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Le gros mensonge de Donald Trump sur la guerre en Irak

Le candidat à l'investiture républicaine affirme qu'il s'était opposé à l'intervention de 2003. Un récit que ne confirment pas vraiment ses propos de l'époque...

Donald Trump lors d’un meeting organisé à Raleigh en Caroline du Nord le 4 décembre 2015 |REUTERS / Jonathan Drake
Donald Trump lors d’un meeting organisé à Raleigh en Caroline du Nord le 4 décembre 2015 |REUTERS / Jonathan Drake

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur Politifact, The Washington Post, Buzzfeed

Depuis qu’il s’est lancé dans la course à la Maison Blanche, le milliardaire Donald Trump essaye de faire valoir son expertise en politique internationale en affirmant, entre autres, qu’il a toujours été opposé à la guerre en Irak, lancée en mars 2003. Par exemple, le 13 février dernier, lors d’un débat en Caroline du Sud, il a déclaré, face à ses concurrents:

«Je suis le seul sur cette scène à avoir dit "N’allez pas en Irak. N’attaquez pas l’Irak". Personne d’autre sur cette scène n’a dit ça. Et je l’ai dit haut et fort. Et j’étais dans le secteur privé. Je n’étais pas en politique, heureusement. Mais je l’ai dit, et je l’ai dit haut et fort: "Vous allez déstabiliser le Moyen-Orient". C’est exactement ce qui s’est passé.»

Son assurance a évidemment fait tiquer bon nombre de journalistes américains, qui ont décidé de fouiller dans le passé du candidat pour retrouver cette soi-disant déclaration prémonitoire. Et comme le montre le site Politifact et le Washington Post, les sources permettant d'étayer ses propos sont très maigres. Le 28 janvier 2003, quelques mois avant l’invasion, Trump était assez indécis sur le sujet devant les caméras de Fox News: 

«[George W. Bush] doit faire quelque chose ou ne rien faire, parce peut-être qu'il est trop tôt et qu’il faut peut-être attendre les Nations unies, vous savez. Il subit une grosse pression. Je pense qu’il fait un très bon boulot.»

Une semaine après l’invasion, lors d’une soirée post-Oscars, au bras d’une mannequin qui allait devenir sa femme deux ans plus tard, il explique que la guerre pourrait poser problème, parce que «la guerre est un bordel». Mais quelques jours après, il estimera aussi que «le marché va grimper comme une roquette» avec ce conflit.

Ce n’est qu’un an et demi plus tard que l’homme d’affaires va se montrer très virulent envers une invasion devenue catastrophique. En août 2004, dans Esquire, il parle du «bordel dans lequel nous sommes» et affirme qu’il n’aurait pas géré le conflit de la sorte. Chez Larry King, trois mois plus tard, il dira encore: «Je ne crois pas que nous ayons pris la bonne décision en allant en Irak, vous savez, j'espère que l'on va s'en sortir.»

Jusque-là, rien à voir donc avec ses affirmations du 13 février dernier. Et puis Buzzfeed a retrouvé la trace d’une interview de Trump à l'automne 2002, au micro d’Howard Stern. Un an pile après les attentats du 11 septembre, le célèbre animateur lui demande s’il était en faveur d’une invasion de l’Irak. «Oui, je suppose que oui, avait-il alors répondu. J’aurais aimé que la première invasion [en 1991, ndlr] se passe mieux.»


Cette semaine, sur CNN, Anderson Cooper lui a logiquement demandé de réagir à cet extrait. «J’ai pu dire ça, a répondu Trump. Personne ne m’a demandé ça. Je n’étais pas en politique. C’était certainement la première fois que l’on me posait la question.»

Mais Buzzfeed a aussi ressorti un passage très politique de l’un des nombreux livres de l’homme d’affaires, The America We Deserve («L’Amérique que nous méritons»), publié en 2000:

«Nous ne savons toujours pas ce que l’Irak fait ou s'il a les matériaux nécessaires pour construire des armes nucléaires. Je ne suis pas belliqueux. Mais si nous décidons que nous avons besoin de frapper l’Irak à nouveau, il serait fou de ne pas mener la mission jusqu’à son terme. Si nous ne le faisons pas, nous aurons droit à une situation pire que tout: l’Irak restera une menace et aura plus de motivation que jamais pour nous attaquer.»

Difficile donc de comprendre la position de Donald Trump sur cette guerre très coûteuse pour les Etats-Unis. Mais il apparaît clair aujourd'hui que son discours soi-disant visionnaire ressemble à tout sauf à la vérité. 

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