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Un projet de permis d'exercer pour les prostituées très critiqué en Allemagne

À partir de 2016, les travailleurs du sexe devront, pour exercer leur profession, disposer d’un permis.

<a href="https://www.flickr.com/photos/ncsphotography/4172947887/in/photolist-7mKs2n-4px5E1-89ugAG-tDVdi-6yyCHP-6yCKNN-6yCMPN-6Qskib-4Dqexn-4X2C9D-4nKvFd-6yyEfp-c8L7T9-6yyD6z-M1a4h">Street-art représentant des prostituées à Christchurch, en Nouvelle-Zélande</a> | NCSphotography via Flickr CC <a href="https://creativecommons.org/licenses/by/2.0/">License by</a>
Street-art représentant des prostituées à Christchurch, en Nouvelle-Zélande | NCSphotography via Flickr CC License by

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur Die Tageszeitung, Dona Carmen, BVÖGD

En Allemagne, où la prostitution est légale, une nouvelle loi sur la prostitution visant à mieux protéger les prostituées face aux réseaux de proxénétisme et aux maladies sexuellement transmissibles doit entrer en vigueur en 2016. Ce projet de loi prévoit notamment de rendre obligatoire le port du préservatif, d'interdire les propriétaires de maisons closes de proposer des forfaits à leurs clients et d'instaurer un permis d'exercer pour les prostituées, rapporte le quotidien Die Tageszeitung.

Ce dernier point est particulièrement critiqué par les travailleuses du sexe exerçant en Allemagne, à l'instar de l'association de prostituées Doña Carmen, qui manifestait encore samedi 13 juin dans les rues de Francfort pour réclamer l'abandon du projet de loi et qui a recueilli le soutien du Parti pirate et du parti de gauche radicale Die Linke. Comme l'association l'explique dans un communiqué de presse mis en ligne sur son internet «le terme de protection n'est en fait qu'un nom de code désignant un renforcement des contrôles et de la surveillance».

Ce permis d'exercer devra être renouvelé tous les deux ans auprès de la police ou de l'administration municipale à la suite d'un entretien, comme le stipule le projet de loi:

«Lors de l'inscription, s’il apparaît que la personne ne dipose pas des capacités de discernement requises pour assurer sa protection ou bien est exploitée par un tiers, les autorités compétentes doivent prendre les dispositions nécessaires pour assurer la protection de la personne.»

Stigmatisation

Juanita Rosina Henning, membre de l'association Doña Carmen, compare cette formalité aux «Idiotentests» ("tests pour les nuls"), surnom donné en Allemagne aux tests psychotechniques destinés aux conducteurs dont le permis a été suspendu pour conduite en état d'ivresse:

«Cela revient à stigmatiser toute une profession. Les travailleuses du sexe sont assimiliées à des simples d'esprit.»

Les travailleuses du sexe sont assimiliées à des simples d'esprit

Juanita Rosina Henning, membre de l'association de prostituées Doña Carmen

Le projet de loi prévoit également de rendre obligatoire la consultation une fois par an d'un médecin excerçant dans un établissement public, sans quoi le permis d'exercer ne pourra pas être délivré. Cet aspect est également critiqué par les professionnels de la santé réunis au sein de la fédération BVÖGD, qui estiment que ces consultations doivent rester anonymes et non obligatoires, comme il l'expliquent sur leur site internet:

«Les services de santé publique atteignent ainsi un grand nombre de personnes qui ont de grandes difficultés à prendre contact avec un médecin (entre autres à cause d'une absence de couverture sociale, d'un statut incertain au regard du séjour sur le territoire, de problèmes concernant la langue, de la peur d'être discriminé).»

Une étude publiée par l'organisme allemand KOK (Cercle de coordination contre le trafic d'êtres humains), que rapportait Die Tageszeitung en février 2015, estime d'ailleurs que ce projet de loi est contraire à la loi allemande sur la protection des données personnelles. Bärbel Heide Uhl, co-autrice de l'étude, argumentait ainsi:

«Jamais nous n'enregistrerions d'autres groupes tels que les lesbiennes et les gays dans une base de données pour les protéger des attaques homophobes. Ça n'a rien à voir avec de l'assistance, cela ne fait que renforcer la stigmatisation.»

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