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Un examen de médecine sexiste? Et alors?

Plusieurs ministres ont dénoncé la pratique mais peu de sanctions sont réellement prévues.

Marisol Touraine devant l'hôtel Matignon, le 19 mars 2015 I KENZO TRIBOUILLARD / AFP
Marisol Touraine devant l'hôtel Matignon, le 19 mars 2015 I KENZO TRIBOUILLARD / AFP

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Une femme fessée en réunion par son patron, devant ses collègues, arrive aux urgences pour une consultation. Mérite-t-elle d'aller au coin? C'est la question sexiste qui a été posée lors d'un examen blanc de médecine, comme nous le révélions le 10 avril.

A la suite de notre article, la ministre de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche Najat Vallaud-Belkacem a promis de prendre «les mesures nécessaires».

Pourtant, contacté par nos soins, le ministère de la Recherche indique que cet incident n'est pas de son ressort, qu'il relève de l'autonomie des établissements. Le service de presse explique aussi avoir envoyé un message à Jean-Luc Dubois-Randé, président de la conférence des doyens de faculté de médecine, lui indiquant que la question 37 n'avait pas lieu d'être et qu'elle ne devait aucunement être prise en compte lors des corrections. A l'heure où nous avons eu le ministère au téléphone, le président n'avait pas encore répondu.

La conférence des doyens de médecine nationale et celle des doyens de santé d'Ile-de-France ont néanmoins publié le 12 avril un communiqué commun condamnant «avec la plus grande fermeté ce cas clinique [celui de la question 37] qui sous un caractère "potache" donne une idée désastreuse de nos enseignants et de nos enseignements.» Le document rappelle l'ensemble des enseignants de médecine à «leur devoir d'exemplarité» face aux citoyens. 

Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, a elle aussi condamné cette partie du questionnaire à choix multiples: 

Mais son ministère n'a pas plus de compétence en la matière que celui de sa consoeur. 

«Une blague pas méchante»

Trois facultés de médecine franciliennes ont fait passer cet examen blanc à leurs étudiants, le vendredi 8 avril. Elles font partie des universités Paris 7 (Paris-Diderot), Paris 13 (Bobigny) et Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines. C'est cette dernière qui est à l'origine de la fameuse question 37.

Olivier Dubourg est l'administrateur provisoire de l'UFR de sciences de la santé de l'université de Versailles en remplacement du doyen Djillali Annane, qui a quitté son poste pour conseiller la ministre Marisol Touraine. Auprès de Slate, il regrette «une blague pas méchante mais déplacée qui n'a pas lieu d'être dans le cadre officiel d'un examen blanc pour l'internat.»

Le cardiologue souligne que les questions ont été réalisées dans un temps court (trois jours) et dit avoir appelé la commission en charge des relectures des sujets à davantage de vigilance. Peut-être qu'il faut prendre du temps pour ne pas être sexiste.

Nul ne sait en tous cas si l'auteur de la question écopera de sanctions: Olivier Dubourg n'a pas souhaité s'exprimer sur d'éventuelles sanctions à son encontre. Ni d'ailleurs sur le contexte sexiste plus large dans lequel baignent les études de médecine.

Heureux de la tournure des choses

Les facultés de médecine des universités Paris 7 et Paris 13 regrettent aussi la teneur sexiste de cette question 37, tout en rappelant que chaque université a relu seule les questions dont elle était en charge.

Jean-Loup Salzmann, ancien président et administrateur provisoire de Paris 13 en attendant les prochaines élections internes, propose que le processus de relecture dans le cas d'épreuves communes à plusieurs facultés soit revu, nous explique le service de presse de son université.

À Paris 7, une élève qui préfère rester anonyme nous explique qu'un professeur en charge de la coordination des examens blancs leur a confié qu'il était heureux de la tournure que prenaient les choses, si cela permettait de faire évoluer les mentalités. La présidence de l'université est restée injoignable.

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