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L’attentat de dimanche 3 mai, visant un concours de caricatures de Mahomet organisé à Garland, au Texas, a été un échec pour les djihadistes (seuls les deux terroristes ont été tués), mais il s’avère plus inquiétant que la plupart des autres attentats déjoués ces dernières années aux États-Unis. Dans la plupart des cas, il s’agissait de personnages considérés «à risque», dont les projets djihadistes étaient plus ou moins encouragés par des agents du FBI, jusqu’à ce qu’ils aient assez de preuves pour les arrêter. Les deux auteurs de l’attaque de Garland, en revanche, alors même que l’un d’eux avait déjà été suspecté d’être en lien avec le terrorisme international, semblent avoir préparé l’attentat seuls.
Armés de fusils d’assaut et vêtus de gilets pare-balles, Elton Simpson et Nadir Soofi auraient pu faire un grand nombre de victimes s’ils n’avaient choisi une cible aussi bien gardée: compte tenu du caractère délibérément provocateur de l’événement, les autorités étaient prêtes à réagir en cas de problème et une équipe du SWAT (unité d’assaut de la police américaine) avait été placée à proximité.
Mardi 5 mai, Daech a revendiqué sa responsabilité dans l’attentat. C’est la première fois que le groupe revendique une action sur le sol américain, mais nous aurions tort de prendre cela comme argent comptant. Tout d’abord, il n’est pas inhabituel que des groupes terroristes revendiquent après les faits des attentats dont ils ignoraient tout à l’avance. D’autre part, en cette ère de terrorisme inspiré par Internet, la notion de responsabilité est devenue relativement floue.
«Soldats du califat»
Sur sa radio officielle, l’État islamique a parlé de l’attaque en disant qu’elle avait été menée par «deux soldats du califat» et, dans un message précédant l’attaque, l’un des terroristes avait affirmé prêter allégeance au «commandeur des croyants», sans doute en référence au leader de Daech, Abou Bakr al-Baghdadi. Néanmoins, on ignore encore si les terroristes étaient en relation ou non avec des djihadistes en Syrie ou en Irak, et l’on sait encore moins si l’État islamique a joué un rôle dans l’organisation de l’attaque. Le scénario le plus probable est que, comme les attentats de Paris en janvier et comme celui de Copenhague contre un centre culturel en février, c’était l’œuvre de loups solitaires qui avaient décidé seuls qu’ils agissaient au nom du groupe.
Loups solitaires qui ont décidé seuls qu'ils agissaient au nom de Daech
L’attentat avorté de Garland semble être une preuve de plus que l’État islamique est en train de remplacer al-Qaida et al-Shabaab dans le cœur des djihadistes occidentaux. L’un des deux terroristes, Elton Simpson, de Phoenix, en Arizona, était déjà apparu sur le radar des autorités américaines en 2010 lorsqu’il avait mentionné ses projets d’aller combattre les mécréants en Somalie à un informateur de la police. Alors que les autorités ont collecté plus de 1.500 heures de conversations auprès de Simpson, il n’a fini par être condamné que pour un délit relativement mineur –mentir à un agent fédéral–, pour lequel il a écopé d’une peine avec libération conditionnelle, assortie d’une mise à l’épreuve de trois ans. Il est possible qu’il se soit tourné vers Daech durant cet intervalle.
Il ne faut pas croire que la fusillade de Garland signifie que l’État islamique est désormais capable de commettre des attentats sur le sol américain. Mais, si les auteurs ont effectivement été inspirés par Daech au point de passer à l’acte, une étape inquiétante a été franchie.