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Les réseaux sociaux nous apprennent à copier, pas à apprendre

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Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur Journal of Royal Society Interface

Les réseaux sociaux peuvent nous aider à être mieux informés, mais ils peuvent aussi nous rendre plus moutonniers. Telle est la conclusion d’une étude récemment publiée par quatre chercheurs, Iyad Rahwad, Dmytro Krasnoshtan, Azim Shariff et Jean-François Bonnefon, de l'université de Toulouse, dans le Journal of Royal Society Interface.

Les quatre auteurs ont mené une expérience en cinq sessions composées de vingt étudiants chacune, tous issus du département de psychologie de l’université d’Oregon.

Pour chaque session, ces étudiants étaient organisés en un réseau différent: soit tous isolés, soit tous reliés les uns aux autres, soit reliés à un nombre inégal de personnes.

Les quatre réseaux utilisés par les chercheurs

Chacun des participants devait d'abord répondre dans son coin, en 90 secondes, à une question pouvant susciter intuitivement une réponse fausse. Exemple:

«Dans un lac, on trouve un banc de nénuphars. Tous les jours, le banc voit sa taille doubler. S’il faut 48 jours pour que le banc couvre tout le lac, combien de temps faudra-t-il pour qu’il en couvre la moitié?»

(Réponse: non, ce n’est pas 24 jours, mais 47 jours)

Pendant les quatre étapes suivantes, le participant se voyait présenter les réponses des membres de son réseau, dont le nombre allait donc de 0 (pour la session des «isolés», qui devaient réfléchir par eux-mêmes tout du long) à 19. A chaque étape, les réponses des autres s'actualisaient et les participants avaient 45 secondes pour choisir de changer la leur ou non.

À chacune des cinq étapes, une bonne réponse valait 0,25 dollar. Une fois la question finie, l'étudiant s'en voyait proposer deux autres.

Résultat? Les participants qui bénéficiaient d’un réseau ont affiché des taux de bonnes réponses meilleurs que ceux qui travaillaient «à l’aveugle», le réseau «plein» étant celui qui générait généralement le plus de meilleures réponses à la fin. C’est ce que les chercheurs appellent «la contagion de résultat»: les participants ont corrigé leurs réponses en tenant compte de celles de leurs contacts.

L'évolution des réponses à une question dans le réseau «plein», de la première à la cinquième étape. Les bonnes réponses sont en bleu, les mauvaises en rouge.

En revanche, les résultats ne montrent pas de «contagion de processus», c'est à dire de progression «significative» au premier essai quand on compare la première question à la seconde ou la troisième:

«Une batte et une balle de base-ball coûtent 1,10 dollar au total. La batte coûte 1 dollar de plus que la balle. Combien coûte la balle?»

(Non, pas 10 cents, mais 5 cents).

En bref, les participants corrigent leurs réponses par mimétisme, mais n'apprennent pas la façon de trouver la bonne réponse du premier coup.

Conclusion: les réseaux sociaux peuvent aider à résoudre des problèmes mais «ne propagent pas le raisonnement analytique nécessaire pour arriver indépendamment à la bonne réponse: ils peuvent seulement propager la bonne réponse». Sur un plan plus large:

«Certains ont suggéré qu’Internet nous rend stupides, […] d’autres que ces technologies élargissent les possibilités d’apprendre, de résoudre des problèmes et de prendre des décisions mieux informées. De manière intrigante, ces résultats suggèrent que ces deux visions peuvent être justes selon le moment.»

«Le problème est que ce processus nous fait paraître plus intelligents sans nous rendre plus intelligents», a déclaré Iyad Rahwan au site Mother Nature Network. «La société dans son ensemble peut donc apparaître plus réfléchie sans que les individus le soient.»

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