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Le ministère japonais de la Santé suspend ses recommandations officielles sur la vaccination contre le cancer du col de l'utérus. Cette décision a été prise lundi, deux mois seulement après le lancement d’une campagne officielle incitant toutes les adolescentes âgées de 12 ans à 16 ans à bénéficier de cette vaccination prise en charge par la collectivité. Environ 9.000 nouveaux cas de cancer du col de l’utérus sont diagnostiqués chaque année au Japon chez des femmes de moins de quarante ans.
Il s'agit d'une mesure provisoire. Les autorités sanitaires japonaises vont recueillir plus de données épidémiologiques sur les effets secondaires des deux vaccins autorisés: le Gardasil et le Cervarix des laboratoires pharmaceutiques Merck et GlaxoSmithKline. Ces deux vaccins demeurent sur le marché japonais, mais le ministère incite les jeunes filles et leur famille à peser les bénéfices et les risques de cette immunisation avant d’y avoir recours. Il souligne que le vaccin n’est pas dangereux, mais que les informations communiquées au public sur les effets secondaires et les risques potentiels étaient insuffisantes au vu des faits notifiés.
Les spécialistes japonais s’intéressent notamment à une série de cas de manifestations douloureuses diffuses et inexplicables observées après l’injection vaccinale. Un lien de causalité avec le vaccin ne semble pouvoir être exclu, mais des travaux épidémiologiques sont nécessaires avant de pouvoir conclure.
Jusqu’à présent, les effets indésirables les plus fréquemment observés avec ces vaccins étaient des réactions au site d'injection (77% des personnes vaccinées dans les cinq jours suivant chaque dose vaccinale) et des céphalées (16%). Ces effets indésirables étaient en général d'intensité légère ou modérée. Des syncopes ont parfois aussi été associées à une chute et/ou à des «mouvements tonico-cloniques» ce qui nécessite une surveillance attentive des personnes vaccinées pendant environ quinze minutes après administration de chacune des trois doses vaccinales.
Et en France?
Ce vaccin est efficace contre l’infection par différents types de papillomavirus humains (human papillomavirus ou HPV) directement impliqués dans le cancer du col de l'utérus ainsi que dans différents types de lésions génitales précancéreuses. La démonstration de cette efficacité à l’échelon collectif vient d’être apportée en Australie qui depuis cinq ans a engagé ans ce domaine une politique volontariste: le taux de couverture vaccinale chez les jeunes filles douze ans se situe autour de 80%. Les premiers résultats viennent d’être publiés dans le British Medical Journal.
La décision japonaise fait suite à une longue série de controverses et de polémiques concernant l’innocuité de ces deux vaccins qui ont commencé à être commercialisés et pris en charge au milieu des années 2000. Le rapport bénéfices-risques fait l’objet de contestations récurrentes au sein de la communauté médicale et scientifique. La politique publicitaire agressive d’incitation à la vaccination des deux firmes a été dénoncée et des associations anti-vaccinales mettent en garde contre la présence d’un adjuvant fait de sulfate d'hydroxyphosphate d'aluminium. A l’inverse, des voix s’élèvent pour demander que cette vaccination concerne également les garçons qui peuvent également être vecteurs des HPV et infecter leur(s) partenaire(s) sexuel(s).
En France, le vaccin (pris en charge par la collectivité depuis 2007) est indiqué chez les filles dès l’âge de 9 ans. Un bilan de son usage et de son efficacité a été établi en 2012 par la commission de transparence de la Haute autorité de santé. Les controverses concernant cette vaccination ont eu un effet direct sur l’usage qui en est fait: selon la dernière enquête de l'Institut de veille sanitaire entre 2007 et fin 2011, moins d’un tiers des jeunes filles concernées ont reçu les trois doses vaccinales recommandées.
Interrogée par Slate.fr, l’Agence nationale française de sécurité du médicament indiquait, le 18 juin, ne pas avoir été informée précisément des motifs médicaux qui avaient conduit le ministère japonais de la Santé à suspendre ses recommandations.
JYN