Joël Robuchon puis d'Antoine Guichard. Jouant la modestie, Alain Pras a créé une bonne table de quartier sans prétention, et qui fait le plein aux deux repas.

Jamin, 32 rue de Longchamp 75116 Paris. Tél. : 01.45.53.00.07. Fermé samedi et dimanche. Menu au déjeuner à 26 euros (deux plats), à 30 euros (trois plats).

***

Jean-François Piège, ancien chef d'Alain Ducasse à Paris puis des Ambassadeurs du Crillon, a abandonné la grande cuisine doublement étoilée de la place de la Concorde pour le répertoire bistrotier, un brin personnalisé, de Thoumieux, une ancienne brasserie du VIIe arrondissement vouée aux solides nourritures du sud-ouest, cassoulet et confit en tête.

Riche d'une trentaine de plats, la carte de Thoumieux ne peut que séduire par sa variété le gourmet. Dans les entrées à 10 euros, le pâté de foie de volaille de ma mère cuit en pot, les crevettes vapeur à l'avocat sauce corail, l'œuf poché sur le cœur de frisée, lard et croûtons, le calamar sauvage à la carbonara. Aussi le jambon espagnol de Joselito et le pain à la tomate (22 euros), la barbue en filets juste snackés et sa jardinière de légumes de chez Joël Thiébault (21 euros), les langoustines vivantes aux pâtes fraîches à la noix de coco (25 euros).

On viendra surtout chez Thoumieux au décor très lumineux pour les préparations canailles comme la poitrine de cochon du basque Oteiza cuite lentement et enrichie de couennes aux oignons et lentilles du Puy (19 euros), pour le quasi de veau cuit doucement et ses pommes vitelottes écrasées aux herbes fraîches, citron et parmesan (29 euros) ou la terrine de boudin du père Favier et sa vinaigrette vanillée, pommes purée, et pour l'entrecôte de bœuf béarnaise et pommes allumettes (28 euros). Tout cela, destiné à de solides appétits.

Pour les jeunes, le burger de bœuf Wagyu (18 euros) et le jambon purée (18 euros).

Après les fromages fermiers de Jean-Yves Bordier, le baba au rhum de chez le pâtissier voisin, Millet (8 euros), trois tartes citron, chocolat et pommes (8 euros), et le vacherin glacé à la banane et citron vert (8 euros). Sélection heureuse de vins, le beau Bourgueil 2008 de la Butte à 31 euros et le vouvray sec du même propriétaire, Jacky Blot (32 euros).

A peine lancé, Thoumieux a fait un carton - cent couverts par service, et une animation de restaurant en plein boom.

Thoumieux, 79 rue Saint Dominique 75007. Tél. : 01.47.06.49.75. Carte menu à 50 euros. Pas de fermeture.

***

Chez le Dauphinois Michel Rostang, trente années de présence à Paris, il faut s'orienter vers le remarquable menu du déjeuner (75,40 euros) qui rassemble des spécialités traditionnelles, en voie de disparition ailleurs. Par exemple, la tartelette de cèpes et foies de lapin déglacés au vinaigre, la crème de cocos de Paimpol et copeaux de vieux comté, la splendide quenelle de brochet soufflée à la crème de homard façon Jo Rostang, le père de Michel qui eut trois étoiles à Antibes, le navarin d'agneau de lait et les légumes glacés au jus, ou les rognons et ris de veau au sautoir et cèpes grillés, tous ces plats goûteux, copieux, et bien servis.

Au dessert, le soufflé chaud au caramel et le sorbet à la poire Williams, la succulente tarte au chocolat amer, la sauce au café et le sorbet chocolat, une merveille de saveur.

Michel Rostang, 20 rue Rennequin 75017 Paris. Tél. : 01 47 63 40 77. Carte de 150 à 220 euros. Fermé samedi midi, dimanche et lundi midi.

Nicolas de Rabaudy

Image de une : Rostang. DR

cover
-
/
cover

Liste de lecture