Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur The Atlantic, Jezebel, slate.com, Salon
Lors d’une soirée de collecte de fonds près de San Francisco, le président Obama a commis un impair en décrivant ainsi Kamala Harris, le procureur général (ministre de la justice de l’état fédéral) de Californie :
«Elle est brillante et investie et elle a de la poigne. Et il se trouve aussi qu’elle est de loin la plus agréable à regarder de tous les procureurs généraux du pays.» Aux rires de l’assemblée, il a ajouté «allez ! c’est vrai!».
Le site web féministe Jezebel rapporte que Barack Obama s’est depuis excusé. Et pour cause, toute remarque sur le physique d’une femme de pouvoir lui porte préjudice, comme l’expose une étude de l'organisation Name it. Change it.:
«Les candidates paient le prix fort lorsqu’on parle d’elles en mettant l’accent sur leur apparence», a dit Celinda Lake, qui a mené l’étude, «même ce que nous pensions être une couverture médiatique bénigne concernant la manière dont une femme s’habille a un impact négatif sur ses votes et sur la perception que les électeurs ont d’elle, s’ils la voient comme étant dans le coup, sympathique, confiante, efficace et qualifiée. Et dans des courses électorales serrées, une couverture médiatique sexiste qui viendrait s’ajouter aux attaques auxquelles tous les candidats doivent faire face peut faire la différence entre gagner et perdre une élection.»
Le compliment a bien sûr soulevé l’indignation sur Twitter.
Between the president's basketball fail and his super awkward comment about Kamala Harris, are we sure we didn't elect Mitt Romney?
— McKay Coppins (@mckaycoppins) 4 avril 2013
«Entre la nullité de Barack Obama au basketball et sa remarque hyper gênante à propos de Kamala Harris, on est bien sûrs de ne pas avoir élu Mitt Romney?»
Obama's comment about Kamala Harris is disgraceful and really terrible for workplace equality nymag.com/daily/intellig…
— Jonathan Chait (@jonathanchait) 4 avril 2013
«La remarque d'Obama à propos de Kamala Harris est de mauvais goût et une horreur pour l'équité sur le lieu de travail.»
Garance Franke-Rukta explique dans une série d’articles pour The Atlantic, que deux systèmes affectent fondamentalement la place des femmes dans la société: le système de beauté et le système de pouvoir. Il est extrêmement délicat de s’illustrer dans les deux et si une apparence agréable peut aider une femme dans sa carrière, une femme politique sera desservie par des commentaires publics qui lui font «gagner des points dans le système de beauté».
Dans un article de 2009 pour Slate.com, Garance Franke-Rukta exposait cette théorie en argumentant qu’il est quasiment impossible de concilier tous les archétypes qui sont attendus de la féminité. Pour être crédibles, les femmes politiques sont contraintes pour la plupart d’adopter une stratégie de négation physique:
«Un des tous premiers défis est de trouver un style qui soit plaisamment quelconque, afin que les gens puissent se concentrer sur les mots et le travail. Il y a des consultants qui travaillent avec les femmes de pouvoir dans le monde entier afin de les aider à trouver ce juste milieu heureux. Le plus haut ces femmes se hissent, le plus de problèmes sont créés par ce besoin simultané d’effacement et de visibilité.»
Kamala Harris, qui doit faire face à ces défis au quotidien, a pardonné à Barack Obama son indélicatesse. Le président américain est d’ailleurs connu pour sa politique progressiste pour les femmes, notamment avec une loi sur l’égalité des salaires et en offrant avec Obamacare un accès facilité à la contraception. Malgré cela, des compliments dans un contexte inapproprié sont la marque d'un sexisme «bienveillant», conspué parce qu'il encourage la persistance du sexisme hostile.