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Vous pensez que la neutralité du Net est un sujet chiant à mourir? Regardez John Oliver, ça va vous faire changer d'avis

Temps de lecture: 2 minutes

L'humoriste anglais John Oliver, connu pour ses prestations hilarantes dans le Daily Show de Jon Stewart ou la série Community, vient de se prêter avec succès à un exercice difficile: rendre sexy, drôle et intelligible le débat qui entoure la neutralité du Net, «seule expression, estime le comédien, qui promet d'être plus ennuyeuse qu'un featuring avec Sting».

Ce concept, qui affirme que tous les contenus doivent être traités de la même façon sur Internet, est au coeur de l'actualité aux Etats-Unis, où le gendarme des télécoms, la FCC, est sur le point d'entériner un ensemble de règles synonymes de la mort de la neutralité du Net, à en croire une majorité d'observateurs. Des règles qui admettent notamment pour la première fois que des opérateurs américains (équivalents d'Orange, Free, SFR...) fassent payer les sites afin que ces derniers délivrent leur contenu dans de meilleures conditions aux internautes. Et qui posent donc la question d'un Internet à plusieurs vitesses.

Problème: c'est chiant. Et donc personne ne s'y intéresse. «Le secteur des télécoms a compris le secret de l'Amérique, ironise Jon Olliver dans son émission, Last Week Tonight with John Oliver, difusée sur HBO et à voir (en anglais) ci-dessus. Si vous voulez faire quelque chose de vraiment néfaste, faites-le de manière ennuyeuse!» Et de tacler au passage les pratiques d'un géant du numérique:

«Apple pourrait mettre des extraits de Mein Kampf dans ses conditions d'utilisation, on serait quand même tous là à dire "d'accord"!»

«Pourtant la neutralité du Net est incroyablement importante», rappelle-t-il encore. Car la neutralité du Net permet tout un tas de choses. Comme par exemple, la possibilité «d'acheter de l'urine de coyotte» à distance. Ou le fait de vivifer l'innovation et la concurrence: c'est ainsi que «Facebook a supplanté Myspace, qui a lui-même supplanté Friendster, qui a lui-même supplanté le fait de vraiment avoir des amis», raconte John Oliver. Qui ajoute:

 

«Vous vous souvenez comment c'était d'avoir de vrais amis, en vrai? C'était horrible! On ne pouvait pas cliquer sur leur visage pour les faire disparaître!»

Non content de glisser de nombreuses autres vannes du même genre (à base de Superman, de fans de One Direction ou bien encore d'Usain Bolt), l'humoriste en profite aussi pour souligner certaines réalités, telles que l'incroyable lobbying auquel se

19 millions

Montant, en dollars, qu'a consacré Comcast à son activité de lobbying aux États-Unis.

livrent les opérateurs de télécommunications à Washington. Comcast a par exemple consacré à cette seule activité près de 19 millions de dollars cette année. Soit le deuxième poste de dépense le plus élevé d'une entreprise en matière de lobbying, Comcast arrivant juste derrière... un groupe militaro-industriel.

John Oliver rappelle également que Barack Obama, «qui fait du golf avec le directeur de Comcast», a récemment nommé à la tête du gendarme des télécoms américain un ancien lobbyiste de l'industrie des télécoms. «Un peu comme si vous preniez un dingo comme baby-sitter!», raille l'humoriste, qui finit son intervention en suppliant les «commentateurs d'Internet», ces «monstres», de réagir sur le site de la FCC. L'autorité des télécoms a en effet laissé une centaine de jours aux internautes pour réagir à sa nouvelle règlementation. L'occasion unique, pour les pires trolls du Net d'«utiliser, pour une fois dans leur vie, leur rage de manière constructive».

Mise à jour (4 juin 2014): Visiblement, cet appel a très bien fonctionné puisque peu de temps après l'émission, dont l'extrait sur la neutralité du Net a déjà été vu plus d'un millions de fois sur YouTube, le site de la FCC ployait sous l'assaut des commentateurs: «nous connaissons des difficultés techniques sur notre système de commentaires en raison d'un trafic important», a posté le 2 juin sur Twitter le gendarme des télécoms américains. 

The Guardian rappelle que plus de 47.000 réactions ont été déposées ces 30 derniers jours sur le site de la FCC, qui a déclaré a Variety qu'il n'était «pas clair que le volume important [de commentaires] soit directement lié à l'émission de John Oliver».

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