France

Jean-Frédéric Poisson, un brave antisémite comme on les aime

Ainsi va cet antisémitisme qui proclame tout haut ce que tout le monde sait déjà: le monde appartient aux Juifs.

Jean-Frédéric Poisson, Les Republicains (LR) à Paris, le 24 mai 2016 | JOEL SAGET / AFP
Jean-Frédéric Poisson, Les Republicains (LR) à Paris, le 24 mai 2016 | JOEL SAGET / AFP

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Avant-hier, on ne le connaissait pas. Hier encore, on saluait l'audace et le courage du bonhomme, sa vaillance et son opiniâtreté lors du débat télévisé de la primaire de droite; aujourd'hui, après sa déclaration dans Nice-Matin, où il s'inquiète «de la proximité de Hillary Clinton avec les supers financiers de Wall Street et sa soumission aux lobbys sionistes qui sont dangereuses pour l'Europe et pour la France», on le découvre tranquillement, débonnairement, délicieusement antisémite.

Jean-Frédéric Poisson. Un brave petit antisémite comme on les aime. Oh, pas une petite frappe de nazillon élevée dans le culte de la haine du Juif, pas le tiers-mondiste nostalgique prompt à assimiler Israël à l'Empire du mal, pas la raclure de petit frontiste obsédé par la figure de l'étranger, non, non, rien de tout cela, mais plutôt le beau visage de cet antisémitisme séculier qui depuis la nuit des temps, voit dans la figure du Juif l'incarnation même du banquier plus ou moins corrompu œuvrant, dans l'ombre, à la perpétuation de sa race maudite. Et qui aujourd'hui vendrait mère et fils pour assurer la gloire éternelle du Royaume Israël.

Des Juifs assis sur des montagnes d'or

Ah qu'il est doux cet antisémitisme-là. Qu'il a donc bonne presse. Comment il trouve auprès de la population un écho favorable tant il fournit une explication toute simple à tous les maux de la terre: si rien ne va, si l'économie ne tourne pas rond, si chômage et précarité explosent de partout, ce n'est la faute de personne, si ce n'est d'une poignée de Juifs qui, réunis en conclave, quelque part entre Tel-Aviv et New-York, assis sur des montagnes d'or, recouverts de pelisses d'argent, décident des affaires du monde dans le but d'assouvir leur soif de domination.

Les Juifs contrôlent tout, sont partout, rôdent dans les couloirs de la Maison-Blanche, de l’Élysée, du Vatican si ça se trouve, ils complotent, ils tirent les ficelles, ils s'agitent, non pour le bien commun ou le salut de l'humanité, mais pour permettre à leurs coreligionnaires de s'en mettre plein les poches tout en contribuant à la prospérité d Israël. De cette juiverie tellement puissante, tellement omniprésente, tellement détentrice de richesses que personne ne peut lui résister sans en subir sur-le-champ les conséquences: l'effondrement de l'économie, la fuite des capitaux, l'appauvrissement du pays.

L'impression de compter

Ainsi va cet antisémitisme qui proclame tout haut ce que tout le monde sait déjà: le monde appartient aux Juifs. Moi qui n'appartiens à personne, pas même à moi-même, qui ai autant de cheveux que de lingots d'or, qui ne possède ni voiture, ni maison, ni rien, hormis une kippa rangée je-ne-sais où, je tiens à remercier Jean-Frédéric Poisson et ses sbires: grâce à eux, j'ai l'impression de compter, je me sens puissant comme jamais, je contemple ma mappemonde et m'émerveille de savoir que cette terre est mienne, ou alors je consulte mon compte en banque, perpétuellement dans le rouge, sans pour autant m'inquiéter.

En cas de coup dur, je pourrai toujours appeler Hillary dans son bureau ovale, elle m'est soumise de toute éternité, elle me doit tout, elle obéira sans moufter à mes quatre volontés. En moins de temps qu'il n'en faut pour préparer le repas du shabbat, elle fera le nécessaire pour assurer mes arrières et ceux de mes proches. Quant à Jean-Frédéric, on ne va pas noyer le poisson: qu'il retourne à sa présidence du Parti Chrétien-Démocrate et à son amitié naissante avec Robert Ménard.

On respirera bien mieux.

 
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