France

Hollande, Sarkozy: on n’en peut plus, on n’en veut plus

La grande majorité des électeurs ne veulent ni de Hollande ni de Sarkozy et, pourtant, selon toute probabilité, l'un ou l'autre sera élu à l'Elysée en 2017. Il serait peut-être temps de rappeler à nos deux héros leurs engagements passés de débarrasser le plancher en cas de désaveu...

Sur le perron de l'Elysée, le 8 janvier 2015. REUTERS/Philippe Wojazer
Sur le perron de l'Elysée, le 8 janvier 2015. REUTERS/Philippe Wojazer

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Voyons les choses en face: au jour d’aujourd’hui, selon toute probabilité, la personnalité élue à l’Elysée au printemps 2017 se nommera François Hollande ou Nicolas Sarkozy.

Cela ne signifie pas que les deux finalistes de la présidentielle de 2012 se retrouveront face à face au tour décisif, tant il est vrai que Marine Le Pen est sur la rampe d’une qualification pour le scrutin final. Mais une forme de match retour se profile pour le plus grand désespoir d’une large majorité de l’électorat.

Deux sexagénaires roués...

Les deux sexagénaires roués que sont Hollande et Sarkozy s’emploie à bétonner leur camp. La nouvelle formation de droite née ce week-end aurait pu s’appeler «Parti sarkozyste» (PS) dés lors que cette machine est destinée à replacer son président sur orbite élyséenne. Les compromis internes auxquels s’astreint Sarkozy chez «Les Républicains» (LR) sont compensés par le sectarisme débridé de ses militants.

Tout cela augure mal de la large et loyale primaire à droite dans laquelle Alain Juppé place tous ses espoirs. L’implantation de ce dispositif de participation démocratique sera, au demeurant, plus délicate de ce côté-ci de l’échiquier. La culture politique française fait qu’on se déclare publiquement moins facilement «de droite» que «de gauche». Or, une primaire massive organisée par LR supposerait «l’outing» politique d’une partie notable de l’électorat de ce parti.

A gauche, c’est le président Hollande qui met en place un dispositif destiné à assurer sa survie présidentielle après l’échéance de 2017. Le congrès de Poitiers, qui se tient ce week-end, lui offrira un PS assagi avec une franche majorité soutenant l’essentiel de ses choix politiques.

La nouvelle formation de droite née ce week-end aurait pu s’appeler «Parti Sarkozyste» (PS)

A en croire les échotiers de l’Elysée, le chef de l’Etat serait d’ores et déjà en campagne électorale! Une impatience pour le moins étrange si l’on se souvient qu’en avril 2014, le même homme assurait n’avoir «aucune raison d’être candidat» en 2017 si le chômage ne baissait pas. Or le nombre de sans emplois, malgré une reprise économique frémissante, vient encore de battre un nouveau record.

La tranquillité d’esprit de Hollande provient de l’absence d’alternative sérieuse parmi les socialistes. Martine Aubry ne veut plus descendre dans l’arène. Manuel Valls, seulement moins impopulaire que le président, préfère apparemment passer son tour en 2017, sachant que ce cru ne sera pas fameux pour la gauche. Le Premier ministre est, par ailleurs, encore plus éloigné du centre de gravité du PS que Hollande.

Quant aux personnalités de la gauche du PS, personne n’est en situation de relever le gant. Arnaud Montebourg tente vaillamment de révéler ses talents d’entrepreneur et Benoît Hamon vient de déclarer que, statuts ou pas, le parti socialiste ne devrait pas organiser de primaire si le président sortant souhaitait se représenter.

... dont les Français ne veulent pas

Voyons encore les choses en face: la grande majorité des électeurs ne veulent ni de Hollande ni de Sarkozy. La cour élyséenne se félicite que le monarque républicain ne soit plus sifflé par la plèbe lors de ses déplacements. Elle veut y voir les prémices d’un retour en grâce que rien de sérieux ne laisse pourtant présager.

