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Si vous avez une carte fidélité Air France, jetez-la

25 millions de personnes ont adhéré à Flying Blue, le programme pour les «frequent flyers» de la compagnie. Mais pour gagner des miles, il faut désormais voyager au prix fort, en classe «affaires», les autres clients étant de moins en moins récompensés. Et l’infidélité à Air France rapporte...

REUTERS/Jason Reed
REUTERS/Jason Reed

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Comme beaucoup de Français qui partiront cet été en vacances à l’étranger, vous allez peut-être utiliser votre carte de fidélité Air France. Vous gagnerez des «miles» qui seront «valables à vie» et qui vous feront bientôt voyager gratuitement

Vraiment? C’est ce que je croyais moi aussi. Avant de regarder mon propre relevé de compte Flying Blue et d’étudier les évolutions récentes du programme de fidélité d’Air France. Désormais, le barème de rétributions en «miles» est complètement déconnecté de l’unité de mesure qui lui a donné naissance. Chez Air France, un «miles» vaut souvent quelques mètres seulement! En fait, ce programme est même devenu l’un des moins avantageux du marché. Alors, oubliez votre carte de fidélité: elle ne sert (presque) plus à rien. L’infidélité à Air France paye plus. Et voici pourquoi.

12.000 km offerts pour 140.000 km effectués

C’est en 1981 que les programmes de fidélité des compagnies aériennes ont été imaginés. American Airlines a été le premier à les expérimenter en récompensant ses clients les plus fidèles: on leur offrait des surclassements et des billets gratuits. Plus de trente ans après, toutes les compagnies ont leur programme «Frequent Flyers», mais les barèmes de «miles» sont devenus de plus en plus complexes. Les récompenses ont également considérablement diminué. Quand un «miles» réellement effectué offrait hier un «miles» en voyage gratuit, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Chez Air France, on a visiblement de gros problèmes de conversion!

Un cas personnel est toujours singulier, mais je le prends ici comme exemple. Étant écrivain et chroniqueur international à Slate, j’ai la chance de voyager fréquemment. Sur les dix-huit derniers mois, entre janvier 2014 et juin 2015, j’ai effectué à 35 reprises un vol avec l’alliance aérienne «Skyteam» (dont 32 fois sur Air France)[1]. Tous ces vols ont été effectués en classe économique et sans posséder de carte American Express.

J’ai effectué environ 140.000 kilomètres avec Air France et SkyTeam, notamment de nombreux vols extra-européens (Hong Kong, Cuba, New York, Mexico, Brésil, Colombie etc.). Après 18 mois de voyages un peu stakhanovistes et pour me récompenser de ma fidélité, Air France m’offre à peine un vol «prime» pour aller à New York à une date bloquée, pour lequel je devrais, en outre, acquitter un supplément de 200 Euros.

En résumé, alors que j’ai effectué 140.000 kilomètres avec SkyTeam, je peux théoriquement bénéficier d’un vol «cadeau» Air France de 12.000 kilomètres, soit moins de 10% des kilomètres effectivement effectués. En outre, Air France me fera néanmoins payer 200 Euros de «taxes d’aéroports, de sécurité et une surchange transporteur». Comme il y a fréquemment des vols directs aller-retour Paris-New York pour environ 500 Euros sur des compagnies moins chères qu’Air France, à des dates plus flexibles, on peut considérer qu’après 35 vols SkyTeam, j’aurais un modeste cadeau d’environ 300 Euros. Comment cela est-il possible?

Un barème secret

Commençons par les conditions habituelles des programmes de fidélisation. La première caractéristique de l’alliance SkyTeam, comme de ses concurrents Star Alliance ou One World, c’est qu’elle regroupe une vingtaine de compagnies. Par exemple, Aeromexico, Alitalia, Delta, KLM et, donc, Air France.

Parmi les vols que j’ai effectués récemment, il y a des vols Alitalia, Aeromexico ou encore du brésilien GOL. Ces vols de compagnies affiliées à SkyTeam offrent un nombre de miles réduit pour les détenteurs de cartes Air France (c’est moins vrai chez Lufthansa pour le programme StarAlliance et chez American Airlines pour le programme OneWorld, dont je suis également membre).

Il y a ensuite le problème des miles et des statuts, qui sont un peu comme les torchons et les serviettes– ils ne se mélangent pas. Certains des vols que j’ai effectués donnent des miles mais pas de «vols qualifiants». D’autres billets Air France bon marché n’offrent quant à eux aucun miles (ce qui n’est jamais le cas, par exemple, chez British Airways). On peut donc avoir gagné beaucoup de miles mais être rétrogradé de statut.

