Le pèlerinage de Shikoku, l'un des plus beaux sentiers du Japon
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Le pèlerinage de Shikoku, l'un des plus beaux sentiers du Japon

Fanny Arlandis -

Similaire à Saint-Jacques-de-Compostelle par sa longueur, environ 1.200 kilomètres, le pèlerinage de Shikoku fait le tour de l'île japonaise du même nom. Depuis 1.200 ans, les pèlerins relient quatre-vingt-huit temples et cheminent sur les traces de Kōbō-Daishi, fondateur du bouddhisme Shingon, en quête de sens, pour commémorer un défunt ou simplement par amour de la marche.

Immersion dans un périple hors du commun effectué en quarante-deux jours de marche. 

Shikoku, la plus petite des quatre grosses îles japonaises, accueille l'un des pèlerinages les plus populaires du pays. On l'effectue à pied, en vélo, en voiture ou en bus. Les pèlerins qui choisissent de relier les quatre-vingt-huit temples par la marche mettent généralement entre quarante et cinquante jours.

Oyamada Kensho gère le temple cinquante-huit (Sennyu-ji) depuis plus de quarante ans. C'est le seul des quatre-vingt-huit à développer l'agriculture. Ce jushoku (maître du temple) rêve d'atteindre une autosuffisance alimentaire et achète régulièrement des terres aux alentours de la ville d'Imabari pour mettre en place son projet.

Cet itinéraire ne serait pas possible sans les hommes et les femmes qui gravitent autour. Ihala, 60 ans, gère depuis vingt ans le minshuku Sazanka, situé juste à côté du temple vingt-deux. Les minshuku sont des maisons d’hôtes chez l'habitant. Il est aussi possible de dormir dans certains temples et dans des ryokan, des auberges traditionnelles dotées de bains (o-furo) ou de sources chaudes (onsen), pour le plus grand plaisir de celles et ceux qui marchent depuis plusieurs jours! Dans tous les hébergements les repas sont servis à heure fixe, généralement 18 heures pour le dîner et 6h30 pour le petit-déjeuner. Le pèlerin reçoit aussi des O-settai (offrandes) tout le long du parcours (argent, nourriture, boissons, petits cadeaux) qu’il serait très impoli de refuser. Cette pratique, particulière à Shikoku, est ancrée dans les coutumes locales depuis des siècles. La table à l’entrée du minshuku d’Ihala est recouverte d’O-settai sous forme de fruits, gâteaux, bouteilles d’eau et boissons gazeuses.

La moyenne d'âge des Japonais·es qui effectuent cette marche est assez élevée. Ideko, à gauche de cette photo, a 70 ans. À sa droite, Fumi Morimoto est l'élégante patronne d'une petite maison d'hôte. Elle fabrique son propre doburoku, un saké local à partir de riz fermenté que l'on aperçoit dans la bouteille verte. Ce saké n’est pas filtré et les grains de riz mélangés à de la levure flottent encore dans un liquide à l'apparence laiteuse.

Les routes et les temples sont jonchés de petites statuettes en pierre au crâne rasé: les Jizo. Généralement coiffées d'un bonnet et d'un bavoir rouge en coton ou en laine, ces statues sont facilement reconnaissables. Elles représentent un Bouddha, Jizô Bosatsu, censé protéger les enfants et les personnes qui voyagent.

La plupart des pèlerins terminent leur marche au Koyasan. Ce lieu sacré, composé aujourd'hui de 117 temples, est perché sur un plateau entouré de huit sommets. Au bout du cimetière d’Okunoin, les pèlerins et les touristes traversent le pont Ichi no Hashi pour rejoindre un parc de cyprès qui entoure le mausolée de Kukai.

Fanny Arlandis

Fanny Arlandis

Journaliste, elle écrit principalement sur la photographie et le Moyen-Orient pour Le Monde, Télérama et Slate.

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