Monde

Le témoignage bouleversant de Nidhi Chaphekar, photographiée après l'attentat de Bruxelles

Son visage anonyme est devenu en mars dernier le symbole de l'attentat de Bruxelles. The Guardian rapporte le témoignage de cette hôtesse de l'air qui incarne malgré elle «la panique et le traumatisme».

PHILIPPE HUGUEN / AFP
PHILIPPE HUGUEN / AFP

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur The Guardian

«Est-ce que mon visage est brûlé?» C'est la première chose qu'à eu la force de demander Nidhi Chaphekar à l'infirmière du Grand Hôpital de Charleroi, le 22 mars 2016, quelques heures après que deux bombes aient explosé dans l'aéroport de Bruxelles.

Face au visage meurtri de l'hôtesse de l'air indienne de la Jet Airways, l'infirmière a gardé le silence. Nidhi Chaphekar n'a pas posé cette question par orgueil. Elle sait que, pour garder son travail, il lui est requis d'être parfaite, d'être belle, de la pointe du chignon, au carmin de ses lèvres. Et Nidhi Chaphekar redoute plus que tout d'être dépendante des autres.

Peu après cette conversation, Nidhi Chaphekar sera plongée dans un coma médicamenteux dont elle ne s'éveillera que vingt-deux jours plus tard, ses nombreuses blessures pansées et la mémoire flageolante. Son mari, venu d'Inde pour rester à son chevet, lui montrera la photo qui a été prise d'elle à l’aéroport de Bruxelles par une journaliste géorgienne Ketevan Karvada. On y voit Nidhi à demi allongée sur deux chaises grises, son uniforme jaune vif soufflé par l'explosion, le ventre nu, le visage hagard et couvert de sang mêlé de cendres. Son regard semble implorer l'objectif, comme pour obtenir une réponse sur l'innommable qui vient de se produire.

 

Ça a fait quelque chose comme «boum»

Cette photo s'est retrouvée en couverture du Guardian et du New York Times. Elle a été partagée des milliers de fois sur Facebook et Twitter. Nidhi est devenue le symbole de l'attentat de Bruxelles, figure douloureuse sortie de l'anonymat pour incarner l'horreur de l'événement au yeux du monde. Son visage est celui des 32 tués et des 340 blessés par la folie meurtrière des terroristes de Daech.

Aujourd'hui, Nidhi Chaphekar accepte de revenir pour le Guardian sur les souvenirs de ce jour terrible depuis son domicile de Bombay où elle se rétablit, entourée de ses enfants. Le 22 mars au petit matin, elle s'apprêtait à embarquer avec ses collègues pour un vol à destination de Newark, aux États-Unis. Lors de la première explosion, elle a pensé à un problème avec l'air conditionné ou la batterie d'un fauteuil roulant et a voulu se précipiter en direction du bruit pour proposer son aide. Quelques secondes plus tard, un hurlement retentissait dans l'aéroport et son pied a cogné quelque chose de dur:

«Ça a fait quelque chose comme boum, explique t-elle au Guardian. Et j'ai volé come un ballon de football. Il y a avait de la lumière, comme si j'étais propulsée très près du soleil. J'ai atteri sur mes pieds et j'ai perdu conscience.» 

Passé le choc

C'est quelques minutes après cette explosion que la photographe géorgienne a pris la photo de Nidhi qui s'est réfugiée sur une chaise. L'hôtesse de l'air n'a aucun souvenir que ce moment ait été immortalisé.

Six mois après ce jour maudit, Nidhi a des sentiments partagés quant à cette photo. «Il y a tant de photos qui ont été prises ce jour-là, mais c'est la mienne qui a circulé, parce qu'elle montre tout: les circonstances, la panique, le traumatisme.» 

Nidhi a notamment été perturbée que son corps dénudé soit ainsi exposé en pleines pages des journaux: «J'avais peur qu'on dise à mes enfants: regardez votre mère, vous n'avez pas honte?» Mais elle ajoute: «Personne n'a pourtant dit cela à mes enfants. Tout le monde leur a dit: “Votre mère est si courageuse. Elle est comme une tigresse”.»

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