Air France a en effet créé depuis 2009 une magnifique entourloupe, celle du dédoublement des «Miles Statuts» et des «Vols qualifiants». En gros, vous pouvez voyager mais sans faire évoluer votre grat (Silver, Gold ou Platinum). Le statut est déterminé par le nombre de vols effectués sur douze mois, plus seulement par les distances réellement parcourues grâce à cette astuce qui permet à Air France d’éviter de trop vous récompenser – et d’éviter surtout qu’un trop grand nombre de clients rejoignent l’élite. (Si les seuils d’éligibilité varient en fonction du statut du voyageur, remarquons qu’ils varient également en fonction de l’adresse où il réside: un client d’Air France aux États-Unis a besoin de moins de Miles qu’un client vivant à Paris pour atteindre le statut supérieur!).

Il y a plus. Les récompenses en nombre de Miles varient également de un à dix en fonction du prix du billet d’avion payé. Interrogée, l’UFC-Que Choisir qui a tenté d’y voir clair dans cette complexité, s’est heurté à l’incroyable opacité de ces programmes de fidélité. 

«Les règles semblent complexes. Et il est difficile de trouver les conditions générales à jour qui encadrent le fonctionnement et l'utilisation de ces cartes. Et pour ne rien arranger, les règles applicables à ces programmes de fidélité sont modifiées à intervalles réguliers, sans que les explications fournies soient toujours très compréhensibles», regrette Arnaud de Blauwe, le rédacteur-en-chef-adjoint du mensuel Que Choisir. 

On peut bien sûr, comme je l’ai fait, lire minutieusement le contrat Flying Blue: mais il comporte une dizaine de pages dans une police minuscule! Et sa lecture n’apporte guère de réponses aux questions pratiques que se posent les voyageurs.

Tous les vols ne sont donc pas récompensés de la même manière et le barème varie grandement selon qui vous êtes. Un vol Paris-New York m’a apporté 910 Miles; un vol Paris-Le Caire, qui est à presque 2.000 kilomètres de moins, 1 496 Miles. Cherchez l’erreur.

Interrogé cette semaine sur ce dossier, le service de presse de la compagnie justifie ainsi le décalage: 

«Sur Air France, la plupart des tarifs sont éligibles à l'accumulation de miles. Ceux qui ne le sont pas sont les tarifs les plus bas comme les prix MiNi par exemple. A contrario, plus le tarif est élevé, plus le montant en miles est important. Mais rien à voir avec la destination ou la ligne par exemple.»

En fin de compte, le client d’Air France ne dispose d’aucune règle précise ou rationnelle pour comprendre l’attribution de ses Miles. Celle-ci dépend de tellement de critères qu’il est impossible de calculer à l’avance même si on peut recourir à un calculateur, actuellement en rodage.

La plupart des billets Air France permettent d’obtenir seulement entre 10 et 50% des miles promis

D’une manière générale, je constate que la plupart des billets Air France permettent d’obtenir seulement entre 10 et 50% des miles promis, sauf si l’on achète un billet modifiable ou «flexible» au prix fort, ou que l’on voyage en Business Class ou en First Class. (Un billet en First Class peut rapporter 300% du nombre de miles effectué; un billet Business Class international entre 125 et 175%).

Mais cette disproportion est encore accentuée par un second mécanisme d’inégalité dit de «Bonus», qui est une sorte de Robin des Bois inversé: il prend aux pauvres pour primer les riches! Air France réduit donc considérablement d’un côté le nombre de Miles pour certains vols effectués, mais en ajoute pour d’autres, sous forme de «Bonus». Allez comprendre! La raison est simple: si vous êtes le commun des mortels, Air France vous enlève des Miles; si vous êtes un voyageur Gold, la compagnie vous en ajoute. Comme le disait un vieux slogan de la compagnie: 

«Le Ciel c’est Air France.»

Interrogé, le service de presse d’Air France tente de m’expliquer cette astuce qui vise à «récompenser les voyageurs les plus fréquents de leur fidélité. Plus ils voyagent sur [nos] compagnies, plus on les encourage à le faire en leur créditant des Miles.»

Comment cela? Il existe en réalité six statuts de membres. Tout le monde n’est donc pas logé à la même enseigne. Le statut «Ivory» considéré comme non «élite» ne sert à rien et, en tout cas, ne rapporte aucun miles supplémentaires (il n’offre aucun «bonus»). Vous pouvez tout de suite jeter votre carte à la poubelle.

Pour les autres statuts, la règle de calcul, complexe, est la suivante, toujours selon les indications que m’apporte le service de presse d’Air France: 

«Un Bonus de miles Spécial Elite 50 % [correspond aux] miles gagnés sur le vol multiplié par 1,5 pour les adhérents Silver; un Bonus de miles Spécial Elite 75 % multiplié par 1,75 pour les adhérents Gold; un Bonus de 100 multiplié par 2 pour les adhérents Platinum, C2000 & Skipper.»

