Parents & enfants / Égalités

Lego «papa hipster au foyer», les femmes ne lui disent pas merci!

En sortant un petit personnage de père hipster au foyer, la marque de jouet rate sa cible.

Temps de lecture: 2 minutes

Vous allez dire qu’on chipote. Si, si. Vous allez dire qu’on chipote, je le sais. Mais c’est vrai, il y a bien quelque chose à redire à la figurine «papa hipster au foyer» de Lego. La marque de jeu de construction a, en effet, prouvé sa capacité à innover et à proposer aux enfants des jouets plus modernes et surtout plus inclusifs, en mettant sur le marché une figurine de père.   

Une initiative qu’il convient de saluer, dans l’absolu, tant la marque et l’industrie du jouet dans sa globalité ont persisté à proposer des jeux genrés et stéréotypés. Sans compter les ignobles Lego pour filles créés en 2012 et qui permettaient, entre autres expériences réjouissantes, de jouer à l’esthéticienne.

Alors, le fait que la marque ait effectué la démarche d’inclure dans son catalogue un personnage de papa mérite bien d’être souligné. Mais certainement pas d’être unanimement applaudi. Parce qu’il ne s’agit pas simplement d’une figurine de papa avec son biberon et sa poussette. Mais d’un «papa au foyer» accompagné de madame, qui, elle, est affublée de tous les attributs de l’archétype de l’executive woman (tailleur, lunettes et attaché-case).

Et la nuance!

Que dit ce duo de figurines? Que le papa s’occupe du bébé. Et que la maman travaille. Chacun de leur côté. Qu’il s’agit de deux tâches bien distinctes. Qu’un papa qui s’occupe de son bébé a forcément pris congé de son travail et reste à la maison. Et qu’une maman qui travaille ne peut pas s’occuper de son bébé.

Que la seule répartition qui vaille, c’est tout ou rien. Autrement dit, en voulant proposer une figurine inclusive qui reflète la réelle et nécessaire implication des pères dans l’éducation des enfants, elle entérine l’idée qu’une conciliation entre la famille et le travail est impossible et qu’il faut choisir son camp. Le travail OU les enfants. Pas les deux.

Or, l’idée qu’il est impossible d’articuler vie professionelle et vie de famille, et qu’il faut nécessairement sacrifier l’une ou l’autre est un présupposé qui mérite d’être battu en brèche et non validé aux yeux des enfants à travers les schémas qu’on leur propose.

Le père au foyer, une licorne

Nombreuses sont les femmes à qui, en entretien d’embauche, on a demandé si elles étaient mère ou souhaitaient le devenir, en sous-entendant qu’il s’agirait forcément d’un frein à leur carrière, voire à leur embauche. En France, selon le baromètre du Défenseur des droits et l’Organisation internationale du travail (OIT), une femme salariée sur quatre s’est déjà sentie lésée dans sa vie professionnelle en raison de sa maternité. Aux États-Unis, un quart des mères se sentent discriminées pour les mêmes raisons

Si les pères ne subissent pas du tout les mêmes discriminations (les hommes peuvent même retirer des bénéfices au travail quand ils deviennent pères), peu de mesures ont encore été prises pour les encourager à davantage concilier paternité et travail, et ce, malgré les nombreuses pistes possibles. Certes, il existe des pères au foyer, mais au vu des chiffres, ils font encore office de licorne. Bref, le message globalement véhiculé reste qu’on ne peut pas tout avoir, et qu’au lieu d’aider les femmes et les hommes à articuler travail et famille de façon parfaitement équitable, on les encourage plutôt à choisir l’un ou l’autre.

Alors si Lego souhaite vraiment «être en phase avec le monde qui nous entoure», comme son président le prétend, et veut effectivement s’engager à faire évoluer les mentalités, pourquoi ne pas avoir commencé avec de simples figurines papa et maman, qui ne seraient pas enfermées dans une répartition aussi marquée? En tout cas, si l’on considère que l’objectif que doivent atteindre nos sociétés n’est pas tant davantage de pères au foyer que davantage de parité homme-femme.

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