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Souhaiter à quelqu’un de se faire violer n’est pas abusif pour Twitter

Une utilisatrice a décidé de quitter le réseau social pour protester contre la décision de Twitter. Ce dernier a en effet jugé que l'un des tweets lui souhaitant d’être violée n’enfreignait pas les conditions générales d’utilisation.

<a href="https://www.flickr.com/photos/kprints/25598241613/%0D%0A">Hate Background</a> | K-Screen Shots via Flickr CC <a href="https://creativecommons.org/licenses/by/2.0/">License by</a>
Hate Background | K-Screen Shots via Flickr CC License by

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur Buzzfeed

Kelly Ellis se décrit elle-même dans sa bio Twitter comme «une ingénieure féministe qui ne s’excuse pas». Le 20 août dernier, elle a exprimé toute sa colère et sa déception lorsqu’elle a appris qu’Austin Wilkerson, un étudiant du Colorado (aux États-Unis) qui a violé une jeune femme rendue inconsciente par l’alcool, n’écopait d’aucune peine de prison ferme pour l’acte qu’il a commis. Austin Wilkerson sera seulement obligé pendant deux ans d'aller chaque soir après ses études, une mesure plus clémente que la prison ferme et qu’on qualifie de «placement à l’extérieur».

«C’est révoltant. Il n’y a aucune justice pour les victimes. Tous les hommes qui affirment “si c’était vraiment arrivé, tu serais allé directement au commissariat”, vous dites vraiment de la merde», réagit-elle elle sur le réseau social, après avoir appris la décision de justice. «Parce que porter plainte pour viol, c’est finalement demander à un juge de dire que le traumatisme que vous avez vécu n’est pas si grave et que la vie de votre violeur importe plus», ajoute-t-elle«Porter plainte pour viol, c’est se condamner à voir son passé, sa réputation, et tout ce qu’on est, massacré par un juge», dit-elle aussi, visiblement en colère.

«Je te souhaite de te faire violer»

Ses déclarations sur le viol lui ont attiré un paquet d'internautes mal intentionnés et de trolls, dont des menaces particulièrement graves d’un certain @fredcarson9151, qui lui a souhaité plusieurs fois d’être «violée» et l'a harcelée pendant une semaine, avec près de soixante-dix tweets remplis d’agressivité.

«"Tais-toi et fais-toi violer. Garde ton calme et fais-toi violer". Je vais créer des t-shirts avec ce slogan, tu aimes?», lui lance-t-il, le 23 août. «Je te souhaite juste à TOI de te faire violer», écrit-il encore lorsqu’elle lui fait remarquer que c’est abominable de souhaiter aux femmes de se faire violer. Entre autres insultes, @fredcarson9151 la qualifie aussi de «féministe psychotique qui déteste les hommes».

«Cela ne viole pas les règles d'utilisation de Twitter»

Tout ceci aurait pu s’arrêter là, et Kelly Ellis passer son tour. Mais cette fois, elle en a eu assez. Elle a donc décidé, comme le raconte Buzzfeed, de signaler ces tweets au réseau social, qui interdit depuis décembre les «conduites haineuses», le «harcèlement» et les «menaces violentes»:

«Conduite haineuse: vous ne devez pas directement attaquer ni menacer d'autres personnes, ni inciter à la violence envers elles sur la base des critères suivants: race, origine ethnique, nationalité, orientation sexuelle, sexe, identité sexuelle, appartenance religieuse, âge, handicap ou maladie. Par ailleurs, nous n'autorisons pas les comptes dont le but principal est d'inciter à faire du mal aux autres sur la base de ces catégories», est-il écrit dans leurs règles d’utilisation.

Mais la réponse de Twitter ne correspond à ce qu’on aurait pu attendre du réseau social. Il estimé que ces tweets n’enfreignaient pas ses conditions générales d’utilisation:

Traduction: «Bonjour, merci de nous avoir informé de votre problème. Nous avons étudié le compte en question (...) et les tweets que vous nous avez signalés, mais ils n'enfreignent pas notre réglement.»

Le compte finalement suspendu

Après une semaine de contacts avec le réseau social, Kelly Ellis, dégoutée, a donc décidé qu’elle allait quitter le réseau social pour un moment. Elle a écrit un post sur Medium contenant toutes les captures d’écran des tweets agressifs du harceleur.

«C’est terrible d’avoir à choisir entre d’un côté se sentir en sécurité et éviter de se prendre des attaques au vitriol et des menaces de viol, et de l’autre pouvoir continuer à entretenir des relations sur les réseaux sociaux, qui sont importantes pour moi», écrit-elle.

«Twitter pense que les gens doivent pouvoir faire ce qu’ils veulent», se désole-t-elle Twitter a finalement suspendu le compte de @fredcarson9151. Mais... après l’article de Buzzfeed.

Ce cas n'est pas isolé. En mars, la militante Caroline de Haas avait décidé de porter plainte après avoir reçu des dizaines de réponses haineuses, dont certaines incitaient au viol:

«Va te faire violer par tes migrants. salope de collabo tu te fera raser la tête pouffiasse.»

«Qu'elle se fasse violer par ces migrants cette pute de collabo», etc.

En 2013, la journaliste Rokhaya Diallo avait porté plainte pour les mêmes raisons. En juillet, une YouTubeuse féministe a quitté temporairement Twitter après des menaces de viol, de mort, et des insultes. Des attaques qui constituent un véritable défi pour le réseau social, qui a créé en férvier un Conseil de la protection des utilisateurs. Afin d'empêcher que les utilisateurs, dégoûtés par l'expérience, ne désertent son réseau.

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