16%

Cote de confiance de François Hollande en mai 2015. Baromètre TNS-Sofres

Le vingt-quatrième président de la République française demeure exceptionnellement impopulaire. Au dernier baromètre TNS-Sofres, seulement 16% des personnes interrogées lui faisaient «confiance pour résoudre les problèmes qui se posent en France actuellement». Un chiffre à peine supérieur à son plus mauvais score (13%) enregistré en novembre 2014. Le petit rebond provoqué par le climat d’unité nationale consécutif aux attentats de janvier dernier (23% en février) a disparu.

Le baromètre Ifop confirme ces tendances. Seulement 21% des sondés sont «satisfaits» de Hollande comme président de la République, contre 78% de «mécontents». La légère amélioration du climat de confiance économique ne dope pas la cote présidentielle.

Avec une base de soutien aussi étroite, on a du mal à imaginer par quel miracle l’habile Hollande pourrait être réélu. Les Français, en tous cas, ne lui conseillent pas de s’y risquer. Pas moins des trois quarts d’entre eux (77%) ne souhaitent pas qu’il se représente, à en croire un sondage Odoxa. Une opinion majoritaire, y compris à gauche.

32%

Cote d'avenir de Nicolas Sarkozy en mai 2015. Baromètre TNS-Sofres

Le cas de Sarkozy n’est guère plus brillant. Sa «cote d’avenir» TNS-Sofres n’a pas profité de son retour à la politique active ni de sa prise de possession de l’UMP. Seulement un tiers des électeurs (32% en mai) espèrent «lui voir jouer un rôle important dans les mois et les années à venir». Ce n’est pas glorieux pour le chef d’un parti d’opposition qui vient de multiplier les succès électoraux.

La personnalité de Sarkozy, qui ne fait rien pour s’amender, suscite toujours un vif rejet dans l’opinion. En février dernier, d’après BVA, 77% des Français souhaitaient qu’il ne se présente pas à l’élection présidentielle de 2017, contre 22% d’opinions inverses. Pis encore, la proportion de sympathisants de l’UMP qui veulent que Sarkozy porte leurs couleurs à cette bataille a chuté à 57% d’entre eux.

Respecter ses promesses

Si la prochaine présidentielle devait voir Hollande et Sarkozy incarner gauche et droite de gouvernement, la campagne serait à coup sûr dominée par une forme déplaisante de publicité négative. Le président d’hier et celui d’aujourd’hui s’acharneraient surtout à démontrer que l’autre est pire que lui-même. A l’anti-sarkozysme de 2012, que la gauche s’efforcerait de ranimer, correspondrait un anti-hollandisme virulent en 2017.

Le président d’hier et celui d’aujourd’hui s’acharneront en 2017 à démontrer que l’autre est pire que lui-même

Pauvres de nous. Il serait peut-être temps de rappeler à nos deux héros leurs engagements passés de débarrasser le plancher en cas de désaveu. «Vous n’entendrez plus parler de moi si je suis battu», avait confié Sarkozy au cours de la campagne présidentielle de 2012. Il s’était même publiquement engagé à «arrêter la politique» s’il était battu. «J’aurais fait une très belle vie politique», disait-il fort à propos.

De son côté, Hollande a répété à plusieurs reprises qu’il ne se représenterait pas si le chômage ne baissait pas. Le président s’est bien gardé de fixer un seuil à cette baisse et il est possible que, emplois aidés aidant, la fameuse courbe de Pôle emploi s’inverse enfin dans le bon sens en fin de quinquennat.

Mais qui pourra sérieusement crier alors victoire et justifier ainsi une nouvelle candidature? La sagesse commanderait de s’effacer. Après tout, Hollande comme Sarkozy jouent les premiers rôles depuis déjà une vingtaine d’années. L’un est devenu premier secrétaire du PS en 1997, l’autre a commencé sa carrière ministérielle en 1993.

Nos deux champions ont été chefs de leur partis et présidents de la République, ce qui est généralement considéré comme le stade suprême d’une carrière politique. Qu’ils veuillent bien maintenant avoir la délicatesse de nous laisser en paix. Merci.

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