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Pour un cours sur le stalinisme, un prof russe demande à ses élèves de dénoncer leurs amis

Afin d’appréhender l’atmosphère qui régnait dans l’URSS stalinienne, des lycéens russes ont dû dénoncer une de leurs connaissances en imitant le style soviétique de l'époque.

Un portrait de Staline, à l’occasion du 55e anniversaire de sa mort, le 5 mars 2008, à Gori (Géorgie), lieu de naissance du «Petit père des peuples» | REUTERS/David Mdzinarishvili
Un portrait de Staline, à l’occasion du 55e anniversaire de sa mort, le 5 mars 2008, à Gori (Géorgie), lieu de naissance du «Petit père des peuples» | REUTERS/David Mdzinarishvili

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur Quartz

Pour faire comprendre à des lycéens l'atmosphère du stalinisme des annés 1930 et 1940, lorsque des millions de Russes supposés être des ennemis du régime ont été envoyés au Goulag, un professeur russe a demandé à ses élèves de choisir une de leur connaissance –parent, voisin, ami– et de les dénoncer en imitant le style soviétique de l'époque.

Il a ensuite raconté l'expérience sur Twitter, ce qui a déclenché la fureur de nombreux internautes russes, choqués. Interviewé par le site Quartz, Alexander Fokin, le professeur de 32 ans, raconte qu'il a d'abord montré de vrais exemples de lettres de dénonciations de l'époque, avant de demander aux élèves de créer leur propre version.

Cet exercice original n'a pas eu lieu dans un cours de lycée classique. Il s'agissait d'un cours optionnel dans un établissement pour les lycéens qui veulent approfondir leurs connaissances historiques. Sur seize élèves, un seul a refusé de participer, et beaucoup ont dénoncé leurs amis avec des phrases comme «Il a beaucoup de livres en allemand, c'est probablement un espion».

Selon le professeur, qui fait aussi du stand-up et des émissions comiques à la télé, la meilleure lettre était une dénonciation du professeur lui-même, accusé de faire des blagues anti-soviétiques et de ne pas prendre en compte la «réalité sociale» des lycéens.

Expérimentation pédagogique

Il s'est rapidement rendu compte que certains élèves avaient utilisé Staline se serait occupé de toiun site humoristique qui génère automatiquement des accusations paranoïaques de style soviétique.

Si c'était à refaire, Alexander Fokin explique qu'il demanderait plutôt aux élèves de se dénoncer eux-mêmes. Mais il pense malgré tout que son expérimentation pédagogique était valable car il s'agissait d'«analyser la langue de l'ère stalinienne et de comprendre le rôle joué par la population dans la répression».

Selon le site Meduza, les libéraux l'ont accusé d'apprendre aux jeunes à dénoncer à la police alors que les conservateurs pro-Kremlin lui ont reproché de se moquer de l'histoire russe:

«Sur Twitter, il y a des gens qui m'ont dit qu'ils m'avaient signalé au FSB [le successeur du KGB], explique Fokin. Ce sera intéressant de voir comment tout cela finit. Est-ce qu'il ne se passera rien, ou la police va-t-elle m'interroger sur le sujet? Au final, cette histoire nous dira combien notre société a changé depuis les années 1930; cela nous permettra de mesurer les progrès que nous avons faits.» 

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