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VIDÉO. Vous ne trouverez jamais la vraie recette de la sangria (mais voici la nôtre)

Du vin et des agrumes pour la base, et après, on fait ce qu’on veut: la vraie recette de la sangria n'existe pas.

Impossible de statuer sur une seule et unique vraie recette de la sangria | Elise Renoleau
Impossible de statuer sur une seule et unique vraie recette de la sangria | Elise Renoleau

Temps de lecture: 4 minutes

Comment ça, une recette traditionnelle qui n’a pas SA version officielle? Personne qui ne s’écharpe sur la question? Pas un zélateur qui détient la recette originelle, la seule, l’unique, la vraie? Quelle déception… C’est à en perdre tous mes repères en cuisine. Même ma grand-mère, franco-espagnole, a ouvert des yeux ronds quand je lui ai parlé de «vraie recette» de sangria. Rien que dans la famille, on trouve autant de recettes que de cousins.

Il y a ceux qui ajoutent de la liqueur de framboise, ceux qui préfèrent de la licor 43 («redoutable», dixit mamie), et encore ceux qui ne jurent que par le Cava Frexeinet (un vin blanc pétillant). Bref, «la sangria, c’est une histoire d’expériences personnelles et familiales», résume-t-elle. Théorie confirmée par Jérôme du 10 bar, LE bar à Sangria de Paris. Cherche pas, y’a pas de vraie recette.

La sangria, inventée par… les Anglais?

Pour pouvoir parler de vraie recette, il faudrait d’abord se mettre d’accord sur l’origine de la sangria. Et là, enfin, on trouve un peu de guéguerre: oubliez tout ce que vous pensez savoir, la sangria n’aurait pas été inventée en Espagne (ou au Portugal). On devrait notre boisson de l’été aux Anglais. D’après cette théorie, «sangria» ne viendrait pas de «sangre» («sang» en espagnol, «sangue» en portugais) en relation avec la couleur rouge sang du breuvage. Elle rapproche le mot sangria de «sang-gris», une boisson des Antilles, inventée par les Anglais il y a quatre siècles (et qu’ils appellent sangaree, ça se prononce pareil).

Dans cette version, on trouve du vin de Madère, du sucre, du jus de citron, un peu de cannelle et une croûte de pain rôtie. Cette recette aurait ensuite voyagé jusqu’en Europe. Probablement grâce au Père Labat, missionnaire dominicain qui mentionne le sang-gris dans son ouvrage Voyages aux îles d’Amérique en 1722. Pour ensuite donner naissance à la sangria telle qu’on la connaît.

Sangria ou «boisson aromatisée à base de vin»

Mais les députés européens ont tranché: la sangria, c’est espagnol ou portugais, sinon, ce n’est pas de la sangria. Au printemps 2014, ils ont décidé d’attribuer une appellation d’origine protégée (AOP, l’équivalent européen de notre AOC) à une série de boissons alcoolisées, dont la sangria. D’après le texte et depuis 2015, seules les productions espagnoles et portugaises peuvent porter le nom de sangria et la vendre comme telle. Pour toutes les autres, il faudra se contenter de «boisson aromatisée à base de vin».

L’Europe a également codifié la recette dans un texte un peu plus ancien. La sangria y est décrite comme une boisson obtenue à base de vin, aromatisée par l’addition d’extraits ou d’essences naturelles d’agrumes, avec ou sans jus de ces fruits et avec éventuellement des épices, du sucre et du CO2. En gros, on n’est pas plus avancé.

Du vin et des agrumes

En compulsant frénétiquement les dizaines de recettes que l’on trouve sur internet ou dans les livres, on finit quand même par trouver une base: la sangria, c’est avant tout du vin et des agrumes. Ensuite vient l’ajout de brandy (du cognac ou du cointreau), de sucre, de limonade ou d’eau gazeuse. Puis arrivent toutes les variantes, avec du rhum, de la vodka, du jus d’orange, des bananes, des pommes, des pêches. Même le Larousse Cuisine propose une recette de sangria aux fruits rouges, c’est dire.

Commençons par le commencement: le vin. Je vous vois venir avec votre cubi en promo. Non, la sangria n’est pas l’occasion de vous débarrasser de la piquette qui traîne dans le bas du placard depuis le nouvel an 2009. Vous savez ce que ça donne une sangria à base de mauvais vin? De la mauvaise sangria, eh oui. Bien sûr ce n’est pas non plus la peine de sacrifier un grand cru de Saint-Émilion, mais optez quand même pour la gamme au-dessus de la villageoise. Pour bien faire, on choisit un vin espagnol, qu’on veut fruité mais assez tannique pour se tenir même après la macération. Personnellement j’utilise un Roussillon, un vin de pays des Côtes Catalanes qui fait très bien l’affaire.

Ensuite, les agrumes. Comme on va laisser la peau, on préfère bien évidemment des oranges et des citrons bio. Au risque sinon de se retrouver avec une soupe de pesticides. Si vous préparez la sangria dans un saladier, vous pouvez les laisser en rondelles. Si vous préférez la faire directement dans un pichet, coupez les rondelles en quatre.

Limonade, eau gazeuse, glaçons et temps de macération

Les principaux points de friction pour la suite de la recette tiennent en trois questions: faut-il ajouter des bulles et si oui, limonade ou eau gazeuse? Est-ce pécher que d’y plonger quelques glaçons? Et combien de temps tout ce petit monde doit macérer au frais?

En ce qui concerne la boisson gazeuse, c’est majoritairement un oui. Elle permet d’alléger un peu le mélange, déjà costaud. Et comme la sangria est une boisson rafraîchissante qu’on boit principalement l’été au soleil, ça ne peut pas faire de mal. Ensuite pour choisir entre l’eau pétillante et la limonade, c’est une question de goût (et de logique): la limonade va apporter du sucre en plus (sucre + alcool = la fête sera plus folle…). L’eau gazeuse, c’est possible, à condition d’en choisir une pas trop salée.

L’ajout de glaçons est un peu un faux problème. D’accord, mettre des glaçons dans son vin c’est une hérésie, mais dans un vin qui a déjà macéré avec des fruits, on n’est plus vraiment à ça près.

Enfin, le temps de macération. Le débat vient du fait qu’un temps de macération trop long change les caractéristiques du vin. Certains recommandent donc de laisser les fruits macérer seulement deux heures avant de servir. Encore une fois, c’est une question de goût. Personnellement je pense qu’en dessous d’une nuit de macération, on ne retrouve pas assez la saveur typique de la sangria qu’on boit en Espagne. En gros, ce qu’il faut retenir: plus vous laissez macérer, moins le goût d’alcool sera prégnant.

La recette

  • 1 L de vin rouge
  • 1 orange
  • 1 citron
  • 20 cl de cointreau ou cognac ou brandy
  • 50 gr de sucre
  • 40 cl limonade
  • quelques glaçons

Lavez et coupez les oranges et citrons en tranches (puis en quarts)

Placez-les dans un récipients

Ajoutez le cognac et le sucre

Laissez macérer au frais pendant deux heures

Dans un pichet, versez le mélange fruits-sucre-cognac

Ajoutez le vin rouge et mélangez bien

Laissez macérer une nuit au frais

Ajoutez la limonade au moment de servir ainsi que quelques glaçons

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