Pour le dire plus simplement: si vous êtes en classe économique et probablement avec un statut Ivory ou Silver, vous obtenez des centimètres; si vous voyagez en Business, avec un statut Gold ou Platinum, vous pouvez faire le tour de la planète!

Des miles «valables à vie» subrepticement annulés

Longtemps, les clients d’Air France ne comprenaient pas ce qui se passait avec leurs Miles. Aujourd’hui, ils commencent à se plaindre, par courrier, ou sur les réseaux sociaux, de ces conditions jugées opaques ou peu généreuses. L’UFC-Que Choisir témoigne de lettres reçues en ce sens. Et note en particulier que des clients dénoncent l’annulation pure et simple de leurs Miles. Car la durée de vie des Miles a été unilatéralement réduite. On peut lire partout, sur le site de la compagnie, que les Miles sont «valables à vie». En fait, ils disparaissent si vous n’avez pas effectué un «vol qualifiant» au moins tous les 20 mois, au lieu de 36 mois auparavant. En outre, vous pouvez même avoir volé sur Air France, depuis le durcissement du programme de fidélisation en 2009, sans pour autant obtenir de vols «qualifiants»… Vos miles accumulés disparaissent alors!  

D’autres problèmes existent. En étudiant minutieusement pour cet article mon relevé de compte, j’ai constaté que certains vols européens effectués n’avaient pas été crédités. Le client peut toujours les régulariser a posteriori sur le site, mais il oublie souvent de le faire car il faut avoir conservé les cartes d’embarquements. S’il se trompe aussi de numéro FlyingBlue –numéro à 10 chiffres écrits en tous petits sur la carte– lors de sa réservation, ou de son check-in, le site d’Air France ne le prévient même pas de l’utilisation d’un numéro erroné. Ca fait toujours ça de miles épargnés pour la compagnie!

Une «prime» cadeau de pacotille

Mais Air France gruge ses clients par les deux bouts et utiliser ses Miles est plus difficile encore que de les obtenir.

Les vols «Prime», ainsi appelés car ils sont offerts par Air France, sont calculés au prix fort. Pour aller par exemple à New York le 15 juillet prochain, en aller-simple et en classe économique, il vous en coûtera 25.000 miles et 130 Euros; pour revenir le 1er août, 25.000 miles et 70 Euros. Mais ces dates sont les plus économiques: vous devez débourser près de 85.000 miles aller-retour (et 200 Euros pour taxes et frais) si vous partez le 18 juillet et revenez le 30 juillet par exemple.

Vous voulez aller à Cuba? Il vous en coûtera à l’aller entre 60.000 et 90.000 miles le 15 ou le 24 juillet (avec 104 ou 242 Euros de surtaxes) et encore 90.000 miles au retour le 30 juillet (et 72 Euros de surtaxe). Au total, l’Aller-Retour pour Cuba vous coûtera quand même entre 150.000 et 180.000 miles et au moins 200 Euros de surtaxes! (Une offre à 110.000 miles existe mais elle est limitée à un nombre très restreint de vols).

Fréquemment, les billets Air France «offerts» coûtent plus chers que les billets que l’on peut acheter sur un site comme Expédia

Fréquemment, les billets Air France «offerts» coûtent donc plus chers que les billets que l’on peut acheter sur un site comme Expédia. Sachant qu’il existe fréquemment des vols pour Cuba à 700 Euros, l’avantage d’avoir une carte de fidélité Air France devient très discutable.

A ces faux-cadeaux en miles s’ajoute une autre raison qui rend inutile l’accumulation des miles: les conditions difficiles dans l’attribution et la réservation des billets. Vouloir bénéficier d’un vol «gratuit», c’est commencer un parcours du combattant où l’on perd en souplesse sur les vols accessibles et où on est obligé –bien sûr– de réserver sur le site de la compagnie. Air France a mis en œuvre des quotas de billets «primes» par destination qui sont autant de punitions de ses clients. La disponibilité est très réduite. Peu de vols sont disponibles; peu de vols sont éligibles. Souvent, un seul horaire est proposé pour une utilisation de miles normale; les autres horaires coûtent deux à trois fois plus de miles.

Encore faut-il aussi pouvoir réserver... Parfois, un billet proposé par Air France en «prime» disparaît, après une vingtaine de minutes d’efforts, au moment de terminer la réservation. Le site se bloque aussi, régulièrement.  

Le gag des taxes d’aéroports et autres surcharges

Ce que les clients d’Air France acceptent le moins c’est la surtaxe qu’ils doivent payer lorsqu’ils obtiennent un billet «gratuit». Car même lorsque le billet est offert par Air France, il en coûte quand même de 60 à 300 Euros en «taxes d’aéroports, de sécurité et une partie de la surcharge transporteur», non-couvertes par les miles-Prime, et qui doivent donc être payées par les clients au moment de la réservation.       

