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Ce qui est arrivé à ce petit chien est la chose la plus injuste de l'univers

On en sait un peu plus sur les geeks isolés derrière des usines virales comme Twenty Two Words ou ViralNova.

<a href="http://www.flickr.com/photos/13476738@N03/4714322021">PLA_26</a> / ian.m.phillips via Flickr CC <a href="http://creativecommons.org/licenses/by/2.0/deed.fr">Lisence By</a>
PLA_26 / ian.m.phillips via Flickr CC Lisence By

Temps de lecture: 3 minutes

Cet article n'a rien à voir avec les petits chiens tristes. C'était juste une manière de vous y amener. Une méthode qui s'inpire des techniques des sites qui cartonnent le plus en ce moment. Le champion du genre est le site UpWorthy. La recette: l’agrégation, c’est-à-dire l’activité de repérer des contenus à fort potentiel viral (drôles, tristes, révoltants, etc.) et de les publier, avec des titres tellement accrocheurs ou énigmatiques que votre envie de cliquer est irrésistible. 

Or des chiffres de visites et de partages sur les réseaux sociaux pour novembre 2013 publiés par The Atlantic ont révélé quelques surprises.

Bien que moins fréquenté que BuzzFeed ou le Huffington Post, sur Facebook, UpWorthy est, avec plus de 70.000 partages, très loin devant ses concurrents. Mais en deuxième place, on trouve le moins célèbre TwentyTwoWords.com. Ce site a la particularité d’être animé par une seule personne, Abraham Piper, que le magazine Esquire a interviewé.

Source: The Atlantic

Twenty Two Words («vingt-deux mots») s’appelle comme ça parce qu’au départ, tous les posts publiés contenaient exactement 22 mots… Piper a démarré l'aventure en 2008 et, en novembre 2013, 12 millions de personnes sont passées par son site, un record.

Quelques posts du site sont à l’origine de ce succès. Partagé plus de 700.000 fois, l’article d’un bébé qui fait la sieste à côté de son bébé chien fait partie de ceux-là. Autre article culte du site, sa liste de photos de chèvres coincées sur des falaises.

Mais l’homme a le triomphe modeste. Et reste prudent sur l’hégémonie actuelle de Facebook, plateforme essentielle du partage de contenus (par exemple sur Slate.fr, Facebook représente les deux tiers du partage social contre le tiers restant pour Twitter).

Pour le créateur de 22 Words, la clé du succès, c’est de «se lever tôt et de trouver le plus de super contenu que je peux».

«Quand 22 Words a eu pour la première fois assez de succès pour me faire vivre, StumbleUpon [plateforme de partage, NDLR] était la principale source de trafic. Maintenant, c’est Facebook. Qui sait ce qui viendra après?»

Quand on lui demande comment il choisit le contenu, il répond tout simplement:

«Avec mes tripes.»

La critique fréquemment faite à ces sites étant d’aspirer le contenu produit ailleurs pour en faire leur trafic, Abraham Piper explique:

«Heureusement, le trafic web n’est pas un jeu à somme nulle. Je ne détourne pas des visites d’une artiste postant ses tableaux –j’augmente ses visites (parfois spectaculairement) parce que tous ceux qui voient mon article peuvent cliquer [sur la source initiale, NDLR] et en voir plus sur son site. Et pratiquement tous ceux qui cliquent n’auraient pas visité son site ou n’en auraient peut-être même pas connu l’existence autrement.»

Autre exemple d’usine à clics gérée par une personne isolée, qui illustre plutôt le côté obscur du web: ViralNova, créé en mai 2013, a comme stricte spécialisation «tout ce qui vous fera cliquer et partager» ses articles, écrit The Wire, qui a révélé début décembre l’identité du geek derrière la chose que certains décrivent comme «le pire site de l’Internet».

Pour situer un peu l’univers éditorial, prenons un exemple concret: ViralNova a publié les photos d’une chienne morte sur la chaussée, gisant aux côtés de sa petite sœur chienne qui ne voulait pas la quitter. Le titre (élément-clé qui depuis les réseaux pousse l’internaute à cliquer pour découvrir le contenu) était:

«Je n’ai jamais rien vu d’aussi poignant de ma vie. Mais c’est absolument magnifique en même temps.»

Tout comme UpWorthy, Twenty Two Words et d'autres, ViralNova vise, pour reprendre l'analyse du Guardian, «ce que le co-fondateur d'Upworthy a appelé “le réseau en recherche de sens” pour le distinguer du “réseau qui s'ennuie au boulot” que BuzzFeed a en vue». Comprendre: une décharge d'émotions brutes, non filtrées; de la vidéo, de la photo ou du texte qui font chialer.

Selon The Wire, ce petit site qui était en bas de liste des 500.000 sites web les plus populaires au monde (classement Alexa) est à présent… 1.685e. Pas trop mal pour un mec tout seul.

Scott DeLong, jeune consultant en SEO et webdesigner dans l’Ohio, est à l’origine du projet. Véritable mercenaire du clic, DeLong s’est occupé de sites à contenu violent ou porno par le passé, expliquant par exemple qu’il souhaitait «capitaliser sur la folie croissante autour des vidéos d’accidents».

DeLong a aussi créé des sites de social gaming ou des «sites de lien», un simili YouTube et un simili MySpace, revendant extrêmement cher à chaque fois ces sites développés avec des moyens dérisoires. Le jeune consultant s’est ensuite lancé dans le business du site chrétien, plus par opportunité commerciale qu’en raison d’une crise existentielle. Il est aujourd’hui millionnaire.

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