Culture

Voyage au cœur d'un film qui recrée le Moscou totalitaire

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur GQ, IonCinema

C’est «le premier projet cinématographique de l’Histoire dont le réalisateur ne semble pas vouloir tirer un film»: le magazine GQ consacre un long article au tournage épique de Dau, second film du jeune réalisateur russe Ilya Khrzhanovsky, consacré à la vie d’un physicien de génie, Lev Landau, nobélisé en 1962.

L’envoyé spécial du magazine, Michael Idov, s’est rendu sur le tournage, dans la ville ukrainienne de Kharkov, après avoir entendu des rumeurs sur «le projet de film le plus cher, compliqué et accaparant de tous les temps». Il raconte en détail les quelques jours passés sur un tournage où a été recréé «à l’échelle» le Moscou des années cinquante «sur l’équivalent de deux terrains de football américain», et où travaillent environ 300 personnes pour qui il n’y a pas de plateau mais «l’Institut», pas de réalisateur mais «le Patron».

«Du Michael Bay mâtiné de Jérôme Bosch»

Là-bas, on présente des laissez-passer et on utilise des vieux billets en roubles, et on interdit l’utilisation de mots qui n’existaient pas à l’époque comme «effets spéciaux» ou «Facebook». Ce qui a à la fois développé «une robuste culture de la dénonciation» et un langage codé: au lieu de dire «Googler», on dit «Pravdaer».

Les acteurs, eux, accomplissent le travail quotidien de leurs personnages (l’actrice principale a d’ailleurs passé un an, avant le tournage, dans une usine de chocolat et un hôpital) et sont filmés sous tous les angles par des mini-caméras cachées dans toutes les pièces, sur le modèle du «panoptique».

Des méthodes qui ne font bien sûr pas l’unanimité. Un ancien collaborateur du film l’a décrit comme «du quasi-esclavage», tandis qu’un autre a noté:

«Travailler ici, c’est comme être ce type qui voulait être tué et mangé et trouver un maniaque qui veut vous tuer et vous manger. Réciprocité parfaite.»

Le reporter décrit lui comment il a été gagné par un genre de syndrome de Stockholm: le troisième jour, il soutient chaudement la proposition du réalisateur d’expulser du tournage le photographe de GQ, qui voulait faire «poser» les acteurs. Il raconte aussi avoir visionné des rushes, dont une scène qu’il compare à du «Michael Bay mâtiné de Jérôme Bosch».

«Pouvoir de virer n'importe qui»

Toujours selon le magazine américain, Ilya Khrzhanovsky a obtenu de ses producteurs «le final cut, pas de date limite et le pouvoir de virer n’importe qui sans explication».

Le film est une coproduction entre plusieurs pays européens dont, pour la France, la Société parisienne de production et Arte Cinéma. Il fait également partie des dix coproductions européennes à avoir reçu une aide du fonds Eurimages en 2008. Il a été listé parmi les cent films les plus attendus de 2011 par le site IonCinema, qui s’attend désormais plutôt à le voir arriver en 2013.

En 2006, Dau avait été retenu pour l’Atelier du Festival de Cannes, une sélection de projets que la manifestation aide à se monter en mettant leurs auteurs en contact avec des professionnels.

La note d’intention annonçait à l’époque un tournage de «sept semaines» et présentait le film comme «une histoire sur la liberté, et avant tout sur la liberté intime, personnelle; une histoire sur les désirs secrets que l'on s'autorise ou non à assouvir».

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