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Cybersquattage: vous ne risquez pas d'acheter le nom de domaine du futur pape

Le pape Benoît XVI s'apprête à envoyer un tweet depuis un iPad, le 12 décembre 2012 au Vatican. REUTERS/Osservatore Romano.
Le pape Benoît XVI s'apprête à envoyer un tweet depuis un iPad, le 12 décembre 2012 au Vatican. REUTERS/Osservatore Romano.

Temps de lecture: 3 minutes

Vous aimeriez cybersquatter au Vatican, chez le futur pape? A priori, vous partez déjà avec plusieurs longueurs de retard. Comme le notait en effet il y a deux semaines le site spécialisé Domain Name Wire après la renonciation de Benoît XVI, pendant que «les cardinaux s'envolent pour Rome, [...] les fanatiques des noms de domaine se ruent sur leurs claviers» afin de réserver ceux qui correspondent aux possibles futurs pontifes.

Juste avant la mort de Jean Paul II, Rogers Cadenhead, un auteur américain, avait déjà réservé, sous leur forme anglophone[1], six noms de domaine correspondant aux possibles papes Paul VII, Pie XIII, Léon XIV, Clément XV, Innocent XIV et... Benoît XVI.

Bingo! «J'ai eu l'impression que le cheval que j'avais choisi arrivait premier!», racontait-il alors à CNN en constatant un afflux de visites sur BenedictXVI.com après le choix de ce nom par Joseph Ratzinger. Avant d'expliquer à Reuters qu'il avait sans doute été «la seconde personne la plus excitée au monde» lors de l'annonce.

Il lui reste en poche six autres noms (achetés pour un coût total de 624 dollars –environ 480 euros– sur huit ans) qui pourraient très bien sortir bientôt du chapeau papal, puisqu'il a récupéré celui de Jean Paul III, qui était cybersquatté par un autre en 2005. Et même s'il regrette de ne pas en détenir plus, explique-t-il aujourd'hui à Slate.fr:

«J'aimerais avoir Joseph Ier, mais un autre squatteur papal en veut 1.395 dollars. Comme le père de Jésus était un charpentier, un pape Joseph Ier aurait une crédibilité working-class instantanée. C'est comme de s'appeler Pape Springsteen.»

Grégoire XVII a déjà une page active

Le nom de domaine correspondant à Benoît XVII est quant à lui la propriété d'une société de marketing texane du nom de Wide Open Media, dont le fondateur, William H. Starrett, expliquait en 2005 avoir constaté après le conclave «un afflux de trafic surprenant, sans doute parce que les gens ne sont pas très familiers des chiffres romains». Un habitant de l'Illinois possède par ailleurs Jean XXIV et y a ajouté, immédiatement après l'annonce du départ de Benoît XVI, une autre série de noms possibles mais inusités depuis longtemps (Alexandre IX, Sixte VI, Marcellus III, on vous fait grâce de l'ensemble de la liste).

Urbain IX (soit, en anglais, www.urbanix.com) affiche lui une page d'accueil promettant «bientôt quelque chose d'assez cool» et est enregistré depuis treize ans sous l'appellation... «vente de vêtements hip-hop en ligne». Un éventuel pape Nicolas V ou Martin V serait lui squatté, de manière tout à fait légitime, par des internautes qui portent ce prénom et dont le nom commence par un V.

Reste enfin un cas particulier, celui de Grégoire XVII: s'il s'agit du nom du prochain pape, ceux qui tenteront de taper GregoryXVII.com dans leur barre d'adresse seront surpris, car ils atterriront directement sur un site complotiste, The Pope In Red, affirmant que tous les papes sont des usurpateurs depuis 1958, année où le cardinal conservateur Giuseppe Siri aurait été obligé sous la contrainte de renoncer à son élection sous le nom de Grégoire XVII.

Des noms encore disponibles en français

Toutes ces cybersquatteurs n'ont pas les mêmes objectifs. Certains ont mis en vente les noms de domaine réservés. William H. Starrett, lui, a redirigé BenedictXVII.com vers... la page Amazon de son dernier livre.

Quant à Rogers Cadenhead, il a, pendant deux ans, redirigé BenedictXVI.com vers le site d'une organisation charitable, Modest Needs, mais n'a jamais formalisé d'accord avec eux, et renvoie aujourd'hui les visiteurs vers une de ses pages personnelles. «Si je gagne encore, j'utiliserai le site pour faire campagne pour être vice-pape, explique-t-il. Je veux être le bras droit juvénile du pape. J'ai 45 ans, le Saint-Siège est un des derniers endroits où je serai considéré comme jeune.»

Si la plupart des noms des futurs papes sont verrouillés «à l'international» (sans parler des noms «dérivés» comme PopeJohnPaulIII.com), beaucoup sont encore accessibles en VF: BenoitXVII.fr ou JeanPaulIII.fr, par exemple.

Mais si vous voulez vous lancer, gardez à l'esprit que l'intérêt, financier ou farcesque, est au final limité: Rogers Cadenhead a constaté que, un mois après l'élection de Benoît XVI, le trafic sur la page correspondante était devenu «infime», et le Vatican ne s'est jamais fatigué à lui réclamer la restitution du nom de domaine. Il faut dire que chaque pape a sa page individuelle sur le site de l'Etat, et on est prêt à parier que Benoît XVI, qui compte se mettre «en retrait du monde», ne compte pas lancer son site personnel après sa renonciation.

J.-M.P.

[1] www.benedictXVI.com pour Benoît XVI, www.leoXIV.com pour Léon XIV ou www.piusXIII.com pour Pie XII, par exemple. Revenir à l'article

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