En outre, lorsqu’un client obtient un vol «gratuit» il perd généralement son statut élite et il lui faut deux ou trois ans pour le récupérer… C’est la raison qui m’a fait perdre mon statut «Gold» alors que je continue à voyager avec SkyTeam chaque semaine. Tout en voyageant de plus en plus, j’ai ainsi été rétrogradé.

D’une manière générale, les conditions économiques difficiles des compagnies aériennes expliquent ces réductions drastiques des avantages pour les clients d’Air France. La compagnie affronte le low-cost (dont les programmes de fidélité sont presque inexistants et rapportent encore moins d’avantages) ou les services de réservation en ligne et les comparateurs de prix, comme Expedia ou Kayak. (Signalons que certains sites, comme le français Lastminute.com ou le suisse BravoFly utilisent, eux aussi, de vrais entourloupes en offrant par exemple des prix très avantageux sur les vols Air France pour attirer les internautes, avant de les augmenter d’une centaine d’Euros s’ils règlent leur billet… avec une carte Visa internationale!).

Chez Air France, la direction cherche à faire des réductions partout, y compris sur le dos de ses clients. Le programme de Miles correspondant à un manque à gagner important pour la compagnie (759 millions d’Euros ont été portés au passif de Air France pour 2014): elle a donc choisi de le sacrifier. Et ça marche, puisque le coût de ce programme aurait baissé de presque 18% en trois ans, en dépit de l’augmentation du trafic. Et puisque ce sont environ 20% des clients qui font 80% du chiffre d’affaire de la compagnie, les grands voyageurs en Business Class s’en sortent bien. Ils sont largement privilégies et bénéficient à plein de ces programmes de fidélité.

Les autres clients, en revanche, n’ont plus rien à y gagner. Sur les forums spécialisés, notamment sur Trip Advisor, les voyageurs fidèles d’Air France sont nombreux à l’avoir constaté et à critiquer ces programmes. La compagnie étant juge et partie, elle peut changer les règles de manière discrétionnaire. Et ne répond guère aux critiques.

Dans l’hexagone, Air France a un certain monopole sur de nombreuses destinations. Les clients sont condamnés à avoir recours à ses services. Cela explique que le programme de fidélité d’Air France soit devenu aujourd’hui l’un des moins intéressants du marché. Il n’est utile que pour les voyageurs en Business Class ou en First et n’a un réel intérêt que si on dispose, parallèlement –et en plus–, d’une carte Air France American Express. Pour ceux qui voyagent fréquemment aux frais de leur entreprise, il reste également intéressant. Dans ces cas-là – mais dans ce cas-là seulement –, les voyageurs réguliers sont réellement récompensés.

«Le programme de fidélisation Flying Blue est très apprécié de nos clients et nous avons reçu de nombreux prix qui le montrent bien», me fait savoir le service de presse d’Air France. Un point de vue nuancé par une enquête de satisfaction des compagnies aériennes européennes de l’UFC-Que Choisir en 2014 qui montre que les titulaires de cartes de fidélité ne sont pas plus satisfaits que les clients qui n’en n’ont pas. Normal, elles ne servent plus à rien.

Sur les forums, des internautes vigilants recommandent d’accumuler les miles sur une autre compagnie SkyTeam, par exemple Delta dont le programme SkyMiles est beaucoup plus généreux (on peut voyager sur Air France et placer ses miles sur le programme d’une autre compagnie Flying Blue). «Flying Blue est en fait le programme le moins compétitif sur le nombre de Miles pour les billets-Prime», conclut-on à l’UFC Que Choisir.

«Cette différence entre la promesse et la réalité des cadeaux offerts n'est pas propre aux programmes de fidélité mis en place par les compagnies aériennes. La remarque s'applique à d'autres secteurs, notamment celui de la grande distribution. C'est avant tout un outil marketing. In fine, il doit rapporter et non coûter à celui qui lance un tel programme, ce ne doit pas être un poste de perte mais un poste de profits!», conclut Arnaud de Blauwe, du mensuel Que Choisir.

Cet été, si vous ne voyagez pas en Business class, inutile de sortir votre carte Air France lors de votre prochain embarquement.

1 — Cette analyse porte sur les vols suivants effectués sur Air France au départ de Paris entre janvier 2014 et juin 2015 en Aller-Retour ou en Aller-Simple : AR La Havane ; AR New York ; AR New Delhi ; 2 AR Hong Kong ; AS Israel ; AR Le Caire ; AR Madrid ; AS Mexico ; AS Colombie ; AR Mexico ; AR Italie ; 3 AR Tunis ; AR Berlin. S’y ajoutent une dizaine de vols SkyTeam sur les compagnies Alitalia, Aeromexico et GOL. Quelques vols effectués n’ont pas été crédités. Retourner à l'article

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