La presse d'État vénézuélienne adore citer Jim Luers. Selon son compte Twitter, Luers est un «porte-parole de la Maison Blanche et agent du FBI» qui aime «la politique étrangère, les relations inter-américaines, la satire et le basket». Il tweete beaucoup en espagnol et, contrairement à ses collègues de l'administration Obama, il soutient ardemment le régime de Nicolás Maduro à Caracas.
Jim Luers s'est fait connaître en avril dernier lorsque le journal espagnol ABC a révélé que le président de l'assemblée nationale du Venezuela, Diosdado Cabello, était soupçonné d'être lié à au trafic de drogue international. Un article de l'hebdomadaire de Caracas Quinto Día a alors rétorqué que ces accusations n'étaient que des calomnies. D'ailleurs, selon le journal, un porte-parole de la Maison Blanche nommé Jim Luers avait confirmé que tout cela était «complètement faux».
À partir de là, la citation de Luers a été reprise par le ministre de l'Éducation, ainsi que par plusieurs chaînes de télévision, dont VTV et AVN, qui ont titré sur le soutien de cet officiel américain.
Les médias indépendants qui ont rapporté les soupçons contre Cabello, le numéro 2 du régime, ont été poursuivis pour diffamation. Mais un des journaux condamnés, El Nacional, a tout de même voulu retrouver la trace de ce mystérieux Américain. Après plusieurs coups de fils, ils sont arrivés à la conclusion que Jim Luers n'existait pas.
Propagande
Les propagandistes vénézuéliens n'avaient d'ailleurs pas pris de grandes précautions. Le choix de nom pour le compte Twitter @RealJimLuers –le vrai Jim Luers– était assez douteux, sans parler de la photo de Jim Luers, qui ressemble exactement à Jack Lew, le secrétaire du Trésor des États-Unis.
Le Miami Herald explique que Luers est probablement une invention des éditeurs du journal Quinto Dia, qui a cité cette source américaine dans au moins treize articles. Avant d'être porte-parole de la Maison Blanche et agent du FBI, Luers avait été «enquêteur au département du Trésor» et «analyste pour Diálogo Internacional», une organisation qui n'existe pas.
Malgré l'amateurisme, les trolls vénézuéliens ont l'air de bien s'amuser. Depuis la parution de l'article de Buzzfeed, Luers répond à toutes les critiques sur Twitter et conteste être une invention vénézuélienne.
The Media-Industrial Complex swings into action to continue its campaign of slander against me. @BuzzFeed https://t.co/eWkFJ4jh0l
— Jim Luers (@RealJimLuers) June 10, 2015
«Le complexe médiatico-industriel déclenche de nouveau sa campagne de calomnie contre moi.»
Demonstraré con documentos en mano la falacia de la que soy víctima! #NoPasaran http://t.co/qGhDxpmABn
— Jim Luers (@RealJimLuers) June 10, 2015
«Je démontrerai, documents à l'appui, que je suis bien victime d'un mensonge!»