Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur The Telegraph, The Philadelphia Inquirer
Passé le moment d'euphorie sur les marchés financiers après l'annonce jeudi 27 octobre au petit matin de l'accord finalement trouvé à Bruxelles pour régler la crise grecque et redonner confiance aux prêteurs dans la zone euro, le doute est rapidement revenu.
Il est illustré par plusieurs articles de commentateurs économiques dont la chronique hebdomadaire publiée par The Sunday Telegraph. L'auteur Liam Halligan, économiste, gestionnaire de fonds, n'est pourtant pas un adversaire de l'euro. C'est un chroniqueur influent. Il a reçu la distinction de journaliste économique de l'année par le British Press Awards.
Pour lui, l'accord comme les deux précédents ne fait que gagner un peu de temps et «au lieu de clarifier la situation, ajoute à la confusion… Dès la fin de la journée jeudi et plus encore vendredi, les signes d'alarme étaient là. Les marchés obligataires mondiaux, par construction plus sobres et plus avisés que les excités qui investissent dans les marchés d'actions, prenaient position contre l'accord». Il donne quelques semaines au plan de sauvetage pour voler en éclat.
C'est aussi le sentiment de l'économiste Marc Zandi de Moody's. «Les Européens ont gagné un peu de temps», écrit-il dans le Philadelphia Inquirer. «Les investisseurs internationaux ne seront pas vraiment rassurés tant que les gouvernements européens n'auront pas prouvé qu'ils sont vraiment capables de réduire leurs déficits budgétaires et leur niveau d'endettement… Il y a de grandes chances pour que les électeurs européens résistent et cela veut dire qu'il sera difficile aux politiques d'agir sans une intense pression des marchés.»
Liam Halligan du Sunday Telegraph comprend que les gouvernement et les politiques aient la tentation de passer outre et de ne pas accepter les «diktats» des marchés: «Pour qui se prennent ces traders?» Mais ce n'est tout simplement pas possible de faire comme si ils n'existaient pas.
«Si les marchés obligataires pour une raison ou une autre cessent de prêter à un certain nombre d'économies occidentales, nous assisterons à de vraies faillites et au non paiement de salaires, de retraites, à la fermeture d'écoles et d'hôpitaux, au chaos dans les transports et à des révoltes sociales.»
A moins de vraiment régler la crise. Pour le chroniqueur du Sunday Telegraph, l'annonce d'un renoncement des créanciers privés à 50% de leurs créances sur la Grèce est prématurée. L'ambition est de réduire la dette grecque pour la ramener de 150% à 120% du PIB du pays dans les prochaines années ce qui permettrait à l'économie grecque de ne pas être asphyxiée.
Mais Liam Halligan n'y croit pas, car l'accord n'est pas suffisamment contraignant. Il est «volontaire» et «en marchandant dur sur les coupons et les maturités des obligations (quels seront les intérêts annuels et pour combien de temps), ceux qui ont prêté sans réfléchir à la Grève obtiendront des conditions nettement plus favorables». Cette négociation de marchands de tapis dans la coulisse va rendre la situation bien plus compliquée pour le gouvernement grec... et il faudra bien que quelqu'un paye.
Concernant l'autre grande annonce du 27 octobre, le passage du Fonds européen de stabilité financière de 440 à 1.000 milliards d'euros, c'est un tour de passe-passe.
«La vraie question est: qui va finalement payer les crédits. Elle n'a pas été réglée lors du sommet de Bruxelles… Du coup, le différend fondamental entre la France et l'Allemagne pour savoir qui va prendre les pertes –les gouvernements de l'euro zone ou les prêteurs privés– n'a pas été surmonté.»
La démonstration du fait que les marchés obligataires sont loin d'être convaincus se trouve tout simplement dans le taux d'intérêt des emprunts d'Etat à 10 ans italiens. Il était de 6,06% vendredi 28 octobre, son plus haut niveau jamais atteint depuis que l'euro existe!